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PUBLICATIONS À VENIR

2022

À venir.

par

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SOMMAIRE

La représentation de la criminalité dans les médias

La représentation de la criminalité dans les médias

La représentation de la criminalité dans les médias

par Molly Bussière

PAR ICI

La confession en contexte d'interrogatoire policier

La représentation de la criminalité dans les médias

La représentation de la criminalité dans les médias

par Audrey Lahaie

PAR ICI

La réinsertion sociale

La représentation de la criminalité dans les médias

La cybercriminalité et ses caractéristiques

par Molly Bussière

PAR ICI

La cybercriminalité et ses caractéristiques

Le concept de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux (NRCTM)

La cybercriminalité et ses caractéristiques

par Bianca Meszaros

PAR ICI

Le leurre informatique

Le concept de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux (NRCTM)

Le concept de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux (NRCTM)

par Bianca Meszaros

PAR ICI

Le concept de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux (NRCTM)

Le concept de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux (NRCTM)

Le concept de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux (NRCTM)

par Ariane Pelchat

PAR ICI

Criminalité & santé mentale

Criminalité & santé mentale

Criminalité & santé mentale

par Molly Bussière

PAR ICI

│Blanchiment d'argent│ Money laundering

Criminalité & santé mentale

Criminalité & santé mentale

par Bianca Meszaros

PAR ICI

Le processus de détermination de la peine

Criminalité & santé mentale

Le processus de détermination de la peine

par Sofia Erchiqui-Martel

PAR ICI

Le profilage criminel & le profilage géographique

L'application de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA)

L'application de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA)

par Molly Bussière & Audrey-Maude Légaré

Par ici

L'application de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA)

L'application de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA)

L'application de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA)

par Ariane Pelchat

PAR ICI

Spécial Halloween 2022 ― recueil collectif

L'application de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA)

Traitement des violences en contexte conjugal

Faits saillants, tendances et conseils de sécurité pour célébrer l'Halloween en toute quiétude.

PAR ICI

Traitement des violences en contexte conjugal

Les 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes

Traitement des violences en contexte conjugal

par Sofia Erchiqui-Martel

PAR ICI

Les 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes

Les 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes

Les 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes

par H3YJUD 

En savoir plus

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Les 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes

Les 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes

 À venir. 

Image montage de ruban de scène de crime jaune avec un écran de télévision embrouillée et un homme

LA REPRÉSENTATION DE LA CRIMINALITÉ DANS LES MÉDIAS

« Le crime est en augmentation, j’le sais parce que les médias en parlent tout le temps »


« Les personnes en libérations conditionnelles sont dangereuses, j’le sais parce que les médias nous rapportent toujours des cas de récidives ! »


« J’ai peur de marcher le soir seul dans la rue parce que les médias ont rapporté des crimes violents qui sont survenus le soir ».


       Voilà différentes phrases qui ont de fortes chances d’être évoquées par monsieur et madame tout le monde. Les médias sont forts, surtout pour rapporter le crime, ces faits divers si intéressants et sensationnels. Saviez-vous que les médias sont la source d’information principale de 95 % de la population canadienne quant au phénomène criminel [1] ? Il semblerait même, selon un sondage de Justice Canada, qu’en 2007, les Canadiens accordaient plus d’importance aux informations rapportées par les médias que celles rapportées par le gouvernement [2]. Le crime représenterait également de 10 % à 30 % du contenu des journaux. Par ailleurs, la façon dont les médias rapportent ces nouvelles influence de façon importante et non négligeable la perception de la population envers le crime et le système de justice [1]. C’est à partir des années 60 que des chercheurs se sont mis à s’inquiéter quant à l’effet des médias sur la population et que des recherches ont été mises en branle [3].


       En fait, il semblerait que les médias rapportent le crime sous la forme d’une pyramide inversée : les crimes les plus graves et les plus violents seraient ceux qui sont le plus souvent rapportés alors que ceux qui sont « les moins graves » seraient moins souvent abordés. Or, dans la réalité, ces derniers sont ceux qui surviennent le plus souvent. Par exemple, en 1997, Reiner nous informait que l’homicide représentait le tiers des délits rapportés alors, qu’en réalité, ils représentent moins de 1 % de la criminalité [4]. Les médias ont donc tendance à dépeindre un portrait disproportionné des crimes violents. En plus de rapporter ceux-ci de façon non représentative, le crime est également souvent décrit de façon très concise. Ainsi, cela fait en sorte de négliger certains détails importants comme l’occurrence réelle du crime, ses motifs, les politiques qui protègent la victime, etc. [1 Cela n’aide en rien à une meilleure compréhension du public. L’éducation ne semble pas être une visée. Selon un criminologue, cela fait en sorte de créer un sentiment de peur dans la collectivité. Ce faisant, la population réclame donc davantage de présence policière ainsi que l’augmentation du pouvoir qui leur est accordé. En revanche, certaines recherches viennent nuancer les conséquences possibles que peuvent engendrer les médias; tous ne sont pas du même avis. En effet, le lien serait beaucoup plus complexe qu’il ne le parait. Les médias locaux, par exemple, auraient un impact plus considérable sur la peur d’être victime que les médias nationaux puisque le crime est plus près géographiquement et donc plus probable [5]. Par ailleurs, une certaine partie des citoyens comme les femmes et ceux qui écoutent plus la télévision auraient davantage tendance à croire les médias et à développer un sentiment de peur [3].


       Les médias ont également un effet sur la confiance envers le système de justice. Une étude bien connue aujourd’hui a demandé à des citoyens de donner leur avis sur la sentence rendue par un juge. La moitié de la population à l’étude pouvait lire un résumé des documents de la cour alors que l’autre moitié n’avait qu’une coupure de journal comme explication. L’étude a démontré que 63 % de ceux qui ont pu lire que l’article de journal avaient répondu que la sentence rendue par le juge était trop clémente alors que pour ceux ayant lu les documents de la cour, seulement 19 % avaient donné la même réponse [6]. Cela peut être expliqué par l’histoire que racontent les journalistes au moment de rapporter les faits, ceux-ci mettant rarement de l’avant les nuances. Au contraire, ce serait les facteurs aggravants qui seraient au cœur de l’article, faisant en sorte d’engendrer une volonté d’une sévérité accrue. Les médias font également en sorte de créer une image stéréotypée de la victime. En effet, les victimes qui sont le plus souvent évoquées par la presse sont les femmes, les personnes âgées et les enfants. Celles-ci sont souvent considérées comme étant les « victimes idéales » en raison de leur innocence [7]. Or, en réalité, ce sont celles qui sont le moins susceptibles de devenir victimes. Les médias font également en sorte de stigmatiser ces groupes sociaux [8]. 


       Un autre risque relié à la représentation médiatique du crime est le populisme pénal [1]. Le populisme pénal est défini comme suit :


« Une politique ou une série de politiques populaires qui tentent de répondre à des demandes populaires – qu’elles aient été exprimées ou non. Ainsi, un politicien usant de populisme pénal tentera de récolter un maximum de votes en tablant sur la peur du crime, un évènement criminel souvent exceptionnel, mais surmédiatisé. [...] Or, les politiques populistes peuvent être mises en œuvre malgré leur détachement de légitimité scientifique, préférant le registre émotionnel aux critères rationnels. » [9]


       Afin de présenter un exemple du populisme pénal, on peut mentionner l’histoire Bastien-Livernoche. Mario Bastien, un pédophile récidiviste qui avait été exceptionnellement libéré plus tôt malgré le risque qu’il représentait, avait agressé sexuellement et tué un jeune garçon de 13 ans, Alexandre Livernoche [10]. Suite à ce drame, une réforme totale du système correctionnel avait eu lieu. Or, malgré l’atrocité des évènements, c’était un cas exceptionnel et isolé qui ne requérait pas nécessairement des changements aussi drastiques du système. C’est à la suite de ce genre d’évènement que les politiciens font appel aux émotions notamment la peur et le dégout et au manque de connaissance de la population afin de faire passer leur idéologie et leur politique.


       Enfin, on peut voir que les médias ont un effet considérable sur la perception de la population envers le crime. Pourtant, il est possible de faire autrement. Dans les pays scandinaves, les médias rapportent principalement des évènements basés sur la recherche et rapportent les nouvelles dans un but d’éducation [11]. Il est fort possible que si les médias d’ici optaient davantage pour une visée éducative, la population canadienne et québécoise seraient beaucoup mieux informées quant au phénomène criminel.

   


_______________________________________


Références 


[1] Bélisle, E. (2010). Les médias et la justice : L’impact des médias sur l’opinion publique en matière de criminalité et justice pénale. Groupe de défense des droits des détenus de Québec. 


[2] LATIMER, Jeff et Norm DESJARDINS. Sondage national sur la justice de 2007 : lutte contre la criminalité et confiance du public, Ottawa, Ministère de la Justice du Canada, 2007, p. 14.


[3] Leclerc, C. (2013). Médias et opinion publique: des relations à préciser et à questionner. La Porte ouverte, 26(1).


[4] Reiner,R.(1997).Media made criminality.#Oxfordhandbookofcriminology,2.


[5] Beale,S.S.(2006).NewsMedia'sInfluenceonCriminalJusticePolicy:HowMarket-DrivenNewsPromotesPunitiveness,#eWilliam&MaryLawReview.,48,397.


[6] Doob, A. N., & Roberts, J. V. (1984). Social psychology, social attitudes, and attitudes toward sentencing. Canadian Journal of Behavioural Science/Revue canadienne des sciences du comportement, 16(4), 269.


[7] https://crcvc.ca/fr/publications/media-guide/understanding/


[8] Marsh,I.,& Melville,G.(2008).Crime,justice and the media. Routledge.


[9] LAMALICE, Olivier. Opinion publique, incarcération et système pénal aux États-Unis : les influences de la classe politique et des médias, Québec, ministère de la Sécurité publique du

Québec, 2006. 29 pages.


[10] https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/482439/livernoche-dix-ans


[11] Pratt, J. (2008). Scandinavian exceptionalism in an era of penal excessPart I: The nature and roots of scandinavian exceptionalism. The British journal of criminology, 48(2), 119-137

Rédaction par Molly Bussière

Corrections et vérifications réalisées par Audrey-Maude Légaré.

LA CONFESSION EN CONTEXTE D'INTERROGATOIRE POLICIER

La confession en contexte d’interrogatoire policier 


      L’interrogatoire policier constitue un moment charnière dans une enquête policière. En effet, il s’agit d’une méthode permettant aux policiers de collecter de l’information importante auprès des suspects (Holmberg et Christianson, 2002). D’ailleurs, les informations obtenues lors d’une entrevue d’enquête peuvent servir à des fins diverses, soit à porter des accusations, à comprendre le mobile ou à infirmer ou confirmer des informations provenant d’autres sources (Walton, 2003). Ainsi, toute information divulguée par le suspect peut être utile pour découvrir la vérité (Baldwin, 1992). L’interrogatoire peut mener le suspect à faire des aveux, ce qui peut avoir un impact considérable sur le dénouement de l’enquête, et ce, particulièrement s’il existe peu de preuves matérielles concernant le dossier (Inbau et coll., 2001). En effet, une vraie confession est fort utile pour corroborer les faits, mais également pour construire la preuve de culpabilité. Kassin et Neumann (1997) mentionnent d’ailleurs qu’une confession a plus d’impact sur la décision d’un jury que le témoignage de témoins ou l’existence de preuves physiques concrètes. Dans certains cas, l’aveu est même nécessaire pour porter des accusations à l’encontre d’un individu (Deslauriers-Varin et coll., 2011; Philips et Brown, 1998; Leo, 1996). En effet, selon l’étude de Philips et Brown (1998) lorsqu’il n’y a pas d’aveux, les charges sont abandonnées dans 16% des cas alors que lorsqu’il y a confession, les charges sont seulement abandonnées dans 9% des cas. Lors d’un interrogatoire policier, les suspects sont soumis à plusieurs pressions qui peuvent, entre autres, provenir des complices, des policiers, des techniques d’interrogatoire ou du suspect lui-même (Gudjonsson, 2003). Il est donc possible de constater que la confession est un phénomène complexe pouvant être influencé par une multitude de facteurs.


La prévalence de la confession


      Plusieurs facteurs peuvent rendre difficile la confession d’un crime commis (Gudjonsson, 2003). En effet, l’aveu d’un crime peut engendrer de nombreuses conséquences pour le coupable, mais également pour ses proches. La possibilité de recevoir une sanction pénale peut dissuader certains contrevenants de confesser. Envisager de recevoir une peine d’incarcération pour l’infraction commise et donc d’être privé de sa liberté peut effectivement être menaçant pour le coupable. De plus, lors d’une première offense, la personne contrevenante peut craindre l’impact d’avoir un casier judiciaire dans sa vie. La peur de décevoir et/ou d’être rejeté par les membres de sa famille et par ses amis est également un facteur important à considérer. Effectivement, les proches d’un accusé peuvent grandement être affectés par la situation. Pensons aux membres de la famille d’un contrevenant qui fait la une des journaux qui doivent subir le jugement de la population à leur égard. La crainte de détruire sa réputation peut aussi décourager la confession. Certaines personnes veulent protéger leur statut dans la société, et ce, même si ce statut n’est pas nécessairement reconnu par les autres. Admettre à soi-même la commission de certains gestes peut être difficile pour l’individu. En effet, certaines personnes veulent oublier tout ce qui se rapporte au crime afin de protéger leur estime personnelle. La peur des représailles de complices dissuade aussi certains individus à avouer leur crime. Une confession peut exposer l’implication de tierces personnes qui voudront peut-être se venger de l’individu qui les a dénoncés. 


      Malgré la présence de facteurs pouvant décourager l’aveu, il y a tout de même des suspects qui confessent. En effet, plusieurs études montrent que la confession n’est pas rare dans un contexte d’interrogatoire policier. 13 études sur la confession, réalisées en Angleterre et aux États-Unis, ont été répertoriées par Gudjonsson (2003) afin d’analyser le taux de confession. Ces études montrent que dans 42% à 76% des cas, le suspect avoue son crime lors de son interrogatoire. Les études réalisées aux États-Unis montrent un taux de confession entre 42% et 47%. Les études menées en Angleterre, pour leur part, montrent un taux plus élevé se situant entre 42% et 76%. Ces différences peuvent s’expliquer par plusieurs facteurs. Le système de justice et les lois sont différents d’un pays à l’autre, ce qui peut avoir une influence sur le taux de confession. Par exemple, aux États-Unis et au Canada, un suspect peut invoquer son droit de garder le silence, ce qui n’est pas le cas en Angleterre (Gudjonsson, 2003). Les techniques d’enquêtes utilisées par les policiers peuvent également différer d’un pays à l’autre. En Amérique du Nord, l’utilisation de la technique Reid est très répandue, et ce, encore aujourd’hui (Gudjonsson, 2003 ; St-Yves et Landry, 2004). Cette technique en 9 étapes consiste à combattre les résistances du suspect à avouer son crime en minimisant les conséquences de l’aveu (Gudjonsson, 2003; Inbau & coll., 2001; Bergeron, 2017). La technique Reid propose également de confronter le suspect aux incohérences de son discours afin de favoriser sa collaboration. Cette technique d’interrogatoire n’est toutefois pas utilisée en Angleterre, ce pays interdit effectivement l’utilisation de technique persuasive lors des interrogatoires policiers (Deslauriers-Varin & coll., 2011). Malgré les limites mentionnées, il est tout de même intéressant d’avoir une approximation du taux de confession afin de mieux cerner le phénomène. À la lumière des études évoquées précédemment, il est possible de constater que la confession est tout de même assez fréquente et qu’elle peut être influencée par plusieurs facteurs (Deslauriers-Varin & coll., 2011).


Les facteurs ayant une influence sur la confession 


      Plusieurs études révèlent l’influence des facteurs individuels, délictuels et contextuels dans le choix d’un suspect de confesser ou non un crime aux policiers. Moston et coll. (1992) mentionnent effectivement que l’interaction entre ces facteurs a un impact sur le dénouement d’un interrogatoire policier. L’un des facteurs qui a souvent été associé à la confession est la détention de preuves de qualité par les policiers (Deslauriers-Varin et coll., 2011b; Deslauriers-Varin et coll., 2011a; Moston et coll., 1992) Il est toutefois important de mentionner que ce serait la perception du suspect de la force de la preuve détenue par les policiers qui auraient un impact sur son choix de confesser, plutôt que la preuve véritable (Bergeron, 2017). Donc, si le suspect perçoit que la preuve détenue contre lui est forte, cela favoriserait sa confession (Deslauriers-Varin et coll., 2011b; Deslauriers-Varin et coll., 2011a; Gudjonsson et Petursson, 1991; Moston et coll., 1992; Phillips et Brown, 1998). Cette perception de la preuve semble donc être utile pour comprendre comment l’individu réagira aux faits qu’on lui reproche. En effet, l’étude de Moston et coll. (1992) révèlent que les deux tiers des suspects avouaient leur crime lorsqu’ils percevaient que les preuves contre eux étaient fortes, le un tiers des suspects avouaient lorsqu’ils percevaient que les preuves détenues étaient modestes et seulement le un dixième des suspects avouaient lorsqu’ils percevaient que les preuves étaient faibles ou inexistantes. D’autres études révèlent que plus de 50% des suspects avaient décidé de faire des aveux puisqu’ils étaient convaincus que les policiers avaient de bonnes preuves contre eux (Gudjonsson et Bownes, 1992; Sigurdsson et Gudjonsson, 1994). Selon Gudjonsson (2003) lorsque les suspects perçoivent que les policiers détiennent de fortes preuves de leur culpabilité, ils en viennent à considérer le déni comme inutile, ce qui favorise leur collaboration.


      Toutefois, Deslauriers-Varin et coll. (2011a) suggèrent que les personnes contrevenantes qui ont eu plusieurs contacts avec la justice sont plus susceptibles de nier leur infraction, et ce, même si les preuves semblent accablantes. Walsh et Bull (2012), pour leur part, affirment que le poids de la preuve a un impact significatif sur le choix de confesser seulement lorsqu’il interagit avec d’autres facteurs. Par exemple, le poids de la preuve pourrait avoir un impact significatif lorsqu’il est combiné avec l’utilisation de techniques d’interrogatoire (Bergeron, 2017). D’ailleurs, Moston et coll. (1992) soutiennent que les facteurs pouvant influencer la confession ne devraient pas être analysés individuellement, mais plutôt en combinaison avec d’autres facteurs pour contrer les limites d’autres études. 


L’utilisation stratégique des preuves 


     Depuis une quinzaine d’années, on assiste au développement d’un champ de recherche sur l’utilisation stratégique des preuves (strategic use of evidence) lors d’un interrogatoire policier (Granhag et Hartwig, 2014). La technique d’utilisation stratégique des preuves (SUE) propose une structure d’entrevue auprès des suspects dans laquelle on opte pour des stratégies de questionnement et de divulgation de la preuve facilitant la détection du mensonge. Plus précisément, la technique SUE vise à influencer la perception du suspect en le confrontant graduellement aux incohérences de son discours à l’aide des preuves contenues dans le dossier. Selon le cadre SUE, les suspects qui mentent et ceux qui disent la vérité adoptent des stratégies de contre-interrogation différentes (Granhag et Hartwig 2008; Hartwig et coll., 2007; Hartwig et coll., 2014). En effet, la recherche tend à montrer que les suspects innocents qui disent la vérité ont tendance à être plus ouverts et à donner de l’information précise, alors que les suspects qui ont commis l’infraction reprochée ont davantage tendance à être évitant et à donner peu d’informations sur leurs activités (Hartwig et coll., 2007; Strömwall et coll., 2006; Hartwig et al., 2010; Granhag et al., 2009). Ainsi, lorsque les suspects ne sont pas informés des preuves détenues contre eux, ils ont tendance à divulguer des informations qui ne correspondent pas à ces preuves (Hartwig et coll., 2007; Strömwall et coll., 2006; Hartwig et coll., 2014). Les policiers sont donc en mesure de déceler des incohérences dans le discours du suspect, ce qui constitue un indice que le suspect n’est pas honnête. Dans le cas où le suspect est informé des preuves détenues contre lui, il peut adapter ses réponses et sa version de faits afin qu’elles soient plausibles en regard des preuves présentées, ce qui rend la détection du mensonge plus difficile pour les enquêteurs. 


      Pour tester les principes de la technique SUE, plusieurs chercheurs ont analysé l’impact des différentes méthodes de divulgation de la preuve. D’ailleurs, Oleszkiewicz et Watson (2020) ont réalisé une méta-analyse dans laquelle ils comparent l’efficacité de la divulgation rapide, graduelle et tardive de la preuve lors d’un interrogatoire policier. La divulgation rapide consiste à dévoiler au suspect l’entièreté de la preuve détenue dès le début de l’interrogatoire. Ainsi, le suspect connait le dossier de preuve avant de répondre aux questions. La divulgation graduelle consiste à dévoiler au suspect un élément de preuve à la fois. Dans ce cas, on lui demande de rendre compte de cette preuve avant d’en divulguer une autre. Finalement, la divulgation tardive consiste à dévoiler les preuves seulement lorsque le suspect a donné sa version des faits ou à ne dévoiler aucune preuve lors de l’interrogatoire. Les recherches tendent à montrer que le dévoilement rapide des preuves est moins efficace que le dévoilement graduel et tardif étant donné que le suspect a l’opportunité d’ajuster ses réponses afin qu’il n’y ait pas d’incohérences (Hartwig et al., 2005, 2006, 2011). Des chercheurs ont également tenté de comparer l’efficacité du dévoilement graduel et du dévoilement tardif. Toutefois, les résultats obtenus sont contradictoires. En effet, Dando et Bull (2011) ont constaté que la divulgation graduelle était plus efficace pour détecter les mensonges que la divulgation tardive. Toutefois, les résultats de Sorochinski et coll. (2014) montrent que la divulgation tardive permettait d’identifier davantage d’incohérences dans le discours du suspect. Il est donc nécessaire que davantage d’étude soit réalisée sur le sujet pour vérifier si l’une ou l’autre de ces stratégies de dévoilement est plus efficace. 


L’attitude de l’enquêteur 


      Les comportements des policiers et le contexte relationnel dans lequel se déroule l’interrogatoire semblent également être des éléments importants à considérer. En effet, certains auteurs affirment que l’adoption d’une approche humaniste, empathique et de non-jugement par l’enquêteur faciliterait la collaboration (Wachi et coll., 2014; Williamson, 1993). Selon Holmberg et Christianson (2002), une approche humaniste se caractérise par une relation de convivialité, de reconnaissance de l’autre, de respect et de coopération. Wachi et coll. (2014) mentionnent effectivement que lorsqu’un suspect se sent compris et respecté, il semble gagner en confiance et est donc plus porté à coopérer. Shepherd (1991) prône d’ailleurs l’interrogatoire éthique qui implique que les policiers révèlent leur humanité à l’accusé et qu’ils le traitent avec dignité et empathie. L’adoption d’une telle approche limiterait aussi les risques de faux aveux (Narchet et coll., 2011). Certaines études montrent qu’une approche humaniste est plus efficace qu’une approche dominante (Holmberg et Christianson, 2002; Kebell et coll., 2010; Kebell et coll., 2008). En fait, Holmberg et Christianson (2002) suggèrent que les interrogatoires marqués par la dominance seraient davantage associés au déni des accusations par le suspect, alors que les interrogatoires réalisés dans le respect conduisent plus souvent à la collaboration du suspect. D’ailleurs, l’utilisation de techniques d’interrogatoires favorisant le développement d’un lien de confiance serait préférable à l’utilisation de techniques coercitives puisque cela augmente les chances que le suspect divulgue des informations pertinentes pour l’enquête (Meissner et coll. 2014; Soukara et coll., 2009). Cela supporte d’ailleurs les résultats de Holmberg (1996) montrant que les délinquants sexuels ayant fait des aveux décrivaient leur interrogatoire comme une expérience calme empreinte d’empathie et d’humanité alors que ceux qui avaient nié les faits avaient davantage perçu une expérience impliquant de la pression, de la confrontation et du jugement. 


      La littérature scientifique insiste également sur l’importance de l’établissement d’un lien entre l’enquêteur et le suspect (Bull et Milne, 2004; Gudjonsson, 2003;  St‐Yves & Deslauriers‐Varin, 2009; Holmberg et Christianson, 2002; Deslauriers-Varin, 2020). Le développement d’un rapport positif amènerait l’interviewé à être moins méfiant ou dérangé par l’attitude de l’enquêteur, facilitant ainsi la communication et la quête d’informations (Deslauriers-Varin, 2020; Holmberg et Christianson, 2002). Effectivement, ce lien amènerait le suspect à fournir de l’information plus détaillée et précise. D’ailleurs, Bull et Cherryman (1996) rapportent que 93% des policiers de leur échantillon ont reconnu le rôle crucial de la création d’un lien. Toutefois, malgré cette reconnaissance, il semble que l’établissement d’un lien lors d’entrevue d’enquête demeure assez rare (Clarke et Milne, 2001). Clarke et Milne (2001) rapportent à cet effet un taux de 7% de cas où l’enquêteur a créer un lien avec le suspect. Cela pourrait possiblement s’expliquer par le fait que les enquêteurs préfèrent maintenir une atmosphère plus formelle (Baldwin, 1993). Holmberg (2009) suggère que l’absence de lien peut engendrer une hésitation à se confier et des réactions aversives autant chez l’enquêteur que chez le suspect. L’approche humaniste favoriserait la création d’un lien et faciliterait ainsi le partage d’informations pertinentes chez le suspect. 


      À la lumière de ces informations, il est possible de constater que la confession demeure un phénomène complexe pouvant être influencé par plusieurs facteurs. Le présent article s’est davantage penché sur les facteurs contextuels d’importance. Toutefois, il est important de garder en tête que d’autres facteurs individuels (âge, sexe, état civil, etc.) et délictuels (antécédents judiciaires, gravité du crime, etc.) peuvent jouer un rôle dans le choix d’un individu de faire des aveux ou non. Malgré un plus grand intérêt de la communauté scientifique à l’égard de ce phénomène dans les dernières années au Canada, la confession mérite encore d’être explorée pour en tirer un portrait plus complet. 


_________________________________________________________


Références

  

      Baldwin, J. (1993). Police interview techniques: Establishing truth or proof? British Journal of Criminology, 33, 325-352.

      Bergeron, A. (2017). Les motivations à la non-confession en contexte d’interrogatoire policier : exploration des profils explicatifs de la non-confession dans le cas d’individus reconnus coupables d’un crime. (Mémoire de Maitrise inédit), Université Laval.

      Bull, R., & Cherryman, J. (1996). Helping to identify skills gaps in specialist investigative interviewing: Enhancement of professional skills. Portsmouth: University of Portsmouth, Psychology Department.

      Clark, C. et Milne, R. (2001). National Evaluation of the PEACE Investigative Interviewing Course. Police Research Award Scheme. Home Office. Report No : PRAS/149.

      Dando, C. J., & Bull, R. (2011). Maximising opportunities to detect verbal deception: Training police officers to interview tactically. Journal of Investigative Psychology and Offender Profiling, 8, 189– 202.

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Rédaction par Audrey Lahaie

Corrections et vérifications réalisées par Bianca Meszaros & Audrey-Maude Légaré

LA RÉINSERTION SOCIALE DES PERSONNES CONTREVENANTES

      C’est un fait, tout contrevenant va, un jour, sortir du centre de détention dans lequel il est incarcéré, que ce soit à la toute fin de son mandat ou en libération anticipée (du moins dans la grande majorité des cas). En effet, plus de 90 % des individus incarcérés vont finir par sortir de leur milieu de détention [1]. Or, cela engendre une inquiétude chez la population générale qui entretient une peur et une incompréhension envers le système de justice pénale, et ce, surtout en ce qui a trait à la libération sous condition. Pourquoi libérer un détenu alors qu’il n’a pas terminé de purger sa peine ? Que veut dire réinsérer socialement, n’est-ce pas dangereux ? 

Ces questions sont légitimes et résultent fort probablement d’un manque d’information et de connaissances. Ainsi, il est important d’y répondre afin d’augmenter la tolérance et la compréhension de la société, puisque celle-ci est importante, voire primordiale à la bonne réinsertion sociale des contrevenants. 


      Attention : Bien que pour certaines organisations, les mots réintégrer, réhabiliter et réinsérer réfèrent à des concepts différents, afin de faciliter la compréhension de cet article, ils seront ici utilisés de façon interchangeable.


La finalité de la peine


      Selon le Code criminel canadien, la peine vise à la fois la dénonciation de l’acte, la réparation des torts causés, la dissuasion, la neutralisation, ainsi que la responsabilisation ou la réinsertion sociale des contrevenants condamnés. Tentons de distinguer ces différentes finalités. D’abord, la dénonciation fait référence au besoin de démontrer la désapprobation de la société envers le crime [2]. De son côté la dissuasion à un double objectif, soit de dissuader la population générale à commettre un tel crime (dissuasion générale) et dissuader le contrevenant de commettre à nouveau un crime (dissuasion spécifique). La neutralisation, quant à elle, vise à empêcher le contrevenant de nuire à la sécurité de la population pendant une période de temps fixe tandis que la réparation (seule finalité à considérer la victime) vise à réparer le dommage causé à la victime [2][3]. Enfin, la réhabilitation a comme objectif de modifier le comportement et de prévenir la récidive. Dans une optique de réhabilitation, la sanction du contrevenant est établie en fonction de celui-ci et non en fonction du délit [3].

La vision « classique » de la réhabilitation, comme le nomme l’Ordre professionnel des criminologues du Québec (OPCQ), est de réinsérer socialement et de réadapter les individus contrevenants, tout en s’assurant « de neutraliser leur agir délinquant ». Toutefois, celui-ci propose plutôt une version 2.0 de la réhabilitation : elle devrait plutôt faciliter la (ré)intégration sociale et communautaire et le développement des personnes contrevenantes tout en favorisant leur réconciliation avec elles‐mêmes et leur environnement [4].


Qu’est-ce que la réinsertion sociale 


      Selon le ministère de la Sécurité publique du Canada, la réinsertion sociale se définit comme « un ensemble d’interventions dont l’objectif est que la personne contrevenante vive de façon socialement acceptable, et ce, dans le respect des lois. Le fait d’opter pour la réinsertion sociale ne signifie nullement qu’il n’existe pas de contrôle ou d’encadrement des personnes contrevenantes. Le contrôle seul ne suffit pas toutefois à réduire la récidive; il doit être accompagné de programmes et de services pour aider les contrevenants à progresser.» [3]


      L’association des services de réhabilitation sociale du Québec (ASRQ) ajoute que la réinsertion sociale est un processus qui comporte plusieurs dimensions : organisationnelle (hébergement, nourriture, vêtement), occupationnelle (formation, travail, bénévolat) et relationnelle (famille, pairs, implication dans la communauté) [1]. 


      Au Québec, la réinsertion sociale est au cœur de la Loi sur le système correctionnel du Québec. On sait maintenant que celle-ci est la meilleure façon de faire diminuer le risque de récidive des personnes contrevenantes. 


     « Les Services correctionnels du ministère de la Sécurité publique, la Commission québécoise des libérations conditionnelles ainsi que leurs partenaires des organismes communautaires et tous les intervenants de la société intéressés au système correctionnel favorisent la réinsertion sociale des personnes contrevenantes. Dans le respect des droits fondamentaux de ces personnes, ils contribuent à la protection de la société en les aidant à devenir des citoyens respectueux des lois tout en exerçant sur elles un contrôle raisonnable, sécuritaire et humain, en reconnaissant leur capacité à évoluer positivement et en tenant compte de leur motivation à s’impliquer dans une démarche de réinsertion sociale. » Loi sur le système correctionnel du Québec (L.Q. 2002, c. 24). [5] 


      Le service correctionnel canadien a également comme mandat de réinsérer les contrevenants en toute sécurité [6]. L’aide et le contrôle sont au cœur des interventions, bien qu’il puisse parfois être difficile de bien les conjuguer. Ainsi, la réinsertion sécuritaire des contrevenants est une mission importante du Service correctionnel canadien. En effet, dans la majorité des cas, l’incarcération n’est que temporaire et la meilleure façon de protéger le public à long terme est de faire en sorte que les contrevenants redeviennent des citoyens respectueux des lois [7].


Quelques défis à la réinsertion sociale


      Lors de leur tentative de réinsertion sociale, les contrevenants peuvent faire face à une variété d’obstacles et de défis qui vont impacter leur bonne réintégration. Ces derniers vont varier d’un individu à un autre [8]. D’abord, trouver un emploi peut s’avérer difficile pour un ex-détenu qui doit traîner son casier judiciaire tel un boulet à la cheville. En effet, on peut retrouver de la discrimination au niveau des employeurs envers les ex-judiciarisés [9]. Le manque d’éducation [10] le manque de formation [9] ainsi que le manque d’expériences professionnelles [11] sont également des obstacles non négligeables. Or, pour l’ASRQ, l’accès à un emploi est un facteur clé à la réinsertion puisqu’il peut permettre à l’individu de développer son estime de soi, d’élargir son réseau social et de créer un sentiment d’appartenance [12]. Détenir un emploi a également fait ses preuves comme étant un élément de réussite à la réinsertion sociale en plus de permettre de diminuer la récidive et même d’amener un désistement au crime [13] [14]. Dans le même ordre d’idée, en raison de la difficulté à trouver un emploi, les ex-judiciarisés peuvent également faire face à des problèmes financiers, ce qui peut les amener à éprouver de la difficulté à subvenir à leurs besoins de base (transport, hébergement, nourrir, vêtir) [9]. 


      Par ailleurs, ceux-ci ont également besoin d’avoir un réseau de soutien, qu’il soit familial ou communautaire [15]. Par exemple, ce dernier peut avoir des effets positifs, dont le maintien de l’abstinence lié aux problèmes de consommation [16]. Il peut également faciliter la réinsertion sociale. Or, se créer un réseau de soutien peut s’avérer difficile pour ces individus. D’abord, la famille et les amis peuvent entretenir des réticences face au fait de renouer les liens [17]. À l’opposé, si l’entourage direct entretient des valeurs criminelles, il peut être difficile pour l’individu de demeurer en relation avec ces derniers sans risquer de commettre de nouveaux délits [18]. Par ailleurs, en raison de leur passé, les ex-détenus peuvent également avoir des craintes face au fait de rencontrer de nouvelles personnes sur le plan amoureux. Or, des études démontrent qu’un mariage cohésif peut être un élément clé au désistement criminel [14].


      Enfin, il peut être ardu pour les ex-judiciarisés de se créer un nouveau mode de vie, ne sachant pas trop comment occuper leur temps libre [19]. Cela est encore pire lorsque l’individu est incapable de se trouver un emploi, d’où l’importance de l’emploi et des loisirs. 


      Comme il est possible de constater, il y a plusieurs défis auxquels les ex-judiciarisés peuvent faire face. Ainsi, la réinsertion sociale comporte un éventail de dimensions (réseau social, hébergement, nourriture, mode de vie, travail, loisirs, consommation, trouble de santé mentale, etc.) et celles-ci sont toutes essentielles à son bon déroulement. Par ailleurs, comme il a été mentionné au début de cet article, la société à son rôle à jouer dans la réinsertion sociale de ces individus, et ce, que ce soit en augmentant notre tolérance, en s’informant ou en jouant un rôle actif auprès d’eux. 


Comment réinsère-t-on ?


      Maintenant que nous savons ce qu’est la réinsertion sociale et ses défis, comment peut-on la favoriser et l’atteindre ? 


      D’abord, le processus de réinsertion sociale débute dès la détention (dans le cas où une peine d’incarcération est octroyée). En effet, les contrevenants peuvent participer à certains programmes correctionnels afin de les préparer à retourner dans la société [20]. Il existe une diversité de programmes (éducation, développement professionnel et travail, consommation de substances, violence, violence sexuelle) [9]. Ces derniers peuvent se poursuivre jusqu’à expiration du mandat du contrevenant. Par ailleurs, dès le début de leur peine, les contrevenants sont soumis à une évaluation qui cible les besoins individuels et les risques de récidive qu’ils représentent. Ainsi, cela permet d’offrir aux contrevenants les programmes qui sont les plus susceptibles de fonctionner et de prévenir leur risque de récidive [4].


      Ensuite, il faut savoir que les processus de libération graduelle aident grandement à favoriser la réinsertion sociale. Par exemple, la libération conditionnelle contribue de façon significative à la réinsertion des individus puisque celle-ci permet de « réduire les effets néfastes d’une libération sans suivi ni contrôle, notamment en matière de récidive » [3]. 


      Par exemple, imaginons un individu qui a purgé une longue peine d’incarcération et qui a perdu tous ses repères sans compter les effets collatéraux que l’incarcération a pu avoir sur lui. Il n’a plus de travail ni foyer, pas de famille et ses amis ne veulent plus le voir.  De plus, il ne connait pas les ressources de son milieu. En effet, il ne faut pas oublier que le retour dans la société en lui-même comporte son lot de problèmes (sociale, économique, personnelle) et peut nuire à un nouveau mode de vie prosocial [13]. Maintenant, imaginons que cette personne soit libérée à la toute fin de son mandat, sans soutien ni encadrement (c’est-à-dire qu’elle n’aura pas bénéficié de libération sous conditions). Cette personne sera fort probablement démunie et risquera de retourner dans ses anciennes habitudes. Ses chances de récidives seront donc plus élevées. D’un autre côté, imaginons une personne qui obtient sa libération conditionnelle. Pendant cette période, celle-ci obtient de l’aide pour se trouver un logement, faire son curriculum vitae et se trouver un emploi (ou retourner aux études). On lui partage également les ressources disponibles dans son quartier tel qu’un organisme de dépannage alimentaire. Par ailleurs, elle a un suivi avec son agent de libération conditionnelle et elle doit participer à un programme pour l’aider avec sa gestion de la colère. Dans ce cas-ci, on donne toutes les chances à la personne de se reprendre en main, tout en s’assurant qu’elle demeure sécuritaire pour la société. Il est fort possible que cet encadrement diminue les risques de récidive.  


      Ensuite, les différentes peines à purger en communauté, telles que le sursis et la probation, peuvent également favoriser la réinsertion sociale puisqu’elle évite de couper les liens entre l’individu et son milieu. D’ailleurs, le mandat du sursis est de punir et de réinsérer (voir l’infographie portant sur les différents types de peine et le sursis). Par ailleurs, les maisons de transition aident également à la réinsertion sociale en offrant un soutien, de l’hébergement et des programmes, et ce, tout en s’assurant de gérer le risque [21]. Les organismes communautaires ont également un rôle important à jouer en offrant différentes ressources [22].


Une crainte justifiée ?


      Il est compréhensible que la population puisse craindre de voir des contrevenants être libérés ou purger une peine en communauté. Pourtant, la science derrière la réinsertion sociale démontre bien son efficacité et prouve qu’elle n’est pas seulement un concept utopique. 


      D’abord, dans une étude, Lalande (2018) mentionne que de nombreuses analyses réalisées sur plusieurs années démontrent que les modèles axés sur la réhabilitation apportent davantage de résultats favorables à la faible récidive contrairement aux sanctions punitives [4].


      Ensuite, une étude sur le taux de réussite des maisons de transition membres de l’ASRQ démontre que celles-ci ont des taux de réussites élevés. Selon l’étude, en moyenne, 71% des résidents avaient effectué leur séjour sans reproche et 91% avaient quitté sans avoir récidivé ou quitté en liberté illégale. Le taux de récidive était également très bas (1,25 %) [23].


      En ce qui a trait aux programmes en détention, une étude du Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations démontre que la participation aux programmes de réinsertion sociale diminue nettement le taux de récidive comparativement à ceux qui n’y participent pas [24]. De plus, une étude réalisée par le Service correctionnel du Québec a démontré qu’en 2010-2011, deux ans après leur sentence, 71 % des ex-contrevenants n’avaient pas été de nouveau condamné [25].


      En lien avec les différentes libérations sous conditions, les taux de récidives sont également prometteurs et démontrent leur réussite. En 2018, la permission de sortie et la libération conditionnelle affichaient respectivement des taux de récidive de 0,1 % et 1,6 %. [26]. Au Canada, au cours des 10 dernières années, le taux d’achèvement des périodes de semi-liberté était d’environ 85 %. Par ailleurs, le taux de récidive avec violence a atteint une moyenne de 0,2 %. En ce qui a trait à la libération conditionnelle, le taux d’achèvement a atteint, au cours des 10 dernières années, une moyenne de 87,8 %.  Quant à lui, le taux de récidive avec violence n’a été que de 0,4 % en moyenne. Enfin, du côté de la libération d’office, le taux d’achèvement était, en moyenne, de 65,7 %. Le taux de révocation pour une infraction avec violence était en moyenne de 1,4 % [27].


      Bien évidemment, il arrive parfois des erreurs, on peut facilement penser au cas de Marylène Lévesque, assassinée par Eustachio Gallese qui se trouvait en semi-liberté. Ce genre de cas est désolant et nous fait réaliser que des atrocités peuvent toujours arriver. Toutefois, il ne faut pas oublier qu’en travaillant avec l’humain, il n’existe aucune science exacte. Il faut également se rappeler que ce genre de cas sont de malheureuses exceptions. Bien sûr, ces exceptions demeurent préoccupantes et ne doivent pas être prise à la légère, mais elles ne doivent surtout pas être généralisées à l’ensemble des individus profitant d’une liberté sous-condition.


Les types de mise en liberté sous condition :


      Comme il a été mentionné précédemment, les différents types de mise en liberté anticipée permettent de faciliter la réintégration des individus dans la société. Voici une explication brève des types de mise en liberté existant au Québec et au Canada.


Au Québec (peine de moins de 2 ans) : [28]


-  La permission de sortir préparatoire à la libération conditionnelle

      Comme son nom l’indique, la permission de sortie préparatoire à la libération conditionnelle sert à préparer le contrevenant à son éventuelle libération conditionnelle. Celle-ci peut être demandée, par écrit (elle n’est pas automatique), au 1/6 de la peine et ne peut excéder une durée de 60 jours. Le contrevenant doit démontrer le sérieux de son entreprise en présentant un plan de sortie. C’est la Commission québécoise des libérations conditionnelles (CQLC) qui étudie ensuite le dossier et décide ou non d’octroyer la libération.


-  La libération conditionnelle

      La libération conditionnelle est probablement le type de libération la plus connue par la population générale. Contrairement à la précédente, le contrevenant est automatiquement convoqué devant la CQLC au 1/3 de sa peine, à moins qu’il n’y renonce par écrit. Une fois en libération conditionnelle, le contrevenant continue à purger sa peine, dans la société, jusqu’à l’expiration de son mandat. 

Pour en savoir plus sur la libération conditionnelle, voir l’article dédié ici.


-  La permission de sortie pour visite à la famille

      Cette dernière s’adresse aux contrevenants qui se sont vu refuser ou révoquer leur libération conditionnelle. Elle permet à ces derniers de pouvoir visiter un membre de leur famille pendant un maximum de 72 heures. La demande doit être faite par écrit et approuvée par la CQLC.


Au Canada (peine de 2 ans et plus) [29] : 


-  Permission de sortir

      La permission de sortir est le premier type de libération dont un contrevenant peut faire la demande. Il en existe deux : avec escorte ou sans escorte. Celles-ci peuvent être demandées pour diverses raisons : médicales, familiales, projets de service communautaire, perfectionnement...


      Pour la permission de sortir avec escorte, le contrevenant peut en faire la demande à n’importe quel moment pendant sa peine. De façon générale, c’est le Service correctionnel canadien qui en fait l’évaluation et qui décide ou non de l’accorder. Toutefois, dans certains cas, la Commission des libérations conditionnelles du Canada peut avoir à donner leur approbation, dans le cas de condamnés à perpétuité, par exemple.


      Pour la permission de sortir sans escorte, le contrevenant peut en faire la demande au 1/6 de sa peine (dans le cas d’une peine de 3 ans et plus) ou doit déjà avoir purgé 6 mois de détention (pour les peines de 2 à 3 ans). Il existe toutefois certaines exceptions. Par exemple, les condamnés à perpétuité y sont admissibles seulement trois ans avant leur admissibilité à la libération conditionnelle tandis que les contrevenants possédant une cote de sécurité maximale ne pourront jamais en bénéficier.


-  Semi-liberté

      La semi-liberté permet au contrevenant de se préparer à sa libération conditionnelle ou à sa libération d’office et donc de prendre part à des activités dans la communauté. Toutefois, la majeure partie du temps, ils doivent tout de même se rapporter le soir à un établissement résidentiel communautaire ou à un foyer de transition. Le contrevent y est admissible 6 mois avant son admissibilité à la libération conditionnelle totale ou six moins après le début de sa peine, selon la période la plus longue.

 

-  Libération conditionnelle totale

      Comme au provincial, la libération conditionnelle totale permet au contrevenant de purger le reste de sa sentence dans la collectivité afin de favoriser sa réinsertion sociale et de bien le préparer au retour dans la société. La plupart du temps, le contrevenant doit d’abord avoir réussi avec succès sa semi-liberté. Le contrevenant devient admissible à la libération conditionnelle totale au 1/3 de sa peine, ou après 7 ans, selon la période la plus courte.


-  Libération d’office

      La libération d’office est le dernier type de libération. Celle-ci découle de la loi et est automatique dans la plus grande majorité des cas. Ainsi, au 2/3 de sa peine, le contrevenant doit être libéré et terminer le dernier tiers de sa peine dans la collectivité, sous surveillance et en devant respecter des conditions, évidemment. Cette dernière permet au contrevenant, avant l’expiration de son mandat, d’obtenir un encadrement et du soutien et d’ainsi, d’augmenter ses chances de bien se réinsérer. 


      Toutefois, les contrevenants purgeant une peine à perpétuité ou d’une de durée indéterminée ne peuvent pas obtenir la libération d’office. Par ailleurs, le SCC peut également demander à ce qu’un contrevenant n’obtienne pas sa libération d’office s’il considère que ce dernier risque, une fois libéré, de commettre une des infractions suivantes : 

-  « une infraction causant la mort ou un dommage grave à une autre personne;

-  une infraction sexuelle à l'égard d'un enfant;

-  une infraction grave en matière de drogue »


* Il est à savoir que ces dernières nécessitent un suivi et des conditions à respecter. De plus, la libération conditionnelle et la libération d’office peuvent être révoquées à tout moment si le contrevenant ne respecte pas ses conditions.


Conclusion


      Enfin, la réinsertion sociale touche plusieurs dimensions de la vie de l’individu. Elle est importante et, bien qu’il puisse être parfois difficile de l’imaginer, elle est un élément essentiel pour assurer la sécurité de tous. Réhabiliter est la meilleure façon de transformer ces individus en citoyen respectueux des lois qui risquent beaucoup moins de commettre un nouveau crime. On ne peut pas emprisonner quelqu’un pour toujours, cela n’aurait pas de sens et nos établissements de détention déborderaient vite, sans compter les coûts faramineux que cela impliquerait. Opposé au modèle axé sur la réhabilitation, on peut, par exemple, penser à l’approche répressive qui vise à donner des peines sévères et limiter les libérations anticipées. Ce type d’approche est très couteux autant sur le plan humain, social et financier. C’est d’ailleurs le cas du système carcéral américain qui incarcère massivement sa population. D’ailleurs, le secteur pénitencier y est devenu une véritable industrie [30]. Bien que la criminalité comporte plusieurs facteurs complexes, aucune étude n’a pu prouver que le durcissement des peines a un effet sur la criminalité [31].


      Enfin, comme nous avons pu le voir, la réinsertion sociale, comporte, certes, des défis évidents, toutefois tous ensemble nous pouvons y arriver. Et comme le dit si bien l’OPCQ : « La réhabilitation sociale des personnes judiciarisées est l’affaire de tous les citoyens‐nes, c’est un enjeu de société et de vivre‐ensemble » [4].


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[9] Dubois, M. È. (2018). La réinsertion sociale: les défis rencontrés à la suite d’une détention fédérale ou provinciale.

[10] Visher, C. A. , LaVigne, N. et Travis, J. (2004). Returning Home : Understanding the Challenges of Prisoner Reentry. Urban Institute Justice Policy Center. Repéré à http://webarchive.urban.org/UploadedPDF/410974_ReturningHome_MD.pdf

[11] Brown, J. D. (2004). Challenges Facing Canadian Federal Offenders Newly Released to the Community. Journal of Offender Rehabilitation, 39(1), 19-35. doi:10.1300/J076v39n01_02

[12] Association des services de réhabilitation sociale du Québec. (2015). Impact du casier judiciaire (Dossier thématique). Repéré à http://asrsq.ca/fr/pdf/dossiers-thematiques/casier- judiciaire.pdf 

[13] Griffiths, C. T., Dandurand, Y. et Murdoch, D. (2007). The Social Reintegration of Offenders and Crime Prevention. National Crime Prevention Centre. Repéré à http://curtgriffiths.com/pdfs/Social%20reintegration.pdf

[14] Laub, J. H. et Sampson, R. J. (1993). Turning Points in the Life Course: Why Change Matters to the Study of Crime. Criminology, 31, 301-326. 

[15] Cid, J. et Martí, J. (2017). Imprisonment, Social Support, and Desistance: A Theoretical Approach to Pathways of Desistance and Persistence for Imprisoned Men. International Journal of Offender Therapy and Comparative Criminology, 61(13), 1433-1454. doi:10.1177/0306624X15623988

[16] Smith, S. et Ferguson, N. (2005). Getting Clean in a Drug Rehabilitation Program in Prison. Journal of Offender Rehabilitation, 42(1), 51-74. doi:10.1300/J076v42n01_03 

[17] Brown, J. D. (2004). Challenges Facing Canadian Federal Offenders Newly Released to the Community. Journal of Offender Rehabilitation, 39(1), 19-35. doi:10.1300/J076v39n01_02

[18] Gunnison, E. et Helfgott, J. B. (2011). Factors That Hinder Offender Reentry Success: A View From Community Corrections Officers. International Journal of Offender Therapy and Comparative Criminology, 55(2), 287-304. doi:10.1177/0306624X09360661 

[19] Duffee, D. E. et Duffee, B. W. (1981). Studying the Needs of Offenders in Prerelease Centers. Journal of Research in Crime and Delinquency, 18(2), 232-253. doi:10.1177/002242788101800203

[20] Motiuk, L. (2001). La réinsertion sociale sans risque des délinquants au moyen de la sélection, l’intervention et la supervision. In Forum (Vol. 13, No. 1, pp. 3-5).

[21] Cuddington, L. & Cherry, S. (2006). Staff Skills and Knowledge: From the Inside Out Working Group Report. Journal of Community Corrections, 15 (3), 9-10. Repéré à http://www.civicresearchinstit...

[22] Ministère de la Sécurité publique. (2014). Les services correctionnels du Québec - Document d’information. Repéré à https://www.securitepublique.gouv.qc.ca/fileadmin/Documents/services_correctionnels /publications/document_information_services_correctionnels.pdf 

[23] Ducharme, A. M. Revue Porte Ouverte La (ré) intégration sociale et communautaire.

https://asrsq.ca/revue-porte-ouverte/reintegration-sociale-communautaire/taux-reussite-maisons-transition-asrsq

[24] Arbour, W., Lacroix, G. et Marchand, S. (2019). Évaluation des interventions axées sur la réinsertion sociale, Rapport de projet, CIRANO.

[25] Ministère de la Sécurité publique. (2018). La récidive / reprise de la clientèle confiée aux Services correctionnels du Québec, cohortes 2010‐2011. Repéré à https://www.securitepublique.gouv.qc.ca/fileadmin/Documents/services_correctionnels/publications/recidive_reprise_clientele_confiee_corr-27.pdf

[26] Alterjustice. (2019). La libération conditionnelle au Québec : le risque de récidive. Repéré à https://www.alterjustice.org/dossiers/statistiques/liberation-conditionnelle-recidive.html

[27] Sécurité publique Canada. (2019). Aperçu statistique : Le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Repéré à https://www.securitepublique.gc.ca/cnt/rsrcs/pblctns/ccrso-2019/index-fr.aspx#d8)

[28] Commission québécoise des libérations conditionnelles. (s.d.). Mesure de remise en liberté sous condition. Repéré à https://www.cqlc.gouv.qc.ca/decisions/mesures-de-mise-en-liberte-sous-condition.html

[29] Gouvernement du Canada. (2018). Les types de mise en liberté sous conditions. Repéré à https://www.canada.ca/fr/commission-liberations-conditionnelles/services/liberation-conditionnelle/les-types-de-mise-en-liberte-sous-condition.html

[30] L'Association des services de réhabilitation sociale du Québec. (2001). Pourquoi dire oui à la réhabilitation et à la réinsertion des contrevenants adultes ? Repéré à https://asrsq.ca/dossiers/articles-et-textes-signes-asrsq/oui-rehabilitation

[31] Alter Justice. (2008). Le durcissement des sentences : Quel impact ?. Repéré à https://www.alterjustice.org/dossiers/articles/0800-durcissement_sentence.html

Rédaction par Molly Bussière

Corrections et vérifications par Audrey Lahaie

LA CYBERCRIMINALITÉ & SES CARACTÉRISTIQUES

      Aujourd’hui, dans une société en constante expansion technologique, il est très souvent question de cybercriminalité. Que signifie ce terme plus précisément ? « La cybercriminalité, ou encore la criminalité informatique, englobe l’usage d’un ordinateur comme instrument à des fins illégales, telles que la fraude, le trafic de pornographie juvénile et de propriété intellectuelle, le vol d’identité ou la violation de la vie privée » [1]. En bref, la cybercriminalité renvoie à tout crime qui est commis à l’aide des technologies informatiques, que ce soit un ordinateur, une tablette ou un téléphone [5]. 


      La question qu’on doit se poser ainsi que comprendre est « pourquoi parlons-nous autant de ce type de criminalité ? ». Le Web et tout ce qui touche à l’Internet se voient, depuis quelques années, vivre une expansion mondiale fulgurante. Avec l’arrivée et le raffinement de l’intelligence artificielle et même du métier « d’influenceur », l’Internet est devenu un incontournable dans le quotidien de nombreuses personnes. 


      L’Internet est devenu un outil inévitable pour certains, mais également une terre propice aux crimes pour d’autres. Tout d’abord, il est important de souligner la présence d’anonymat en ligne, étant l’avantage principal des cybercriminels. Cachées derrière un pseudonyme plus ou moins rigolo, ces personnes se voient leur plus grand souhait réalisé, soit de demeurer incognito derrière leur ordinateur. Ainsi, en créant le profil d’une belle femme de 25 ans en recherche d’amour ou même le profil d’un jeune homme de 16 ans, le cybercriminel est en mesure d’aborder une panoplie de potentielles victimes [2]. 


      Deuxièmement, il est important d’aborder la vulnérabilité des victimes potentielles en ligne. Qu’elles soient mineures ou adultes ou qu’elles soient des entreprises ou même le gouvernement, les cyberdélinquants trouvent les failles à exploiter [2]. Comme on le sait tous, les années 2020 et 2021 ont été marquées par une pandémie mondiale importante qui a apporté des conséquences tant négatives que positives sur l’utilisation d’Internet. D’un côté, travailler de la maison s’avère facile et efficace. En revanche, d’un autre côté, c’est une pratique un peu plus dangereuse pour les individus qui ne savent pas comment se protéger adéquatement des cyberprédateurs en recherche de victimes potentielles. De plus, abordons brièvement l’école à la maison. Des milliers de jeunes ont été forcés de passer l’entièreté de leurs journées devant un écran, et ce, que ce soit pour les études ou en guise de passe-temps. Ces situations sont devenues une nouvelle voie libre aux cybercriminels en recherche de relations avec des mineurs sur les réseaux sociaux [3]. 


      De plus, avec le confinement qui a duré plusieurs mois, l’exploitation sexuelle d’enfants sur Internet a vécu une expansion fulgurante et bien inquiétante. Depuis avril 2020, le Centre canadien de Protection de l’enfance a enregistré une augmentation de 81% des signalements en lien avec des enfants qui ont reçu des messages, des photos ou des vidéos de nature sexuelle provenant d’adultes. Il est alors question d’une moyenne de 300 signalements mensuels, ce qui représente une réelle problématique sociale concernant la protection des jeunes [4]. 


       Troisièmement, l’amélioration constante du Web ainsi que des technologies informatiques représente un feu vert à ce type de délinquant. Les Virtual Private Network (VPN) et les autres outils de sécurité se font de plus en plus performants en ce qui concerne la navigation Web. L’anonymat se trouve donc de plus en plus solide [2]. 


      Ensuite, lorsque l’on aborde la cybercriminalité, il est important de comprendre quels types de crime sont englobé dans ce terme afin de mieux saisir cet enjeu qui prend de plus en plus d’expansion. Voici donc les principaux types de crime sur lesquels les policiers enquêtent en lien avec la cybercriminalité [2]. Il est évident qu’il existe une panoplie de crimes commis en ligne qui ne se retrouvent pas dans ce tableau. En revanche, voici les principaux cybercrimes qui existent à ce jour : 


Crimes contre la personne :   
• Leurre

• Pornographie juvénile 

• Harcèlement 

• Extorsion

• Menaces 

• Faux messages 

• Propagande haineuse 

• Intimidation 

• Libelle diffamatoire 

• Incitation au suicide


Crime contre la propriété :   

• Fraude 

• Usage non autorisé d’un ordinateur 

• Virus informatique 

• Vol d’identité 


      Comme mentionné plus haut, divers crimes non mentionnés dans ce tableau peuvent survenir dans le monde informatique. Quelques-uns seront expliqués plus bas. 


      Tout d’abord, une attaque très populaire, surtout au niveau des entreprises ou des fonctions gouvernementales, se trouve à être le rançongiciel. Le rançongiciel est un « type de logiciel malveillant qui crypte les données de l’utilisateur qui est ensuite sommé de verser une rançon pour les récupérer » [5]. 


      Par la suite, tout le monde a déjà reçu un courriel, un appel ou un message texte douteux provenant d’une banque dont il n’est même pas membre ou provenant de divers comptes (p. ex., Netflix, PayPal, etc.). En effet, ce type d’attaque se nomme « hameçonnage» et est plus précisément une escroquerie par message texte ou par courriel. Il s’agit d’un escroc qui se fait passer pour une personne connue ou une compagnie dont les services sont utilisés (p. ex., un fournisseur de téléphone ou une institution bancaire) pour demander ou proposer une mise à jour des méthodes de paiement. Ainsi, l’utilisateur tente de se connecter avec son mot de passe qui est ensuite volé et utilisé pour retirer des fonds ou pirater le téléphone ou l’ordinateur en question [5]. 


      Ensuite, une autre attaque très présente sur le Web est l’arnaque amoureuse, ou encore la fraude sentimentale. Cette technique consiste en une stratégie où le fraudeur entre en contact avec les victimes potentielles par l’entremise de divers médias sociaux ou de sites de rencontre. En tentant de nouer une relation dite amoureuse avec la personne, le fraudeur n’a en réalité qu’un but ultime, soit de soutirer le plus d’argent possible en utilisant les sentiments que la victime aura développés à son égard [6]. Selon une recherche du Centre antifraude du Canada, ce type de fraude constitue la cyberattaque qui a entraîné les pertes financières les plus importantes auprès des victimes en 2020. Durant cette année-là, le Centre antifraude du Canada a enregistré 899 plaintes en lien avec ce type de fraude pour un total de 18,5 millions de dollars qui ont été volés [6]. En somme, il est important de ne jamais divulguer les informations bancaires à qui que ce soit et il demeure aussi primordial de ne jamais envoyer d’argent à une personne rencontrée sur Internet [6]. 


      Comprendre l’étendue de la cybercriminalité et toutes ses conséquences est une chose, mais s’en protéger en est tout une autre. Tout d’abord, il est important de se sentir en sécurité dans cet univers virtuel. De plus, utiliser des logiciels ou différentes techniques pour se protéger en ligne est primordial dans la société d’aujourd’hui (p. ex., utiliser un VPN lorsqu’on navigue sur le Web, utiliser des mots de passe robustes et ne pas utiliser les mêmes partout, etc.). Le site Internet du Service de police de la ville de Montréal (SPVM) a mis en ligne quelques conseils pratiques pour faire de la prévention, et ce, surtout auprès des jeunes [2]. 


      En voici des exemples [2] :

  

 ⇨ « Quittez l'environnement en ligne lorsque la situation devient problématique (p. ex. : réception d'un courriel menaçant) et prévenez un adulte de confiance

 ⇨ Ne divulguez jamais de renseignements personnels : nom, âge, adresse, numéro de téléphone, mots de passe, etc.

 ⇨ Éviter d'échanger avec l'intimidateur, ne pas répondre aux messages intimidants

 ⇨ Prévenir le fournisseur de services Internet ou de téléphonie cellulaire, selon le cas

 ⇨ Alerter le service de police local lorsqu'il y a soupçon d'une infraction criminelle »


« Attention à vos amis virtuels » :

• Limitez la distribution de votre liste de contacts à vos amis

• Attention aux discussions avec des inconnus

• N’acceptez pas de leur part des cadeaux ou des sommes d'argent 

• Évitez de rencontrer une personne dont vous avez fait la connaissance en ligne »


  

B i b l i o g r a p h i e 

.  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .


1. Dannis M. A. (2019). Cybercrime. Britannica. https://www.britannica.com/topic/cybercrime/Identity-theft-and-invasion-of-privacy


2. SPVM. (2021). Cybercriminalité. https://spvm.qc.ca/fr/Jeunesse/Cybercriminalite


3. Charron, C. (2021). La pandémie a fait grimper l’utilisation d’Internet au Québec. Les affaires. https://www.lesaffaires.com/dossier/focus-regional-abitibi-temiscamingue/la-pandemie-a-fait-grimper-lutilisation-dinternet-au-quebec/626307


4. Duchaine, G. (2020). Les cas explosent. La presse. https://www.lapresse.ca/actualites/enquetes/2020-10-23/exploitation-sexuelle-d-enfants-sur-l-internet/les-cas-explosent.php


5. Gendarmerie Royale du Canada. (2021). Définition de la cybercriminalité. https://www.rcmp-grc.gc.ca/fr/definition-cybercriminalite


6. Réseau FADOC. La fraude sentimentale : quand l’amour coûte cher. https://www.fadoq.ca/reseau/ressources/maltraitance-fraude-et-intimidation/la-fraude-sentimentale-quand-lamour-coute-cher

Article rédigé par Bianca Meszaros

Corrections & vérifications réalisées par Molly Bussière

Leurre informatique Computer lure

LEURRE INFORMATIQUE : une problématique grandissante

      Que ce soit pour étudier, pour effectuer des travaux ou pour s’amuser, les jeunes passent de plus en plus de temps devant leurs écrans d’ordinateur, de téléphone et/ou de tablette électronique. Malheureusement, ces technologies constituent un univers attrayant pour les délinquants sexuels qui peuvent y trouver des victimes vulnérables, et ce, tout en demeurant anonymes. Le leurre informatique est une problématique qui augmente à une vitesse fulgurante depuis quelques années. D’ailleurs, la pandémie mondiale actuelle de Covid-19 a, elle aussi, contribué à augmenter considérablement la prévalence de ce phénomène social. 


      Avant de s’attarder sur les divers enjeux découlant de cette problématique, il est important de bien comprendre la définition du leurre informatique : 

      « Le leurre par Internet est une infraction commise par une personne (souvent adulte, mais pas nécessairement) qui utilise un moyen technologique (texto, messagerie instantanée, courriel, etc.) pour communiquer avec une jeune personne dans le but de commettre plus facilement une infraction sexuelle contre cette jeune personne » [1]. 


      Cette infraction peut se manifester sous la forme d’une demande ou d’une suggestion envers les mineurs dans le but de produire, de transmettre ou de partager des photos ou des vidéos à caractère sexuel [1]. 


      Il devient intéressant de visualiser quelques statistiques en lien avec cette problématique qui survient auprès des jeunes et des adolescents. Comme il a été mentionné précédemment, la pandémie a grandement contribué à accroître la prévalence de ce phénomène social. Ainsi, « le nombre d’infractions de leurre d’enfant au moyen d’un ordinateur a augmenté de 244 cas, soit une hausse de 15% par rapport à 2019. De plus, il s’agit d’une augmentation de 37% des infractions par rapport à la moyenne des cinq années précédentes » [4]. 

  

      Selon la théorie des activités routinières introduite par Cohen et Felson (1978) [6], il est admis que pour qu’un crime survienne, trois facteurs doivent être présents simultanément. Il s’agit de facteurs auxquels le leurre informatique n’échappe pas et ces derniers seront expliqués ci-bas. Il est important de préciser que ces trois éléments sont fondamentaux et donc nécessaires à la compréhension du passage à l’acte :


      1. Tout d’abord, il y a une nécessité d’avoir des délinquants assez motivés pour passer à l’acte et pour qui le calcul coût-bénéfice a été bien étudié. Pour ce type de délinquant, le coût est moindre par rapport aux bénéfices, d’où la motivation à commettre un acte criminel. De plus, dans le cas du leurre informatique, il est très difficile d’identifier les prédateurs en ligne, car ceux-ci ne se distinguent pas par une étiquette unidimensionnelle ou spécifique. En effet, il peut autant s’agir d’un jeune étudiant de niveau universitaire, d’un père de famille, d’un homme d’affaires, que d’une femme qui agit comme intermédiaire ou même d’une personne d’influence ou hautement placée [5]. Pour ce type de délinquants, la pornographie juvénile et l’exhibitionnisme jouent un rôle important dans les crimes sexuels perpétrés en ligne. Ces derniers sont souvent utilisés pour rationaliser et banaliser le passage à l’acte, et ultimement, afin de diminuer les possibles inhibitions des victimes potentielles [5]. 


      2. Par la suite, il y a la présence des cibles intéressantes. Dans les faits, une cible intéressante se trouve à être une personne dite vulnérable à cause de ses caractéristiques personnelles, relationnelles, économiques, etc. Dans un monde où la plateforme Web devient de plus en plus performante et complexe, l’hypersexualisation a pris une expansion fulgurante. Ainsi, de nombreuses jeunes femmes et jeunes hommes veulent s’identifier à des « influenceurs » en faisant un usage démesuré des réseaux sociaux. De ce fait, les différentes activités en ligne (p. ex., accepter des amis inconnus dans sa liste d’amis, clavarder avec des inconnus, envoyer des photos à des personnes inconnues, etc.) peuvent augmenter les chances de devenir une victime de leurre informatique [5]. 


      3. Finalement, le dernier facteur est l’absence de « gardiens efficaces ». Le concept de gardien efficace fait référence à une personne qui est bien placée pour protéger et sensibiliser les jeunes et les adolescents aux risques présents en ligne. En ce sens, il peut notamment s'agir des proches des victimes potentielles qui peuvent les aider à dénoncer et à parler de leurs expériences vécues sur Internet. Plus précisément, ces gardiens peuvent être des membres de la famille, des voisins, des amis, des connaissances, des figures d’autorité et ainsi de suite [5]. 

  

      En premier lieu, la motivation du délinquant a été le premier facteur abordé dans le présent article. De ce fait, il est primordial de comprendre l’origine de cette motivation qui incite les cyberprédateurs à rester derrière leurs écrans d’ordinateur et à commettre ce type de crime. Un seul mot : l’anonymat. En effet, tout en restant dans le confort de leur bureau à discuter avec des mineurs, ces cyberprédateurs se cachent derrière divers pseudonymes. Ainsi, les jeunes et les adolescents n’ont aucune idée d’avec qui ils discutent dans leurs temps libres. Que ce soit un nouvel ami, une nouvelle connaissance, une nouvelle flamme, ou encore dans un contexte de recrutement pour une agence de jeunes mannequins, ces prédateurs restent longtemps dans l’anonymat à profiter de la naïveté des jeunes enfants et des adolescents. Autrement dit, après avoir réalisé une analyse coût-bénéfice, ces cyberprédateurs se rattachent généralement à l’idée que les bénéfices découlant d’un passage à l’acte seraient plus intéressants que les coûts y étant liés, et ce, grâce à cette protection offerte par l’anonymat d'Internet [2]. 


      « La particularité d’Internet est de permettre cette possibilité de se cacher sous de faux profils en utilisant un autre sexe, un autre âge ou un faux prétexte » [2].

  

      Nous avons également abordé plus haut la présence d’une cible vulnérable comme étant un critère prédicteur d’un passage à l’acte. Dans le cas du leurre informatique, ces cibles dites vulnérables sont évidemment les jeunes et les adolescents. Ainsi, une question se pose : pourquoi les jeunes et les adolescents sont-ils grandement touchés par ce type de crime en particulier? L’explication est bien simple : les jeunes sont plus vulnérables et aussi plus susceptibles de devenir des victimes de ce type de crime, et ce, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, ces derniers démontrent moins de retenue dans leurs communications et échanges ayant lieu sur Internet. De plus, ils n’ont pas nécessairement le niveau de maturité nécessaire pour se mesurer à ce type de phénomène ou encore, pour se questionner adéquatement sur la provenance de ce type de messages suspects. De surcroît, les jeunes ne sont généralement pas assez prudents ni suffisamment réticents envers ce genre de contacts, ne croyant donc pas que la personne de l’autre côté de l’écran puisse avoir de mauvaises intentions à leur égard. Enfin, il est important de comprendre que durant l’adolescence, les adultes en devenir vivent une recherche de soi et sont souvent avides d’attention. Ils ont également une grande volonté d’interagir avec les autres et cela les rend encore plus vulnérables aux cybercrimes, tout particulièrement au leurre informatique [1]. 

  

      Dans un autre ordre d’idées, pour être en mesure de condamner une personne de ce type de crime, le Tribunal doit être convaincu, hors de tout doute raisonnable, de trois critères spécifiques. D'abord, l’auteur du délit doit croire ou penser qu’il parle à une personne âgée de moins de 18 ans. Ensuite, l’intention de faciliter la perpétration d’une infraction de nature sexuelle doit être un élément constitutif de l’infraction. Finalement, il est important de prouver l’utilisation d’un moyen de télécommunication lors du passage à l’acte [3]. 


      Pour terminer, il est important en tant qu’adulte de surveiller les jeunes autour de nous. Il devient encore plus important de les sensibiliser à ce type de délit qui est de plus en plus présent au sein de nos sociétés technologiques. Écouter les jeunes et les aider à traverser les différentes étapes de dénonciation est la meilleure arme contre les cyberprédateurs. De plus, en ce qui concerne les jeunes et les adolescents, il est important de comprendre que ces derniers se mettent à risque en acceptant des personnes inconnues dans leurs listes d’amis, en clavardant avec des personnes qu’ils ne connaissent pas et surtout, en envoyant différents types de photos ou de vidéos sur les réseaux sociaux. 


  

Bibliographie

_________________


1. Centre canadien de protection de l’enfance. (2017). Leurre par Internet. https://www.cyberaide.ca/pdfs/C3P_SafetySheet_OnlineLuring_fr.pdf 


2. Quirion, R.-C. (2020). Hausse de signalements de leurre informatique d’enfants. La Tribune. https://www.latribune.ca/2020/05/06/hausse-des-signalements-de-leurre-informatique-denfants-d3d0bc8369e26fb6d6e655842817ea14


3.  Morasse Avocats. (2021). Le leurre d’enfant. https://criminalistes.com/avocat-criminel/leurre-mineur/


4.  Centre canadien de protection de l’enfance. (2021). De nouvelles données de Statistique Canada montrent une augmentation des infractions sexuelles contre des enfants pendant la pandémie. https://www.protectchildren.ca/fr/zone-medias/communiques/2021/nouvelles-donnees-statistique-canada-pandemie


5. Fortin, F. et Lanthier, V. (2013). Leurre informatique: auteurs, victimes et environnement technologique. Dans F. Fortin (dir.), Cybercriminalité: Entre inconduite et crime organisé. Montréal: Presses internationales polytechnique.


6. Cohen, L. E., & Felson, M. (1979). Social change and crime rate trends: A routine activity approach. American sociological review, 588-608.

Article rédigé par Bianca Meszaros

Corrections & vérifications réalisées par Molly Bussière & Audrey-Maude Légaré

NON-RESPONSABILITÉ CRIMINELLE POUR CAUSE DE TROUBLES MENTAUX

      Dans un procès en droit criminel, la décision finale peut être de diverses natures. Le verdict de culpabilité, l’acquittement, l’arrêt des procédures, l’absolution, le rejet des accusations en sont de parfaits exemples [1]. Parmi ces autres décisions, figure la non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux qui est probablement la moins bien comprise. En effet, il n’est pas rare que les médias, dans les cas se soldant par ce verdict, ne se concentrent que sur les crimes les plus graves. Nous pouvons penser ici à Guy Turcotte ou Luka Rocca Magnotta, bien que pour ces deux cas la défense fut soulevée, mais refusée. En réalité, les infractions graves et violentes ne représentent que 8% des cas [2], la majorité des cas étant donc des crimes mineurs. Cette publication vise alors à expliquer en quoi ce verdict consiste, ainsi que ses applications, pour en faciliter sa compréhension. 


      Qu’est-ce que la non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux ?  Tout d’abord, il importe de définir ce qu’est la non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux (NRCTM). Dans les cas où ce verdict est rendu, l’accusé n’est ni acquitté ni reconnu coupable. Cela survient lorsque le juge ou le jury en viennent à la conclusion qu’au moment où l’accusé commettait l’infraction, il était atteint de troubles mentaux graves ne permettant pas de reconnaître sa responsabilité criminelle [3]. Cela peut aussi survenir dans les cas où l’accusé se voit inapte à subir son procès pour la même raison [3].  


      Qu’est-ce que l’inaptitude à subir son procès ?  Il s’agit, selon le Code criminel, de l’inaptitude de l’accusé, en raison de troubles mentaux, d’assumer sa défense ou de donner des instructions à son avocat avant que le verdict ne soit rendu [4]. Au niveau de l’incapacité, celle-ci fait référence au fait de ne pas être en mesure de comprendre la nature ou l’objet des poursuites, de comprendre les conséquences éventuelles des poursuites et de communiquer avec son avocat [4]. Cela repose sur le principe que l’accusé a droit à un procès équitable [4]. Ainsi, s’il ne peut pas participer au procès ou ne peut assurer sa défense, le procès ne peut, en aucun cas, être équitable pour ce dernier. C’est pourquoi, lorsque l’accusé ne semble pas comprendre l’essentiel du procès, il peut être déclaré inapte. Dans ce cas, la compétence est transférée à la commission d’examen des troubles mentaux. Le but étant de rendre la personne apte à subir son procès, l’accusé peut être détenu dans un hôpital ou bien être remis en liberté sous certaines conditions [4]. Dans certains cas précis, le juge ou la commission d’examen peuvent ordonner à l’accusé de suivre un traitement pour qu’il devienne apte à être jugé, mais sous des modalités précises : le traitement 1) ne peut durer plus de 60 jours, 2) ne peut pas causer plus de tort que de bien à l’accusé et 3) doit avoir de bonnes chances de rendre l’accusé apte [5]. Lorsque l’accusé est déclaré inapte et qu’il se retrouve, soit en libération conditionnelle ou en détention, son niveau d’inaptitude doit être évalué à nouveau dans les 45 jours suivants. Après 90 jours, si la personne n’est toujours pas apte à subir son procès, une audience d’évaluation et de décision devant la commission d’examen doit avoir lieu [6]. Si à la suite de cette évaluation, la personne concernée est devenue apte à subir son procès, la commission d’examen ordonne son retour devant le tribunal [7]. Dans le cas contraire, une évaluation doit se faire obligatoirement tous les ans afin de déterminer si la personne est devenue apte à subir son procès [8]. Ainsi, l’accusé est détenu ou bien placé en libération conditionnelle, et ce, jusqu’à ce qu’il soit apte à subir son procès, ou encore, advenant le cas où la Couronne n'est plus en mesure de produire une preuve prima facie [9], puisque la preuve peut ultimement changer avec le temps (particulièrement dans le cas où la preuve repose sur un témoignage).  


      Dans quels cas ce verdict de NRCTM est-il rendu ?  Comme il a été mentionné précédemment, la personne accusée doit être atteinte de troubles mentaux sévères, mais il n’importe pas que cela. Ce trouble mental doit, au moment des faits, avoir rendu le jugement de la nature et de la qualité des actes impossible ou encore, avoir empêché l'individu de différencier le bien du mal (c.-à-d., être conscient que les gestes commis sont mauvais) [10]. Cela peut également survenir lorsque le contrevenant est déclaré inapte à subir son procès en raison, encore une fois, de troubles mentaux [11]. La non-responsabilité pour cause de troubles mentaux repose sur un principe du système de justice pénale au Canada qui spécifie qu’au moment de commettre l’acte criminel, la personne doit comprendre que son comportement est fautif pour être reconnu coupable de cet acte [12]. Dans le cas décrit précédemment, où l’accusé n’est pas en mesure de juger son acte comme étant préjudiciable, ce principe n’est logiquement pas respecté. C’est pour cette raison que l'accusé se doit d'être reconnu non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux. 


      Que se passe-t-il dans les cas où ce verdict est rendu ?  Lorsqu'un verdict est rendu par le tribunal, la commission d’examen ou le tribunal peut rendre trois décisions distinctes [13]. Tout d’abord, il y a possibilité d'une libération inconditionnelle. L’accusé sera donc libéré et ne fera pas face à d’autres restrictions ou conséquences. Cette décision survient seulement lorsque le juge est convaincu que l’accusé ne représente pas une menace pour la société. Cette menace se définit par un risque de dommages physiques ou psychologiques graves envers la communauté [13]. Ensuite, il y a la libération sous réserve. L’accusé est donc libéré sous conditions et il vit dans la communauté, mais les conditions permettent de diminuer les risques qu’il pourrait représenter. Finalement, une dernière possibilité est la détention au sein d'un hôpital. Cette décision est rendue lorsque l’accusé représente un risque important. Il est donc détenu dans des conditions qui aident à rétablir ou améliorer son état mental [13]. La décision prend aussi en compte le niveau de sécurité qui doit être accordé à l’accusé, en lien avec le risque qu’il présente [14]. La décision est rendue d’abord dans le but de protéger le public, mais elle doit aussi être la moins sévère et la moins privative de liberté que possible pour l’accusé [15]. En effet, celle-ci vise la réinsertion, lui permettant ainsi d’être traité et suivi par des professionnels.  En ce sens, si la détention n’est pas nécessaire, ce ne sera pas cette décision qui sera rendue. De plus, cette décision est réévaluée régulièrement. S’il ne s’agit pas d’une libération inconditionnelle (sans condition), la décision est réévaluée tous les douze mois. Cette évaluation consiste à évaluer et statuer sur l’état mental de l’accusé. Dans plusieurs cas, l’accusé peut se rétablir et sera finalement admissible à une libération inconditionnelle. Pour d’autres, ce ne sera pas le cas et ils resteront sous la surveillance de la commission d’examen des troubles mentaux.  


      À quoi ressemble la prévalence des décisions rendues ? Plusieurs mythes résident dans le fait que la NRCTM serait une stratégie que plusieurs accusés utilisent pour s'éviter des peines qui pourraient leur être imposées dans le cas d’un verdict de culpabilité. Pourtant, selon une étude de Statistiques Canada, moins de 1% des accusés, entre 2005 et 2012, ont été déclarés non criminellement responsables pour cause de troubles mentaux [16]. Il semble important de préciser que cette statistique est celle du Québec, une province reconnue pour avoir plus souvent recours que les autres provinces canadiennes à ce type de verdict. Par exemple, cette statistique se situe à 0,107% en Ontario et à 0,08% des causes en Colombie-Britannique [17]. À la lumière de ce qui précède, les données officielles permettent de déconstruire rapidement les mythes existants à l'endroit de ce type de verdict. De plus, selon les croyances populaires, les personnes étant déclarées NRCTM ont, pour la majorité, été accusées pour des crimes graves. Pourtant, comme il a été mentionné au début de l’article, ce n’est que 8% des cas qui correspondent à des infractions graves et violentes [2]. Par exemple, dans la population jugée non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux, 2,6% ont commis un homicide, 3,3%, ont commis une tentative de meurtre, alors que 2,1% ont perpétré un délit sexuel [2]. Ainsi, la croyance populaire selon laquelle il s'agit généralement de personnes ayant commis des meurtres s’avère fausse. 


       Avec ce survol, il est possible de comprendre que bien qu'un tel verdict suscite des réactions négatives au sein de la population, il est plutôt utilisé dans le but de protéger cette dernière. Cela se fait notamment par l'intermédiaire d'une détention ou d'une libération conditionnelle, tenant en compte la situation des individus concernés et leur permettant une réinsertion sociale réussie.  


   R é f é r e n c e s   


[1] https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/85-002-x/2018001/article/54900-fra.htm


[2] https://www.mentalhealthcommission.ca/wp-content/uploads/drupal/MHLaw_NCRMD_Fact_Sheet_FINAL_FRE_0_0_0.pdf


[3] https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/85-002-x/2014001/article/14085-fra.htm


[4] https://www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/jp-cj/jj-yj/rr03_jj6-rr03_yj6/p2.html


[5] https://educaloi.qc.ca/capsules/personne-accusee-crime-atteinte-trouble-sante-mentale/


[6] https://novascotia.ca/just/ccrb/ccrb_overview-fr.asp


[7] https://www.taq.gouv.qc.ca/fr/sante-mentale/commission-d-examen-des-troubles-mentaux/role


[8] https://www.taq.gouv.qc.ca/fr/sante-mentale/commission-d-examen-des-troubles-mentaux/revision-des-decisions


[9] https://www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/jp-cj/jj-yj/rr03_jj6-rr03_yj6/p2.html


[10] https://www.erudit.org/en/journals/crimino/2015-v48-n1-crimino01787/1029347ar.pdf


[11] https://www-lareference-editionsyvonblais-com.acces.bibl.ulaval.ca/maf/app/document?&src=rl&srguid=i0ad6adc60000017d0ca745b865f4cfcc&docguid=m06DE5C884FD15DA238139D92C40009FD&hitguid=m06DE5C884FD15DA238139D92C40009FD&spos=2&epos=2&td=2&crumb-action=append&context=26&&showSnippets=true


[12] https://www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/sjc-csj/sjp-jsp/rr06_1/p1.html


[13] https://educaloi.qc.ca/capsules/non-criminellement-responsable-troubles-mentaux/


[14] https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/85-002-x/2014001/article/14085-fra.htm


[15] https://www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/sjc-csj/sjp-jsp/rr06_1/p1.html 


[16] https://educaloi.qc.ca/capsules/non-criminellement-responsable-troubles-mentaux/#:~:text=D'apr%C3%A8s%20une%20%C3%A9tude%20de,en%20raison%20de%20troubles%20mentaux. 


[17] https://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1177/070674371506000304


[18] Martin, Sandrine (2019). Non responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux : Comparaison des pratiques de supervision des Commissions d’examen aux peines prononcées dans le système pénal, Mémoire. https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/bitstream/handle/1866/23719/Martin_Sandrine_2019_memoire.pdf?sequence=2&isAllowed=y

Article rédigé par Ariane Pelchat

Corrections & vérifications réalisées par Audrey-Maude Légaré & Molly Bussière

CRIMINALITÉ & SANTÉ MENTALE

« Les schizophrènes sont dangereux ! » 


« Les personnes présentant un trouble de santé mentale ont plus de risque de commettre un crime violent ! »


      Il n’est pas rare d’entendre ce genre de discours au sein de la population. Il faut également dire que les médias et le monde cinématographique contribuent à entretenir ce genre de préjugés. Pourtant, ces propos sont totalement faux et font en sorte de perpétuer ces mythes et entretenir la stigmatisation envers les personnes présentant un trouble de santé mentale (TSM). L’article qui suit a donc pour objectifs de démystifier le « lien » qui semble exister entre TSM et criminalité et d’en expliquer les raisons sous-jacentes.


TSM, qu’est-ce qu’on entend par là ?


      « Le trouble mental est un état de santé qui se définit par des changements qui affectent la pensée, l’humeur ou le comportement d’une personne, ce qui perturbe son fonctionnement et lui entraine de la détresse. » [1]


      « Près de 20 % de la population du Québec, soit une personne sur cinq, sera affectée par un trouble mental au cours de sa vie. Selon l’Institut national de santé publique du Québec, moins de la moitié des personnes qui sont affectées par un trouble mental consultent un professionnel. » [1]


La réalité : Surreprésentation des personnes présentant un TSM dans le système de justice


      Bien qu’ils ne sont présents que chez une petite partie de la population générale, certains troubles sont surreprésentés au sein du système carcéral. Par exemple, ne représentant que 1,7 % de la population générale, les personnes présentant un trouble schizophrénique constituent 6,7 % de la population des prisons québécoises et 7,5 % de la population des pénitenciers canadiens [5].

 

      Dans le même ordre d’idée, voici quelques chiffres montrant la prévalence d’autres troubles de santé mentale au sein des prisons québécoises comparativement à leur prévalence au sein de la population générale [8] : 


 -Trouble bipolaire : 2 % vs 0,7%

 -Dépression majeure : 18 % vs 6 %

 -Troubles anxieux : 18 % vs 9 %

 -Trouble substance : 76 % vs 33 %


      Ainsi, ces chiffres démontrent clairement qu’il existe une surreprésentation de personnes présentant un TSM au sein du milieu carcéral.  De plus, selon une étude, il semblerait que 70 % de la population carcérale masculine canadienne répond aux critères diagnostiques d’au moins un trouble mental [12]. Mais pourquoi ? Est-ce que cela implique une réelle corrélation entre TSM et criminalité ?


Lien entre TSM et violence : Ce qu’en disent les études


      D’abord en ce qui a trait aux nombreuses études réalisées en lien avec le sujet, il subsiste encore aujourd’hui une absence de consensus. Cette dernière s’explique notamment par des biais méthodologiques tels que l’échantillonnage, les types d’étude et le type de violence observé. Toutefois, plusieurs études s’entendent tout de même pour dire que, malgré un risque de violence plus élevé chez les individus présentant un TSM grave, le nombre absolu d’agressions demeurerait faible. En fait, 85 % à 97 % des agressions ne seraient pas commises par des individus atteints d’un trouble mental [2]. 


      Toutefois, au premier regard, certaines statistiques peuvent engendrer des doutes. En guise d’exemple, selon une étude, les personnes souffrant de schizophrénie seraient 10 fois plus nombreuses parmi les auteurs de meurtres [13a]. De surcroît, selon les résultats d’une étude longitudinale menée sur une cohorte de 12 000 sujets pendant une période de 25 ans, seulement 2 % des individus ne présentant pas de TSM sévère auraient commis un délit violent tandis que 13 % des personnes ayant un TSM sévère en auraient commis un [13b]. Comment expliquer ces résultats ? Cela nous amène à nous questionner sur les statistiques en elles-mêmes. 


Des statistiques trompeuses


      Il faut d’abord établir le fait que les troubles mentaux sévères à eux seuls ne sont ni une cause suffisante, ni une cause nécessaire à la violence. En réalité, ce semblant d’association entre criminalité/violence et TSM peut s’expliquer par la présence élevée d’autres facteurs individuels criminogènes concomitants au TSM. En plus du TSM, on peut notamment trouver un trouble de la personnalité antisociale qui est marqué par un manque d’empathie et une moindre gestion de l’impulsivité, des problèmes de consommation de substances et des situations de victimisation antérieures. De surcroît, il ne faut pas oublier que certaines personnes présentant un TSM peuvent vivre dans des endroits démunis et avoir des modes de vie les rendant plus vulnérables [11]. C’est plutôt l’association entre ces différents facteurs qui amène l’individu à user de violence ou à commettre un crime et non le TSM en lui-même.  


      Par ailleurs, les personnes présentant un TSM partagent également les mêmes facteurs de risque liés à la violence que la population générale soit l’âge, le sexe, le statut socioéconomique (pauvreté, milieu défavorisé, être sans emploi), le quartier de résidence, les abus/dépendance à l’alcool et aux drogues ainsi que les antécédents de violence [9].


Le rôle des médias et la démystification de certains mythes


      Comme il a été mentionné plus haut, les médias ont leur rôle à jouer en ce qui a trait à la propagation de mythes concernant le lien entre TSM et criminalité ainsi que dans la peur qu’ils engendrent [3]. Par exemple, la crainte que le public peut entretenir vis-à-vis le fait d’être attaqué en pleine rue par une personne présentant un TSM ne s’appuie pas sur des données probantes. Il faut savoir que les victimes d’agression d’une personne atteinte d’un TSM sont principalement les membres de la famille (51 %), une connaissance ou un ami (35 %) et plus rarement un inconnu (14 %). De plus, le 2/3 des agressions surviennent à l’intérieur d’une résidence privée. Par ailleurs, dans la majorité des cas, il n’y a aucune préméditation à l’acte. En effet, la violence survient plutôt au gré du quotidien ou d’une rencontre. Ce ne serait que dans 13 % des cas qu’il y aurait une réelle préméditation et une recherche de victime. Enfin, les symptômes psychotiques actifs seraient présents dans moins de 10 % des cas d’agression [2].

 

      Mais comment les médias entretiennent-ils ces mythes ? Selon une étude, 40 % des articles de journaux parlant du sujet de TSM abordaient également les thèmes de la violence, du danger ou de la criminalité [4].  Cela est totalement disproportionné considérant le nombre réel de personnes présentant un TSM qui commettent des délits. Selon une autre étude, les trois thèmes les plus fréquemment utilisés dans un échantillon de 10 000 articles de journaux canadiens abordant les troubles mentaux étaient « danger », « violence » et « criminalité »[14]. 


      Il ne faut pas oublier le milieu cinématographique qui nous présente des films qui dépeignent les TSM de façon violence tels que Split, Psycho et Vol au-dessus d’un nid de coucou, pour ne nommer qu’eux. Considérant tout cela, il n’est pas surprenant que la population générale établisse un lien entre TSM et criminalité.


Les causes systémiques 


      La surreprésentation des personnes présentant un TSM au sein du milieu carcéral peut s’expliquer par plusieurs raisons, mais attardons-nous d’abord sur les causes systémiques. 

D’abord, dès 1960, le Québec a pu constater différentes vagues de désinstitutionnalisation au sein du système de santé en raison de changements législatifs. Ces dernières avaient pour but de 1) humaniser les soins 2) améliorer l’accès aux services dans la communauté et 3) respecter et affirmer les droits des personnes qui ont recours aux services[10]. 


      La désinstitutionnalisation se décompose sous trois formes soit la déshospitalisation (c.-à-d., sortir des milieux psychiatriques les personnes qui présentent des TSM), la non-institutionnalisation (c.-à-d., éviter le recours à l’hospitalisation le plus possible pour le traitement) et la réorganisation des soins (c.-à-d., déployer des services afin de faciliter la réintégration de ces individus au sein de la société). Malgré les effets positifs qu’elle a pu engendrer tels que la démystification de la maladie mentale, une approche plus humaine du traitement et la diminution des séjours à l’hôpital, celle-ci a également eu des revers importants. Parmi ces derniers on retrouve la montée de l’itinérance, la judiciarisation des usagers, l’alourdissement du fardeau des familles et l’apparition du syndrome de la porte tournante [10].


Le syndrome de la porte tournante


      En psychiatrie, le syndrome de la porte tournante se traduit par le retour du patient à l’hôpital après une période de rémission. Ce syndrome est un grave problème au sein du milieu psychiatrique puisqu’il peut engendrer un sentiment d’impuissance auprès des intervenants. Par ailleurs, il ferait également en sorte d’engendrer un sentiment d’échec auprès des patients. Après plusieurs allers-retours entre l’hôpital et l’extérieur, il semblerait que la famille du patient ait tendance à ne plus donner son soutien[10]. 


      Par ailleurs, on peut également observer ce même syndrome au sein du système de justice. Celui-ci se traduirait par un retour en Cour après une période de désistement. Ainsi, il est même possible de parler d’une double porte tournante chez les personnes atteintes d’un TSM.


Le traitement pénal différentiel


Le traitement pénal différentiel des personnes présentant un TSM peut également expliquer la plus grande proportion de ces individus au sein du système carcéral. On remarque qu’ils ont plus de chance d’être arrêtés et de cheminer dans le système de justice pénale et ainsi de passer à l’étape suivante. On parle également de la cristallisation de la réponse pénale, c’est-à-dire qu’après une arrestation, ces individus présentent 80 % plus de chance que la prochaine réponse soit également d’origine policière. Cela implique qu’une personne traitée comme un criminel continuera à se faire traiter comme tel dans le futur. On parle donc de la cristallisation de l’étiquette que l’on impose à ces individus qui auraient pourtant besoin d’une réponse psychosociale plutôt que répressive[15]. 


      L’arrestation. Une étude a constaté que « les interventions impliquant des personnes atteintes de maladie mentale étaient plus susceptibles de conduire à une arrestation pour des infractions mineures (autres délits infractions et infractions potentielles), mais n'étaient pas plus susceptibles de conduire à une arrestation pour des situations plus graves (infractions contre la personne) » [7].  Par ailleurs, pour un délit de gravité similaire, une personne présentant un TSM était deux fois plus susceptible d’être arrêtée [7].


      Verdict de culpabilité. Il semblerait que 14,5 % des personnes présentant un TSM auraient reçu un verdict de culpabilité comparativement à 2,3 % chez la population générale. [16]


      Sentence d’emprisonnement. Les individus présentant un TSM auraient plus de chance de recevoir une peine d’emprisonnement [17] ainsi que de se voir imposer des sentences plus longues [18], ce qui augmente donc leur surreprésentation au sein du système carcéral.


      Santé mentale et prison


      Enfin, les individus présentant un TSM qui se retrouvent en détention peuvent vivre plusieurs difficultés, dont l’aggravation de leurs symptômes et une coupure avec leur soutien communautaire [19]. On remarque également une augmentation du risque de victimisation [20] ainsi qu’un manque d’efficacité sur le plan de la prévention de la récidive [22]. En effet, la prison est dommageable sur ces individus puisqu’on n’y traite pas la cause du délit. Enfin, la détention est un environnement stressant où les individus y sont plus vulnérables et où ils ont accès à moins d’outils. 


Alors ?


      Dans les faits, les personnes souffrant d’un TSM sont plutôt 15 fois plus à risque de devenir la victime d’un acte de violence plutôt que d’en être l’auteur [23]. De surcroît, ils ont également 2 fois plus de risque d’être victimes d’un acte de violence comparativement à la population générale ainsi que deux fois plus de chance de vivre de la victimisation multiple [24]. 


Des alternatives : La déjudiciarisation et les tribunaux en santé mentale


      Comme il l’a été mentionné au cours de cet article, le système de justice pénale traditionnel n’est pas une voie efficace pour les personnes souffrant d’un TSM. Greg DelBigio du Conseil canadien des avocats de la défense a d’ailleurs mentionné ceci à cet effet : 


      « Dans certains cas, le problème vient du fait que le système de justice pénale ne prévoit rien pour s’attaquer à la cause sous-jacente qui a amené le contrevenant devant le système de justice pénale. On ne tient pas compte des problèmes liés à la pauvreté, à la maladie mentale ou à la toxicomanie. En fait, il arrive que certains contrevenants qui sortent de prison n’aient plus de maison ou de foyer; ils les ont perdus. Ceux qui avaient un emploi n’en ont plus. La perte du foyer et de l’emploi peut certes avoir des répercussions sur la famille, ce qui à son tour aggrave la situation. Si on évitait de saisir les instances judiciaires de certains cas, on pourrait mieux utiliser les ressources pour s’occuper des affaires qui doivent vraiment être soumises aux tribunaux. » [25]


Mais alors que peut-on faire ? 


La prévention et la déjudiciarisation


      La meilleure approche à adopter serait alors de miser sur la prévention plutôt que sur la répression et ainsi intervenir en amont à la judiciarisation. En rendant accessibles plus de ressources en lien avec la pauvreté, la toxicomanie et la santé mentale, il serait possible d’agir directement sur les facteurs sous-jacents au crime[25].


      Par ailleurs, il est également possible de rediriger l’individu qui aurait commis des délits mineurs vers des programmes de déjudiciarisation [25]. Ces programmes peuvent être possibles à plusieurs étapes du processus judiciaire et donc être réalisés avant ou après l’arrestation. On peut, par exemple, avoir des équipes spécialisées en santé mentale, composées de travailleurs sociaux et de policiers, qui interviennent lors d’un délit impliquant une personne avec un TSM. De plus, que ce soit avec ou sans une équipe spécialisée, grâce à leur pouvoir discrétionnaire, les policiers peuvent orienter les individus vers différentes ressources plutôt que de procéder à une arrestation. De plus, si une arrestation a lieu, une fois à la Cour, le procureur de la couronne peut décider de référer l’individu vers un service spécialisé ou de l’orienter vers une évaluation afin de vérifier son aptitude à subir son procès ou sa responsabilité criminelle. Enfin, il est également possible pour le procureur de la couronne, en accord avec l’individu, de le diriger vers un tribunal en santé mentale plutôt qu’un tribunal traditionnel [25] 


Les tribunaux spécialisés en santé mentale


      Au Canada, il existerait une centaine de tribunaux en santé mentale. Ces derniers sont un type de tribunal de résolution de problèmes qui diffèrent des tribunaux traditionnels du système de justice puisqu’ils s’adaptent aux situations complexes de l’individu [27]. De façon générale, en justice thérapeutique, le crime est considéré comme le symptôme d’une problématique et on souhaite traiter cette dernière par le biais de différents programmes. On vise la guérison et la réinsertion de la personne [28]. Ensuite, la plupart du temps, en échange d’un plaidoyer de culpabilité ou d’une reconnaissance des faits [29] on demande à la personne de suivre un programme thérapeutique en lien avec ses besoins. L’individu devra donc se présenter en Cour à une certaine fréquence afin de faire part de ses progrès et de l’atteinte de ses objectifs [30]. Si l’individu respecte le programme, en fonction de la gravité de l’acte pour laquelle il a été jugé, on pourra lui proposer de purger une peine moins sévère, comme une probation. Dans d’autres cas, on pourra même retirer complètement les accusations [29].


      Voici un site pour en savoir plus : https://santementalejustice.ca/programmes-daccompagnement-et-dadaptabilite-a-la-cour/


Enfin


      Pour conclure, il est possible de constater que les gens souffrant d’un TSM ne représentent pas un plus grand danger pour la société. Les médias et le domaine cinématographique font en sorte de perpétuer certains mythes et préjugés à l’égard de cette sous-population. De plus, les statistiques peuvent être trompeuses et induire des liens de causalités inexistants. Des raisons systémiques peuvent expliquer pourquoi on retrouve plusieurs personnes atteintes d’un TSM au sein du système carcéral. De plus, comme on a pu le constater, certains facteurs individuels concomitants au TSM peuvent également expliquer ce semblant d’association. De surcroît, il ne faut pas non plus oublier qu’ils présentent les mêmes facteurs de risque à la violence que la population générale. Ainsi, posséder un problème de santé mentale ne suffit pas à expliquer la violence et la criminalité en elle-même et il est évident qu’il n’est pas nécessaire de souffrir d’un TSM afin de commettre un acte violent. En réalité, ces individus sont plus à risque de devenir victime d’un acte criminel plutôt que d’en être l’auteur. Par ailleurs, comme expliqué précédemment, la détention n’est pas l’endroit à privilégier pour ces individus en raison des conséquences négatives qu’elle peut engendrer. Il faudrait plutôt opter pour la prévention ainsi que préférer les différents programmes de déjudiciarisation au système de justice traditionnel.


    R é f é r e n c e s    


[1]https://www.quebec.ca/sante/conseils-et-prevention/sante-mentale/informer-sur-troubles-mentaux/troubles-mentaux/a-propos-troubles-mentaux


[2] Dubreucq, J-L. Joyal, C.; Millaud, F. 2005. « Risque de violence et troubles mentaux graves », Annales Médico-psychologiques, 163(10), p.?852-865.


[3] Pescosolido, B.A., Monahan, J. Link, B.G. Stueve, A., & Kikuzawa, S. (1999). The public’s view of the competence, dangerousness, and need for legal coercion of persons with mental health problems.American Journal of Public Health, 89, 1339-1345.


[4] Whitley, R. Berry, S. (2013). Trends in Newspaper Coverage of Mental Illness in Canada: 2005–2010. Canadian journal of psychiatry. 58(2), 107-112.


[5] Crocker, A. G., Cote, G., Toupin, J., & St-Onge, B. (2007). Rate and characteristics of men with an intellectual disability in pre-trial detention. Journal of Intellectual & Developmental Disability, 32(2), 143–152.


[6] Brennan, P. A., Mednick, S. A., & Hodgins, S. (2000). Major mental disorders and criminal violence in a Danish birth cohort.Archives of General psychiatry,57(5), 494-500.


[7] Charette, Y., Crocker, A. G., & Billette, I. (2014). Police encounters involving citizens with mental illness: use of resources and outcomes. Psychiatric Services,65(4), 511-516.


[8] Brink, J., Doherty, D., Boer, A. (2001). Mental disorderin federal offenders: A Canadian prevalencestudyInternational Journal of Law and Psychiatry, 24, 339-356.


[9] Monahan, J., Steadman, H. J., Silver, E., Appelbaum, P. S., Robbins, P. C., Mulvey, E. P., ... & Banks, S. (2001).Rethinking risk assessment: The MacArthur study of mental disorderand violence. Oxford UniversityPress


[10] Dorvil, H., Guttman, H., Ricard, N., & Villeneuve, A. (1997).Défi de la reconfiguration des services de santé mentale: Pour une réponse efficace et efficiente aux besoins des personnes atteintes de troubles mentaux graves. Québec: Gouvernement du Québec, Ministère de la santé et des services sociaux.


[11] Hiday, VA (2006) Putting community risk in perspective: A look at correlations, causes and controls, In International Journal of Law and Psychiatry, 29 (4), 316-331.


[12] Beaudette, J.N., Power, J., & Stewart, L. A. (2015). National prevalence of mental disorders among incoming federally-sentenced men offenders (Research Report, R-357). Ottawa, ON: Correctional Service Canada.


[13a] Richard-Devantoy, S., Olie, J. -P., & Gourevitch, R. (2009). Risque d’homicide et troubles mentaux graves: Revue critique de la littérature [Risk of homicide and major mental disorders: A critical review]. L'Encéphale: Revue de psychiatrie clinique biologique et thérapeutique, 35(6), 521–530. https://doi.org/10.1016/j.encep.2008.10.009


[13b] Tiihonen, J., Isohanni, M., Rasanen, P., Koiranen, M., & Moring, J. (1997). Specific major mental disorders and criminality: a 26-year prospective study of the 1966 northern Finland birth cohort. American Journal of Psychiatry, 154(6), 840-845.


[14] Whitley R, Berry S. Trends in newspaper coverage of mental illness in Canada: 2005-2010. Can J Psychiatry. 2013 Feb;58(2):107-12. doi: 10.1177/070674371305800208. PMID: 23442898.


[15] Dessureault et al., 2003


[16] Seto, M. C., Charette, Y., Nicholls, T. L., & Crocker, A. G. (2020). Predicting Which Clinically Documented Incidents of Aggression Lead to Findings of Guilt in a Forensic Psychiatric Sample. International Journal of Forensic Mental Health, 19(4), 365-376.


[17]Crocker, A. G., Charette, Y., Seto, M. C., Nicholls, T. L., Côté, G., & Caulet, M. (2015).The National Trajectory Project of Individuals Found Not Criminally Responsible

on Account of Mental Disorder in Canada. Part 3: Trajectories and Outcomes

Through the Forensic System. Canadian Journal of Psychiatry, 60(3), 117-126.


[18] Ditton, P. M. (1999). Mental health and treatment of inmates and probationers. US Department of Justice, Office of Justice Programs, Bureau of Justice Statistics.


[19] Schneider et al., 2002


[20] Reed, J. L., & Lyne, M. (2000). Inpatient care of mentally ill people in prison: results of a year's programme of semistructured inspections. Bmj, 320(7241), 1031-1034.


[22] Charette, Y., Crocker, A. G., Seto, M. C., Salem, L., Nicholls, T. L., & Caulet, M. (2015).The National Trajectory Project of Individuals Found Not Criminally Responsible

on Account of Mental Disorder in Canada. Part 4: Criminal Recidivism. Canadian

Journal of Psychiatry, 60(3), 127-134.


[23] Crocker, A. G., Nicholls, T. L., Côté, G., Latimer, E. A., & Seto, M. C. (2011). Individuals found not criminally responsible on account of mental disorder: Are we providing equal protection and equivalent access to mental health services across Canada?. Canadian Journal of Community Mental Health, 29(2), 47-54.


[24] Burczycka, M. (2018). Violent victimization of Canadians with mental health-related disabilities, 2014. Juristat: Canadian Centre for Justice Statistics, 1-21.


[25]https://sencanada.ca/content/sen/committee/421/LCJC/Reports/Court_Delays_Final_Report_f.pdf


[26] Jaimes, A., Crocker, A., Bédard, É. & Ambrosini, D. L. (2009). Les Tribunaux de santé mentale : déjudiciarisation et jurisprudence thérapeutique. Santé mentale au Québec, 34(2), 171–197. https://doi.org/10.7202/039131ar 


[27] Moore, D. (2011). The benevolent watch: Therapeutic surveillance in drug treatment court. Theoretical Criminology, 15(3), 255–268.


[28] Hannah-Moffat, K., & Maurutto, P. (2012). Shifting and targeted forms of penal governance: Bail, punishment and specialized courts. Theoretical Criminology, 16(2), 201–219.


[29] https://www.youtube.com/watch?v=xrRcZ3Ld-lU


[30] Clément, M., Levesque, A., et Bernard, A. (2018). Pour une justice adaptée aux besoins spécifiques des personnes : Évaluation d’implantation du projet IMPAC à la Cour municipale de la Ville de Québec.

Article rédigé par Molly Bussière

Corrections et vérifications réalisées par Ariane Pelchat

LE BLANCHIMENT D'ARGENT

      Lorsqu’on aborde l’univers de la criminalité, ce terme ressort souvent dans les discussions et dans les diverses nouvelles véhiculées dans le monde entier concernant ce sujet. Cet article abordera la définition précise concernant ce terme ainsi que des exemples entourant le processus de blanchiment d’argent. 


Définition


      Tout d’abord, il faut se demander ce qu’est le blanchiment d’argent et aussi qu'elles sont ses principaux objectifs? Plus précisément, le blanchiment d’argent « est le processus consistant à dissimuler la source de l'argent ou des biens tirés d'activités criminelles » [1; 2; 3]. Il est évident qu’il existe une grande quantité d’activités illégales qui cherche à produire du profit et à blanchir l’argent qui provient de ces mêmes activités. Nous pouvons penser notamment au trafic de stupéfiants, à la contrebande, à la fraude, à l'extorsion de fonds et finalement, à la corruption [1; 2; 3]. 


Quelques statistiques


      Selon une étude menée par Statistiques Canada, en 2009, « les services de police canadiens ont établi le bien-fondé de 525 affaires de blanchiment d’argent, ce qui représentait moins de 1 % des affaires au Code criminel déclarées par la police. » Ainsi, malgré le fait que le blanchiment d’argent ait considérablement augmenté depuis les 10 dernières années, cette activité reste relativement stable depuis 2006 [4]. 


      De plus, selon Statistiques Canada, la majorité (≈ 83%) des acteurs de blanchiment d’argent sont de sexe masculin. En effet, les acteurs de blanchiment d’argent sont, en général, plus âgés que les auteurs des autres types de crimes : « En 2009, l’âge médian des auteurs présumés de blanchiment d’argent était de 33 ans, comparativement à 26 ans chez les auteurs présumés de crimes en général [4]. »


      Du côté de la police, les affaires concernant le blanchiment d’argent sont moins souvent résolues que les crimes en général. Ainsi, « en 2009, la police a identifié un auteur présumé dans 18 % des affaires de blanchiment d’argent, soit environ la moitié́ de la proportion notée pour les crimes en général (39 %). » [4]. 


Processus


      Ensuite, il devient important de se questionner sur ce qu’implique ce processus criminel, soit celui de rester dans l’ombre tout en remplissant diverses missions reliées au blanchiment d’argent. 


      Les étapes relatives au blanchiment d’argent peuvent varier, mais restent tout de même très complexes. Le gouvernement du Canada présente principalement trois étapes qui expliquent, de façon détaillée, ce processus particulier [1] : 


   1. Le placement : Introduire les produits provenant de la criminalité dans un système financier quelconque.


   2. Dispersion : Convertir les produits provenant des diverses activités criminelles en une autre forme de revenu. De plus, à cette étape, on vise à créer un enchevêtrement d’opérations financières dans le but de brouiller les pistes et donc, contrecarrer les vérifications. Ainsi, masquer l’origine et la propriété des divers fonds fait partie des visées à cette étape. 


   3. Intégration : Réintroduire les bénéfices, qui, à la base, proviennent des activités criminelles, dans l’économie du pays, et ce, dans le seul et unique but de donner une apparence légitime aux nombreux fonds. 


Méthodes 


   En ce qui concerne le blanchiment d’argent, les méthodes sont nombreuses et, parfois, très créatives. En voici quelques exemples [3] :


   1. Le prête-nom : Cette technique se trouve à être parmi les plus utilisées dans le monde du blanchiment d’argent. Elle consiste à demander à des amis, à des membres de la famille ou à des connaissances d’effectuer certaines opérations financières à la place de l’auteur du blanchiment d’argent. Cette technique permet de rester discret, tout en dissimulant la source et le véritable propriétaire des fonds. De plus, la provenance des fonds devient difficilement repérable et conséquemment, son origine demeure dans l’anonymat. 


   2. Schtroumpfage : Le but premier de cette méthode est d’avoir recours à un bon nombre de personnes ayant comme rôle principal de déposer de l’argent ou de se procurer diverses traites bancaires dans plusieurs institutions bancaires, et ce, afin d’ultimement verser l’argent dans un grand compte commun. Ce type de transaction demeure toujours en bas du seuil de déclaration obligatoire. De ce fait, les transactions n’attirent pas l’attention et passent donc pratiquement inaperçues. 


   3. L’achat en comptant de biens d’une grande valeur : Cette méthode est très facile et très répandue dans le monde criminel du blanchiment d’argent. En fait, divers biens d’une grande valeur sont simplement payés en argent comptant et sont enregistrés au nom d’une connaissance afin de les revendre par la suite. Le montant de la revente est alors considéré comme de l’argent propre. 


   4. Bureaux de change : En utilisant les revenus de la criminalité, cette méthode vise à acheter des devises à différents bureaux de change dans le but de les transférer, par la suite, dans des comptes bancaires à l’étranger. 


   5. Contrebande de devises : Dans le but de dissimuler l’origine et la propriété des fonds provenant de la criminalité, cette méthode vise à envoyer ces mêmes fonds à l’étranger (souvent dans des pays où la législation sur le secret bancaire demeure très stricte). 


   6. Jeux de hasard au Casino : Méthode très simple et efficace qui consiste à acheter des jetons dans un casino, jouer aux divers jeux (ou simplement ne pas jouer) et retourner les jetons contre un chèque du casino. Méthode simple qui permet d’en ressortir avec de l’argent propre en tout anonymat. 


Conséquences 


      Il est important de savoir que la problématique découlant du blanchiment d’argent est d’envergure mondiale et donc, qu’elle touche chacun des pays du monde entier d’une manière ou d’une autre [1]. Les conséquences du blanchiment d’argent sont multiples : elles peuvent contribuer à favoriser la corruption et à déstabiliser l’économie d’un ou de nombreux pays plus ou moins vulnérables [1]. De plus, cette méthode criminelle encourage directement le crime organisé en lui procurant des fonds considérables qui contribuent à augmenter la fréquence de ses activités criminelles [1]. Ainsi, il faut également savoir que la valeur des produits provenant des activités criminelles est considérable, soit de 590 milliards à 1 500 milliards de dollars américains mondialement, et ce, uniquement en l’espace d’une année [1]. 


Conclusion


      Comme il fut mentionné précédemment, le blanchiment d’argent est un enjeu mondial qui se modernise et qui se spécialise grâce à des techniques de plus en plus efficaces. Le plus grand défi des adeptes de ce type de criminalité est définitivement de garder l’anonymat, ainsi que de cacher les traces de toute activité criminelle. Ainsi, pour les forces de l’ordre, détecter ce type de crime devient de plus en plus difficile et complexe. En effet, il est évident qu’avec la modernisation fulgurante de la technologie, l’expansion éblouissante de la cryptomonnaie et l’actualisation constante des techniques de blanchiment d’argent, le travail des policiers et celui des institutions financières s'en retrouvent grandement complexifiés [1]. 



R é f é r e n c e s

_________________


1. Gouvernement du Canada. (2019). Qu’est-ce que le blanchiment d’argent? https://www.fintrac-canafe.gc.ca/fintrac-canafe/definitions/money-argent-fra


2. Assurance vie équitable du Canada. (2022). En quoi consistent le blanchiment d’argent et le financement des activités terroristes? https://www.equitable.ca/fr/à-propos-de-nous/le-blogue-équitable/lassurance-vie/en-quoi-consistent-le-blanchiment-d-argent-et-le-financement-des-activités-terroristes/


3. Chambre de la sécurité financière. (2022). Lutte au blanchiment d’argent et au financement des activités terroristes. https://www.chambresf.com/fr/infodeonto/gestion-dossiers/lutte-blanchiment-dargent-financement-activites-terroristes


4. Brennan, S. Vaillancourt, R. (2011). Le blanchiment d’argent au Canada, 2009. Statistiques Canada https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/85-005-x/2011001/article/11454-fra.htm 


Article rédigé par Bianca Meszaros

Corrections et vérifications réalisées par Audrey-Maude. L

LE PROFILAGE CRIMINEL & GÉOGRAPHIQUE

LE PROFILAGE CRIMINEL


     Le profilage criminel est défini comme un outil d’enquête utilisant les éléments constitutifs d’une scène de crime dans le but de générer des informations dites probables sur les comportements, la personnalité et les caractéristiques personnelles de l’auteur du crime. Cet outil d’investigation est principalement utilisé pour évaluer la nature et la valeur des preuves médico-légales et comportementales liées à un crime particulier ou à une série de crimes connexes [1]. Il permet également de réduire le bassin de suspects potentiels, tout en contribuant aux efforts d’arrestation [2; 3]. Bien que le profilage criminel ait récemment atteint une reconnaissance sans précédent au sein de notre société, ce dernier présente une lacune au niveau des preuves criminologiques expérimentales. En d’autres mots, il y a actuellement un manque flagrant d’études scientifiques venant attester, de façon rigoureuse, sa validité et ses hypothèses [4]. 


     Cet outil d’enquête se base sur plusieurs postulats, principes et hypothèses. En guise d’exemple, les fervents défenseurs du profilage criminel tiennent pour acquis que la scène de crime reflète la personnalité de l’auteur, que le mode opératoire reste similaire pour un même délinquant d’un crime à l’autre, que la signature d’un délinquant reste la même à travers tous ses crimes et, finalement, que la personnalité du délinquant ne change pas donc restera stable durant ses divers passages à l’acte [5].


     Cet outil d’enquête présente aussi plusieurs utilités, dont notamment de 1)réduire le bassin de suspects viables et potentiels dans une enquête criminelle, 2) circonscrire les efforts d'enquête sur les suspects restants, 3) établir un lien entre les crimes potentiellement liés entre eux en identifiant les caractéristiques des scènes de crime et les modèles de comportement (c'est-à-dire, le mode opératoire et la signature), 4) évaluer le potentiel d'escalade des comportements criminels nuisibles (p. ex., harcèlement criminel ou voyeurisme) à des comportements criminels plus graves ou plus violents, 5) fournir aux enquêteurs des pistes et des stratégies pertinentes pour mener à bien leur enquête et finalement, 6) développer des stratégies efficaces de communication, d'entretien ou d'interrogatoire lors des contacts avec des suspects [1].


     Selon la définition théorique, un profil criminel s’élabore en réalisant une inférence des traits distinctifs d’un délinquant, et ce, à partir de preuves matérielles et comportementales. Pour ce qui est des preuves de nature matérielle, celles-ci sont généralement laissées sur la scène de crime par le délinquant lors d’un passage à l’acte. Elles peuvent se traduire par des cheveux, du sperme ou des traces de chaussures laissées sur les lieux du crime. Ce type de preuves peut éventuellement servir à déduire la couleur précise des cheveux du délinquant ou encore, son ethnicité. Quant aux preuves comportementales, des déductions sur les antécédents, sur les habitudes, les propensions, ainsi que sur la personnalité (traits) du délinquant peuvent être obtenues grâce à celles-ci. En règle générale, les informations utilisées pour dresser un profil criminel sont obtenues à l’aide de différents types d’analyses de preuves, soit d’ordre médico-légal, victimologique ou encore lié à la scène de crime [1].


     Lors de l’élaboration d’un profil criminel, déduire et identifier les caractéristiques personnelles de l’individu ayant commis les crimes à l'étude est très important. En effet, certains traits personnels et psychologiques peuvent être stables durant une carrière criminelle, alors que d’autres sont déterminés par la situation, ou encore, vont évoluer avec le temps (ou même déprécier) [1].


La plupart des forces de l'ordre croient fermement que la compréhension des méthodes et des techniques utilisées par un criminel pour commettre son crime serait la meilleure façon d'enquêter, et ce, afin d’ultimement arriver à identifier et à appréhender ce dernier [6]. À l’inverse, le mode opératoire est également d’une grande utilité pour le délinquant même. D’abord, certains éléments du mode opératoire peuvent venir assurer la protection de son identité durant le passage à l’acte (p. ex., porter un masque, couvrir les yeux de la victime lors d'une agression sexuelle, le port de gants lors d'un cambriolage, le meurtre de témoins oculaires et la mise en scène de la scène de crime). Ensuite, un mode opératoire peut servir à assurer l’accomplissement et la réussite d’un passage à l’acte (p. ex., cibler et appréhender la victime, utiliser un bâillon pour faire taire une victime, utiliser une arme pour contrôler la victime, utiliser une arme à feu pour tuer adéquatement la victime). Finalement, d’autres éléments d’un mode opératoire peuvent servir à faciliter l’évasion ou la fuite du délinquant post-crime (p. ex., l’utilisation d'un véhicule volé pendant la perpétration d'un crime ou après la commission d'un crime, attacher/assommer les victimes pour empêcher leur évasion, entraver leurs tentatives pour obtenir de l'aide en coupant la ligne téléphonique, endormir ou enfermer les chiens de la résidence ciblée) [7].


     Dans un autre ordre d’idées, il est possible d’identifier le mode opératoire spécifique d’un délinquant sériel en analysant l'ensemble des preuves obtenues ultérieurement à ses délits. Tout d’abord, l’identification des outils utilisés par le délinquant afin d’accéder au lieu du crime peut s’avérer pertinente comme information (p. ex., tournevis, scie à métaux, double des clés de la porte d'entrée, etc.). Ensuite, les enquêteurs doivent s’attarder aux types d’objets ayant été prélevés de la scène de crime par le délinquant (p. ex., objets de valeur, objets impulsifs, objets ayant une signification, espèces, bijoux, cartes de crédit, souvenirs, vêtements, etc.). L’absence d’empreintes digitales sur les lieux du crime est aussi un aspect d’enquête pertinent, car celui-ci suggère un délinquant ganté ou encore, bien préparé/organisé. Il s’avère aussi utile d’analyser le type de contention utilisé sur la ou les victimes, et ce, à partir des preuves physiques récoltées sur la scène de crime (p. ex., des traces de fibres ou les marques de blessures). La présence de marques de pneus ou de chaussures à proximité de la scène de crime peut, à son tour, orienter l’enquête vers des suspects possédant une marque de véhicule spécifique ou encore, un modèle/une grandeur de chaussures particulier. De surcroît, l’analyse des schémas de blessures retrouvées sur la victime peut permettre l’identification du type d’arme utilisée lors du passage à l’acte (p. ex., les marques d'incision d'un couteau ou les traces de morsures sur le dos de la victime) [7]. Finalement, d’innombrables caractéristiques de la scène de crime peuvent, elles aussi, aider à l’élaboration d’un MO spécifique, telles que la quantité de planification précédant le crime, le lieu de l'infraction, l’itinéraire emprunté par le délinquant jusqu'au lieu du crime, la surveillance de la victime pré-infraction, la nature et l’étendue des blessures subies par la victime, ainsi que le moyen de transport utilisé pour se rendre et s’enfuir de la scène de crime [6].


La signature criminelle 


     Il est important de faire la distinction entre le mode opératoire et la signature criminelle, puisque ces deux éléments constitutifs du profilage criminel sont couramment utilisés, à tort, de façon interchangeable. Tout d’abord, la signature criminelle fait référence à ce que le délinquant accomplit, lors d’un passage à l’acte, pour se réaliser lui-même. Il s’agit d’un concept statique et quasi intangible qui vient refléter, en tout ou en partie, le ou les fantasmes du criminel [8]. Ainsi, en analysant minutieusement celle-ci, les enquêteurs peuvent être en mesure d’identifier ou de valider les traits psychologiques du responsable. De plus, la signature criminelle est l’empreinte personnelle du délinquant et n’est, en aucun cas, utile et nécessaire au passage à l’acte. Il paraît pertinent d’ajouter que cet élément n’est pas toujours présent dans l’ensemble des scènes de crime. En effet, certains délinquants ne ressentent pas le besoin de finaliser leur passage à l’acte à l’aide d’une symbolique, alors que d’autres n’ont tout simplement pas le temps ou la possibilité de le faire [22]. En guise de résumé, le mode opératoire peut évoluer de façon significative d’un crime à l’autre, alors que la signature criminelle, quant à elle, a tendance à rester stable dans le temps et dans l’espace [9].


     Afin d’illustrer ce qu'est la signature criminelle de façon plus concrète, voici quelques éléments de preuve pertinents à analyser dans les cas impliquant une infraction à caractère sexuel (p. ex., une agression sexuelle simple ou armée) : 1) le type de ligature utilisée, 2) la séquence spécifique des actes sexuels et l’ordre chronologique , 3) le niveau de blessure de la victime (p. ex., de minime à grave), 4) le type spécifique d'arme utilisée, ainsi que 5) les objets personnels manquants de la victime pour lesquels le vol ne semble pas motivé par le profit (p. ex., une pièce d'identité, des vêtements de la victime ou encore, des bijoux abordables) [7].


Le comportement pré/péri/post-délictuel 


     Un mode opératoire s’échelonne dans le temps sur trois phases délictuelles distinctes, soit le comportement 1) pré-délictuel, 2) péri-délictuel et 3) post-délictuel. En décortiquant la chronologie du passage à l’acte, il devient plus simple pour l’enquêteur d’élaborer adéquatement le modus operandi du délinquant. 


     Le comportement pré-délictuel. Les comportements pré-délictuels peuvent s’illustrer de différentes façons. La planification/préparation et l’acte de précaution en sont de parfaits exemples.


  • Planification/préparation : Cela fait référence à l’étendue de la planification du délinquant. Celle-ci peut être mesurée en recensant les moyens et les outils détenus par le criminel lors de la commission du crime. En ce sens, il est nécessaire d’analyser certains éléments de preuves qui, après avoir été colligés entre eux, permettront de mesurer le niveau de planification du délinquant : 1) une preuve de la surveillance      de la victime, 2) des objets apportés sur les lieux du crime qui sont spécifiques au crime commis, 3) des relevés d’appels faits à la victime avant l'attaque, 4) des connaissances significatives relatives à la résidence de la victime et à son emploi du temps [10].


  • Acte de précaution : Les  actes de précaution font référence aux actions prises par un délinquant, que ce soit avant, pendant ou après le crime, qui sont consciemment  destinées à embrouiller, entraver ou déjouer les efforts d'enquête, et ce, dans l’ultime but de dissimuler l'identité du délinquant ou bien le crime lui-même [10]. Afin de mieux illustrer ce concept, voici quelques exemples d’actes de précaution: 


     (1) Habillement/déguisement - Les délinquants peuvent modifier leur apparence en utilisant des déguisements, des masques ou encore, des vêtements volumineux et amples. En cachant leurs traits physiques et distinctifs aux témoins et aux victimes, ils rendent leur future identification difficile, voire impossible [10]. 


     (2) Moment de la journée - Les délinquants peuvent également choisir de passer à l’acte à un moment de la journée où la luminosité est très faible, soit durant la soirée, la nuit ou au petit matin, et ce, afin de masquer leurs caractéristiques physiques et d'accroître la vulnérabilité de leurs victimes [10].  


     (3) Sélection des victimes - Les délinquants sélectionnent leurs victimes en ciblant des personnes qu’ils connaissent (victimes ciblées) ou encore, en choisissant de purs inconnus (victimes opportunistes). Cette dernière option peut s’avérer utile, puisqu’elle diminue la probabilité que les délinquants soient éventuellement liés à leurs crimes. Autrement dit, il devient plus difficile pour les enquêteurs de remonter à eux [10].


    (4) Mémoriser ou « collecter » l'identité de la victime - Lorsque le passage à l’acte survient dans la résidence de la victime, notamment, le délinquant peut examiner, mémoriser et même amener avec lui une preuve d’identification de la victime (incluant : nom, adresse et autres informations personnelles). Le fait de détenir ce type d’informations peut être très utile, tout particulièrement afin d’intimider la victime et de s’assurer de son silence. Le but ultime est donc d'empêcher que la victime signale l’incident aux autorités ou au moins, de retarder sa déclaration [10].


      Le comportement péri-délictuel. Le comportement péri-délictuel fait référence aux actions prises lors du passage à l’acte, soit durant le crime en tant que tel. Ce type de comportement peut prendre plusieurs formes, les voici : 


      (1) Comportement verbal/Script - Le script fait référence au langage (p. ex., le ton, l’attitude, le contenu et le timing) utilisé par un délinquant au cours d'une infraction, ainsi qu’aux mots ou expressions qu'il utilise pour donner des ordres à la victime. Ainsi, le script sert à diriger la victime de façon verbale, mais aussi comportementale. De plus, les verbalisations du délinquant en disent long sur les fantasmes de ce dernier en lien avec ladite infraction. Autrement dit, le langage utilisé pendant le passage à l’acte est l’extension ou le reflet des pensées, des besoins et des lacunes du délinquant (p. ex., lacunes au niveau émotionnel, physique, de l’estime de soi, etc.). Il existe 11 thèmes principaux qui ressortent couramment du comportement verbal des criminels, dont notamment 1) les ordres et les commandes orientés vers le mode opératoire, 2) les menaces, 3) les révélations personnelles du délinquant, 4) la négociation et finalement, 5) l’autodérision [10].


      (2)  La force orientée vers le contrôle – Il s’agit d’un type de force axé principalement sur le contrôle. Elle se traduit en comportements physiquement agressifs qui visent à restreindre la liberté de mouvement de la victime. En guise d’exemple, il peut être question de maîtriser une victime manuellement afin de l'empêcher de bouger ou encore, de s'échapper. Un délinquant peut aussi bâillonner sa victime pour l'empêcher de crier ou d’appeler à l’aide. Aussi, il est possible d’utiliser des outils de contention, tels que des menottes et des ligatures pour circonscrire les mouvements de la victime. Finalement, le fait d’enfermer une victime dans une pièce afin d’éviter qu’elle s’échappe est aussi considéré comme une forme de force orientée vers le contrôle [10].


      (3) Utilisation de force sexuelle - La force sexuelle se traduit par une agression ou une coercition qui sert directement à satisfaire les désirs érotiques ou déviants du délinquant. En guise d’illustration, il peut s’agir de morsures post-mortem ou d’ablation des seins de la victime. La force sexuelle peut aussi prendre forme en forçant une victime à avoir des relations sexuelles orales ou avec pénétration (vaginale ou anale) et ce, avec le délinquant ou autrui. De plus, la force sexuelle peut également être associée aux fétiches sexuels et aux paraphilies (p. ex., exhibitionnisme, pédophilie, transvestisme et voyeurisme) du délinquant [10].


      (4) Menace verbale (de contrôle, de punition, de force sexuelle ou mortelle) –Cette méthode de contrôle adoptée par un délinquant sert à manipuler, réguler, restreindre et maîtriser le comportement et la prise de décision de la victime. Ce type de menace peut s’illustrer comme suit : « Arrête de te déplacer, ou je t'attacherai les mains derrière le dos. » ou « Fais-le encore une fois et je te tuerai. » [10]. 


      (5)  Présence non articulée de la menace physique (contrôler, punir, dominer sexuelle ou tuer) - Il s’agit de la présence d'une arme à feu, d'un couteau, d'un bâton (ou autre arme contondante), de poings fermés ou levés, d’intimidation physique ou de menottes (ou autres contraintes évidentes) lors du passage à l’acte. La menace n’est donc pas articulée avec des mots, elle est plutôt transmise symboliquement à l’aide d’objets physiques et concrets [10].


      Le comportement post-délictuel. Selon le profileur criminel québécois Cédric Aubut, les comportements post-délictuels sont généralement modulés par le stress, donnant comme résultat des actions et des décisions désorganisées et improvisées. De plus, les délinquants auraient tendance à s’absenter du travail, de façon inhabituelle, dans les jours suivant le passage à l’acte. 


Le rôle des fantaisies 


     Certains chercheurs scientifiques ont d’ailleurs observé une relation directe entre le contenu des fantasmes sexuels d’un délinquant et les comportements affichés sur la scène de crime. Autrement dit, ces derniers ont signalé une similitude significative entre les fantaisies et les crimes commis dans la réalité. Plus spécifiquement, les fantasmes sexuels déviants entretenus par un agresseur sexuel de femmes étaient souvent liés au niveau de coercition, ainsi qu’à l’organisation de son mode opératoire [11, 12]. Ainsi, puisque les fantaisies sont une composante importante du passage à l’acte à caractère sexuel, la compréhension de ces dernières est fondamentale à la production d’un profil criminel complet [11, 13, 14].


La victimologie : sélection des victimes 


     La victimologie dite médico-légale est un autre élément constitutif du profilage criminel. Il s’agit de faire la reconstitution de qui est ou qui était la victime au moment du crime [9]. En d’autres mots, un victimologue judiciaire examine, évalue et interprète les preuves spécifiquement liées à la ou les victime(s) d’un acte criminel, et ce, afin de faire avancer une enquête. Bien qu’il soit assez difficile de mettre ses propres émotions de côté lorsqu’il est question de victimisation, les professionnels se doivent de rester objectifs, cohérents et rigoureux en recueillant et en examinant ce type de preuves [15]. 


     Plusieurs éléments sont essentiels afin d’élaborer un profil victimologique. D’abord, il faut déterminer la cause de la mort (p. ex., par objet contondant, par arme à feu, par arme blanche, par intoxication ou empoisonnement, par noyade, par asphyxie mécanique, etc.) [16]. Par la suite, il faut regarder les caractéristiques de la victime (p. ex., ses traits de personnalité, son genre, ses traits physiques, sa culture, ses vulnérabilités, etc.). Les antécédents médicaux de cette dernière peuvent aussi être très utiles à l’élaboration d’un profil axé sur la victimologie (p. ex., la prise de médicaments, des traitements en cours, des problèmes de consommation d’alcool et/ou de drogues, l’historique des interventions chirurgicales subies, etc.). [9]. Dans certains cas, les professionnels tiennent à s’informer des antécédents psychiatriques de la victime, mais aussi des membres de sa famille, sachant que l’hérédité joue un rôle de premier plan dans l’apparition de certains troubles de santé mentale [9]. Finalement, les experts s’informent généralement de la vie sociale de la victime, et ce, afin d’en apprendre davantage sur sa situation maritale, familiale et sexuelle. D’autres éléments, tels que son niveau d’éducation, ses relations interpersonnelles, ses loisirs, sa religion, ainsi que ses antécédents judiciaires, seront également pris en considération [9].


     Ce type d’analyse est utile à plusieurs niveaux lors d’une enquête criminelle. D’abord, comme il fut expliqué précédemment, la victimologie permet de faire revivre la victime pour les besoins de l’enquête. Il s’agit d’un élément central de l’investigation qui permet indirectement de comprendre la ou les motivation(s) derrière le passage à l’acte et aussi, de connaître la personnalité du ou des responsable(s) [9]. Ensuite, l’étude des victimes vient faciliter l’élaboration d’une ligne du temps. En s’intéressant davantage à la victime, il devient possible de retracer ses derniers déplacements, actions et décisions. De cette façon, les derniers instants de la victime peuvent aider les enquêteurs à comprendre comment et pourquoi celle-ci a été ciblée par l’auteur du délit [9]. De plus, au sein d’affaires criminelles dans lesquelles l’auteur est toujours inconnu, une victimologie détaillée peut aider les enquêteurs à circonscrire et définir leur bassin de suspects potentiels. En d’autres mots, en ratissant les différents liens que la victime entretient avec autrui, ainsi qu’avec son environnement, il est possible de réduire la liste potentielle de suspects. Ces liens peuvent être de nature géographique ou temporelle, être liés au travail, à l’école, aux loisirs, aux habitudes de vie, etc. [9]. L’élaboration d’un profil victimologique permet aussi d’identifier le mode opératoire du délinquant. Ainsi, en connaissant bien les habitudes de la victime, ainsi que ses comportements relatifs au lieu où elle fut ciblée par son ravisseur, le processus de sélection des victimes deviendra de plus en plus clair et précis aux yeux des enquêteurs, ce qui sera ultimement bénéfique pour mener à bien l’enquête [9]. Finalement, une autre utilité de la victimologie repose sur le fait qu’elle peut aider à identifier le mobile ou la motivation d’un délinquant. En guise d’exemple, en établissant l’existence d’une relation intime entre la victime et l’auteur du crime, il est possible d’envisager un mobile de vengeance ou de représailles. Ou encore, en sachant que certains objets de valeur appartenant à la victime sont manquants à la suite d’un crime, il est possible d’avancer que la motivation de l’agresseur était probablement axée sur le profit financier [9].


      I. Victime ciblée. Ces victimes sont ciblées puisqu’elles sont l’objet principal de l’infraction et sont, parallèlement, directement associées au mobile du crime. Une victime dite « ciblée » est sélectionnée au préalable spécifiquement en raison de qui elle est, de ce qu’elle détient comme information ou encore, de ce qu’elle possède comme biens. De plus, ce type de victime peut être, ou avoir été antérieurement, en relation avec le délinquant (p. ex., un conjoint, un parent, un membre de la famille, un collègue, un ami, une connaissance, un colocataire, un thérapeute, un enseignant, etc.) [10].


      II. Victime opportuniste. Une victime dite « opportuniste » joue un rôle secondaire dans le passage à l’acte et est considérée comme étant accessoire à l’infraction. Autrement dit, le délinquant est largement motivé par le désir de commettre un crime et malheureusement, la victime devient un dommage collatéral du passage à l’acte. La motivation criminelle n’est donc pas personnelle ni directement liée à la victime. Les victimes opportunistes sont sélectionnées en fonction de leur disponibilité et de leur vulnérabilité, tout comme les victimes ciblées au préalable le sont. Toutefois, un élément diffère au sein du processus décisionnel de sélection pour ce type de victime, soit celui de « l’emplacement ». En effet, le délinquant prendra en considération la localisation spécifique de la victime par rapport à sa propre localisation dans son processus de sélection. Ainsi, la sélection d’une victime opportuniste se fait souvent en fonction des activités, des lieux fréquentés et des horaires que la victime et le délinquant ont en commun [10]. Dans le même ordre d’idées, les victimes opportunistes peuvent également être choisies puisqu’elles correspondent aux critères préférentiels du délinquant. En guise d’exemple, il peut s’agir de critères liés aux fantaisies du délinquant. Plus précisément, les victimes sont sélectionnées en raison de leurs traits perçus comme étant souhaitables ou nécessaires à la satisfaction d'un fantasme. Dans d’autres cas, la victime est sélectionnée en fonction de certains critères symboliques, c’est-à-dire en raison de leur partage de caractéristiques communes avec d’autres personnes connues personnellement par le délinquant, soit un conjoint, un parent, un membre de la famille, etc. [10].


      Ensuite, un délinquant sélectionne généralement une victime en fonction de sa disponibilité, de sa vulnérabilité, de sa désirabilité et, aussi, en fonction des opportunités, et ce, peu importe le type de victime (c.-à-d., ciblée ou opportuniste) [4]. Le terme « disponibilité » fait référence au mode de vie et aux habitudes de la victime qui font en sorte de faciliter l’accès à cette dernière. Le concept de « vulnérabilité » se définit par le degré auquel la victime est susceptible d’être victimisée, et ce, en fonction de ses propres facteurs de risque. Il s’agit également de la perception qu'a le délinquant de la sensibilité d'une victime particulière à sa méthode d'approche et d'attaque. Le terme « désirabilité » fait, quant à lui, référence au degré d’attractivité que présente la victime pour le délinquant. Ce concept est constitué de plusieurs éléments, tels que la motivation du délinquant, l’ethnie de la victime, son genre, son âge, ainsi que toutes autres préférences spécifiques prédéterminées par le délinquant (p. ex., la couleur des cheveux, le gabarit, la grandeur, la couleur des yeux, etc.) [17].  


     Pour conclure le sujet de la victimologie judiciaire, un dernier élément se doit d’être abordé, soit celui de la méthode d’approche. Celle-ci fait référence à la stratégie utilisée par le délinquant afin de s’approcher et d’appréhender la victime. La méthode d’approche peut prendre différentes formes, soit celle d’une surprise, d’une arnaque ou encore, en tirant avantage d’un lien de confiance préexistant avec la victime [10].


LE PROFILAGE GÉOGRAPHIQUE


     Selon le modèle de Brentingham, tous les individus ont un « espace d’activité » dans lequel ils vivent, travaillent, jouent et transigent. En partant de ce principe, il est dit que les délinquants doivent connaître la zone géographique dans laquelle ils commettent leurs crimes. Toutefois, cette théorie était principalement utilisée dans une optique de prévention de la criminalité. De son côté, pour Kim Rossmo, l’inventeur du profilage géographique, il était intéressant de reprendre cette théorie dans une perspective opposée, c’est-à-dire d’analyser l’emplacement du crime dans le but de déterminer le lieu de résidence du délinquant. Ainsi Rossmo voyait le potentiel de cette théorie également dans une approche post-délictuelle [18]. 


     « La localisation de l'endroit où se trouve un délinquant est la pierre angulaire de tout travail de détective (...) et fournit les bases à partir desquelles la découverte de l'identité du criminel peut procéder » (Canter, 1994, p. 282) [19] 


     Le profilage géographique est un outil intéressant pour les enquêteurs puisqu’il part du principe que le lieu où un crime est commis peut fournir de l’information essentielle à l’enquête. Le profilage géographique permet de prédire les différents lieux qui sont habités et empruntés par le suspect, soit son lieu de résidence, son lieu de travail et ses lieux sociaux. Il est également possible de déterminer ses différents itinéraires de déplacement. De façon plus concrète, Rossmo a imaginé un système informatisé portant le nom de Criminal Geographic Targeting (CGT), qui permet d’analyser toutes les données spatiales (p. ex., données relatives au temps, à la distance et aux mouvements vers et depuis les scènes de crime) reliées à un crime. Le résultat de cette analyse, appelé « surface de danger », donne un aperçu d’un modèle tridimensionnel de la zone. Cette dernière, lorsque superposée à une carte, émet des probabilités qu’un délinquant réside dans diverses régions et permet donc aux enquêteurs de se concentrer sur certaines zones en particulier, facilitant donc leur travail [18, 20].  L’interprétation géographique est réalisée à partir de plusieurs facteurs environnementaux ainsi que de facteurs directement liés au crime [20]. 


      Lieu du crime. Le temps et le lieu du crime constituent les informations les plus importantes tout comme le nombre et le type de délit.


      Type de délinquant. Le type et le nombre de délinquants influent sur la criminalité géographique. Le profil psychologique peut aider les enquêteurs à interpréter le comportement du délinquant en donnant de l’information concernant sa personnalité, son « background » et son niveau d’organisation.


      Style de « chasse ». La méthode de « chasse » utilisée par le délinquant a une influence sur la façon dont le délinquant va à la rencontre de ses victimes. Ce style doit être pris en compte lors de la préparation d'un profil géographique.


      Toile de fond cible. Dans une toile de fond se retrouve la routine d’un délinquant potentiel (p. ex., lieux qu’il visite régulièrement comme son quartier, son école, son milieu de travail, etc.). Une toile de fond qui est restreinte ou inégale limite le choix du délinquant en ce qui a trait aux lieux pour la commission d’un crime. Cela ajoute donc de l’importance au lieu choisi aux fins d'élaboration du profil.


      Artères et autoroutes. Considérant que les délinquants ne passent pas par la voie des airs, il faut prendre en compte les routes et les autoroutes qui se trouvent autour du lieu du crime. 


      Arrêts d’autobus et stations de transport en commun rapide. Certains délinquants, comme ceux qui ne possèdent pas de véhicule, peuvent utiliser le transport en commun ou utiliser les pistes cyclables. 


      Voici une liste de questions pertinentes pour l’enquêteur qui tente d’établir un profil géographique [20] : 


      Lieux - Quels sont les lieux liés à ce crime ? Où sont-ils ? Quels sont les distances et le temps de trajet entre eux ? 


      Heure - Quand les crimes ont-ils eu lieu (c.-à-d. heure, jour de la semaine, date) ? Quel temps météorologique faisait-il à ces dates ? Quels sont les délais entre les crimes ? 


      Sélection des sites - Comment les lieux du crime ont-ils été accédés ? Comment le délinquant aurait-il pu connaître ces emplacements ? À quel objectif ou fonction criminelle servaient-ils ? 


      Toile de fond cible - Quelle est la disposition géographique et la disponibilité du groupe cible ? Quel degré de contrôle le délinquant avait-il sur le choix des lieux du crime ? Un déplacement (spatial ou temporel) s'est-il produit ? 


      Méthode de « chasse » - Quelle méthode de chasse le contrevenant a-t-il utilisée ? Pourquoi ces sites ont-ils été choisis et pas d'autres emplacements possibles ? Quel était le mode de transport probable du contrevenant ?


      Finalement, plusieurs recherches antérieures démontrent qu’il existe un lien entre le lieu de l’infraction et le lieu de résidence du délinquant. Dans presque l’entièreté des cas, les lieux du crime et le lieu de résidence du délinquant sont similaires [20]. 


PRÉVALENCE DU MÉTIER


      La carrière de profiler criminel fait rêver et fascine plusieurs personnes. Pourtant, il n’existe qu’une poignée d’individus pouvant réellement se qualifier de profiler criminel. En effet, en date de 2017, il n’y en avait qu’une cinquantaine à travers le monde [21]. Au Québec, ils ne sont que deux [22].


      Yohan Morneau, policier à la Sûreté du Québec, fait partie des rares et des chanceux à pouvoir pratiquer le profilage. Dans une entrevue pour le Curium Mag, il explique les différentes étapes afin de pouvoir devenir profileur : 


      1.  « Devenir policier pour la Sûreté du Québec (SQ);

      2. Avoir fait trois ans d’enquête aux homicides;

      3. Être recruté pour la formation de profileur de l’ICIAF (Association internationale des profileurs criminels);

      4. S’engager moralement à la terminer (elle coûte près de 150 000 $ à l’employeur);

      5. Faire trois stages à l’extérieur du Québec (dont un au sein du FBI). »


      Il explique également que, contrairement à ce que l’on peut voir à la télé (p. ex., Esprits criminels), le profileur ne mène pas les enquêtes, ne fait pas de perquisition ni d’arrestations. Son travail est plutôt d’aider les enquêteurs et non d’agir à titre d’enquêteur. 




R é f é r e n c e s 

____________________


[1] Brent E. Turvey. (2012). Chapter 5 - An Introduction to Behavioral Evidence Analysis, Editor(s): Brent E. Turvey, Criminal Profiling (Fourth Edition), Academic Press, Pages 121-140.


[2] Beauregard, E., Lussier, P. & Proulx, J. (2005). The role of sexual interests and situational factors on rapists’ modus operandi: implications for offender profiling. Leg Criminol Psychol, 10, 265–278. 


[3] Knight, R.A., Warren, J.L., Reboussin, R. & Soley, B.J. (1998). Predicting rapist type from crime scene variables. Crim Justice Behav, 25, 30–46


[4] Beauregard, Eric & Lussier, Patrick & Proulx, Jean. (2007). Criminal Propensity and Criminal Opportunity. 10.1007/978-1-60327-146-2_5.


[5] Holmes, R.M. & Holmes, S.T. (1996). Profiling Violent Crime: An Investigating Tool (2nd ed.). Thousand Oaks, CA: Sage Publishing.


[6] Brent E. Turvey, Jodi Freeman. (2012). Chapter 14 - Case Linkage: Offender Modus Operandi and Signature, Editor(s): Brent E. Turvey, Criminal Profiling (Fourth Edition), Academic Press, Pages 331-360.


[7] Brent E. Turvey. (2021). Chapter 6 - An Introduction to Crime Scene Analysis, Editor(s): Brent E. Turvey, Criminal Profiling (Fourth Edition), Academic Press, Pages 141-159.


[8] http://www.xavier-raufer.com/archives/mcc/html/archives/articles/montet_laurent/profilage_14.html


[9] https://sylviabreger.fr/ 


[10] Brent E. Turvey, Jodi Freeman. (2012). Chapter 12 - Crime Scene Characteristics, Editor(s): Brent E. Turvey, Criminal Profiling (Fourth Edition), Academic Press, Pages 287-310.


[11] MacCulloch, M.J., Snowden, P.R., Wood, P.J.W. & Mills, H.E. (1983). Sadistic fantasy, sadistic behavior and offending. Br J Psychiatry, 143, 20–29. 


[12] Ressler, R.K., Burgess, A.W. & Douglas, J.E. (1988). Sexual Homicide: Patterns and Motives. New York: The Free Press


[13] Prentky, R.A., Burgess, A.W., Rokous, F., Lee, A., Hartman, C., Ressler, R.K. & Douglas, J.E. (1989). The presumptive role of fantasy in serial sexual homicide. Am J Psychiatry, 146(7), 887–891.


[14] Hazelwood, R.R. & Warren, J. (2003). Linkage analysis: modus operandi, ritual, and signature in serial sexual crime. Aggress Violent Behav, 8, 587–598. 


[15] Brent E. Turvey, Jodi Freeman, Chapter 7 - Forensic Victimology, Editor(s): Brent E. Turvey, Criminal Profiling (Fourth Edition), Academic Press, Pages 163-186.


[16] https://www.police-scientifique.com/medecine-legale/descriptions-lesionnelles-corps/ 


[17] https://www.fbi.gov/stats-services/publications/serial-murder


[18] https://www.all-about-forensic-psychology.com/geographic-profiling.html


[19] Canter, D. (1994). Criminal shadows: Inside the mind of the serial killer. HarperCollins. 


[20] Rossmo, D. K. (2000). Geographic profiling. CRC Press. Retrieved 2021, from INSERER-URL-MANQUANT.


[21] https://distances.plus/athletes/yohan-morneau-policier-profileur-criminel-coureur/


[22] https://curiummag.com/profileur-a-tele/

Article rédigé par Molly Bussière & Audrey-Maude Légaré

Correction et vérification réalisées par Ariane Pelchat.

Application théorique

L'APPLICATION DE LA LSJPA

Le processus de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents       


      L’intervention auprès des adolescents au sein du système de justice ne se déroule pas comme le parcours des adultes. En effet, la philosophie d’intervention au Québec met de l’avant la culpabilité morale moindre des adolescents par rapport à celle des adultes qui commettent un crime [1]. Il s’agit d’un principe de longue date se basant sur le fait que les adolescents ont une moins grande maturité et un degré moins élevé de discernement moral [2]. En d’autres mots, il serait possible d’affirmer que les crimes commis par des adolescents sont davantage perçus comme des « erreurs de jeunesse », plutôt que de s’inscrire dans une trajectoire criminelle grave. La LSJPA met aussi de l’avant la réadaptation du jeune contrevenant comme une façon d’assurer la sécurité du public [1]. Finalement, la LSJPA encourage la prise en compte de la réalité culturelle de l’adolescent dans les décisions prises [1].       


Le premier contact   


      Le premier contact se fait tout d’abord, dans la majorité des cas, avec la police. Le contact avec la police est souvent qualifié comme étant la porte d’entrée du système de justice. Dans le cas des adolescents, la décision prise par la police lors de ce contact aura un grand impact sur le parcours de l’adolescent, que ce parcours ait lieu dans le système de justice ou non. Face à un adolescent qui aurait commis un crime, le policier peut prendre quatre décisions [3] :    

      1. N’employer aucune mesure ;   

      2. Donner un avertissement ;   

      3. Renvoyer l’adolescent à un programme communautaire ;   

      4. Suivre une mesure judiciaire (arrestation).       


      Lorsque le policier décide d’intervenir et que c’est possible de le faire, l’imposition d’une mesure extrajudiciaire est favorisée. Selon une étude effectuée dans une grande organisation policière canadienne, cela correspond à 56,5% des cas, contre 43,5% pour la dénonciation en justice. Parmi ces mesures extrajudiciaires, il est possible d’observer que les policiers ont recours dans seulement 11,8% des cas aux programmes communautaires, utilisant dans la vaste majorité des cas le renvoi. Le renvoi à un programme communautaire consiste à référer l’adolescent à un organisme communautaire, dans le but qu’il ne commette pas de crime à l’avenir [4]. Habituellement, la mesure proposée est une activité d’information et de sensibilisation pour le jeune et ses parents souvent par rapport à l’infraction commise [5].    


      Dans le cas où des mesures extrajudiciaires sont priorisées, il s’agit de non-judiciarisation. C’est la décision du policier, que de juger si cette mesure est suffisante pour responsabiliser le jeune et l’empêcher de recommencer. Cette décision se base sur divers facteurs, comme les circonstances de l’infraction, l’attitude, l’âge et les antécédents de l’adolescent, en plus de l’opinion de la victime s’il y a lieu [5]. Peu importe le choix de mesure fait par le policier, il doit inscrire l’événement dans une base de données. Il s’agit d’une information qui sera disponible pour tous les policiers pour une période de deux ans [5].       


Les mesures judiciaires   


      Dans le cas où le policier juge le contraire, c’est-à-dire qu’il y a renvoi au procureur, il y aura d’abord l’examen de la preuve, à savoir si la plainte peut aller plus loin. Dans certains cas, se retrouvant devant une preuve insuffisante, le procureur doit rejeter la plainte et le jeune n’aura pas plus de conséquences. Dans le cas où cette preuve est suffisante, le dossier est relégué à un délégué à la jeunesse (DJ), qui s’assure de faire l’évaluation du jeune dans le but de faire une recommandation de la peine à imposer. Dans plus de 75% des cas, le jeune se verra octroyer une sanction extrajudiciaire par le DJ ou le procureur et sera référé à un Équijustice ou un OJA, sans qu’il y ait poursuite [6]. Des mesures de réparation envers la victime, envers la communauté ou spécifique au jeune peuvent alors être mises en place. Bien que l’adolescent évite un procès, les renseignements concernant cette sanction extrajudiciaire seront conservés pendant une période de deux ans [5].   


      Cette sanction extrajudiciaire peut se solder par un échec ou une réussite. Dans le cas d’une réussite, soit dans 94% des cas, ce sera la fin de la procédure [6, 5]. Dans le cas contraire, où cette sanction est considérée comme un échec, l’adolescent devra être judiciarisé.       


      Dans les cas minoritaires, ou lorsque la sanction extrajudiciaire est considérée échouée, il y aura poursuite et l’adolescent devra passer devant le juge, qui se soldera, ou non, par un verdict de culpabilité. Dans le cas d’une condamnation, diverses options s’offrent, toujours en tenant compte de la situation de l’adolescent, en plus de la gravité du crime commis. En effet, le juge pourra imposer une peine spécifique pour les adolescents, ou, dans des cas bien plus rares, soumettre l’adolescent à une peine pour adultes [5]. Ces peines dites spécifiques peuvent être de diverses formes, comme une peine de probation à purger en collectivité, le bénévolat au profit de la communauté, la fréquentation d’un établissement offrant un programme particulier, le placement sous garde (différé ou non), etc.        


La place de la victime   


      Une particularité de la LSJPA est la place laissée à la victime tout au long du processus. En effet, cette place est par ailleurs nommée dans le préambule de la loi ainsi que dans la déclaration de principes. Cela montre donc une réelle volonté de la LSJPA de solliciter la participation de la victime, si elle le désire, lors des diverses étapes. Tout d’abord, dès la décision du policier soit de judiciariser ou non la situation de l’adolescent, celui-ci peut avoir un contact avec la victime dans le but d’avoir son opinion et ainsi de mieux fonder sa décision [5]. Ensuite, lors des mesures ou sanctions extrajudiciaires, ce sont les mesures de réparation envers la victime directement qui sont priorisées. Pour que cela ait lieu, autant la victime que l’infracteur doivent être d’accord avec la mesure. Dans le cas contraire, une mesure de réparation envers la communauté pourrait être mise en place. Il y a donc une réelle volonté d’impliquer la victime dans le processus, que ce soit d’abord en la contactant avant de choisir la sanction qui sera imposée à l’adolescent ou par la réparation directe à son égard.          


      En somme, l’application de la LSJPA montre un réel désir de réadapter et de réinsérer socialement l’adolescent à la suite de son geste, en l’amenant à répondre de celui-ci et en reconnaissant ses conséquences. C’est davantage dans un processus extrajudiciaire que prend lieu cette responsabilisation et cette réparation, ce qui limite les conséquences à long terme dans la vie de l’adolescent. De plus, cette réparation est encouragée à se faire à l’endroit de la victime, dans tel cas où celle-ci est en accord pour participer dans ce processus. Il semble que ces mesures montrent d’elles-mêmes leur pertinence et leur efficacité, s’ensuivant de taux de récidive encourageant, tout en favorisant la réinsertion sociale [7].        

                                                  

    R é f é r e n c e s    


[1] www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/rc/SJPA,%20r.%201#:~:text=Le%20programme%20de%20sanctions%20extrajudiciaires,particuliers%20de%20fa%C3%A7on%20plus%20ad%C3%A9quate%2C   

[2] www.lsjpa.com/tag/culpabilite-morale-moins-elevee/#:~:text=(41)%20L'adolescent%20a,date%20(voir%20historique%20l%C3%A9gislatif).   https://www.securitepublique.gc.ca/cnt/rsrcs/pblctns/ststclsnpsht-yth/ssyr-fra.pdf   

[3] Alain, M., Hamel, S., & Bibliothèque numérique canadienne (Firme). (2016). Intervenir auprès des adolescents contrevenants au Québec : dix ans d'expérience et de défis sous la LSJPA. Presses de l'Université́ du Québec.   

[4] www.justice.gc.ca/fra/jp-cj/jj-yj/outils-tools/feuillets-sheets/mesur-measu.html#:~:text=L'objet%20des%20mesures%20extrajudiciaires,adolescents%20responsables%20de%20leurs%20actes.   

[5] www.educaloi.qc.ca/wp-content/uploads/guide_intervenants_web_lsjpa.pdf   

[6] www.lsjpa.com/tag/statistiques/#:~:text=2%20713%20jeunes%20ont%20%C3%A9t%C3%A9,compl%C3%A9t%C3%A9es%20dans%2094%20%25%20des%20cas.   

[7] www.iujd.ca/sites/iujd/files/media/document/Bulletin_Synth%C3%A8se5_DLafortune%20(1).pdf 

Article rédigé par Ariane Pelchat

Corrections et vérifications réalisées par H3yjud.

🎃 SPÉCIAL HALLOWEEN 👻

― Est-ce qu'il y a plus de crimes commis à l'Halloween? ―


      Le jour d’Halloween, nous pouvons craindre les esprits, les goules, les zombies, les sorcières, mais devrions-nous craindre les vivants ? En raison du caractère spécial que porte la fête de l’Halloween, il est légitime de se demander s’il y a plus de crimes commis en cette journée, mais est-ce une réalité ?


      D’abord, il faut se rappeler que des crimes surviennent tous les jours de l’année. Toutefois, ceux commis lors de journées « spéciales » telles que le jour de l’Halloween ont tendance à davantage marquer les gens et retenir l’attention des médias qui aiment s’emparer de cas isolés et d’en faire les gros titres. Ces crimes semblent davantage alarmants, ce qui joue sur la peur du public [1].


      Diverses universités aux États-Unis dénombrent une augmentation du nombre de délits et de crimes reliés à la consommation d’alcool le jour de l’Halloween (p.ex., conduite en état d’ébriété, vandalisme). Toutefois, cela ne semblerait pas spécifique au 31 octobre et surviendrait également lors d’autres jours de fête tel qu’au Nouvel An.  Toutefois, une étude menée sur des collégiens établirait un lien entre les fêtes costumées et l’augmentation de la consommation d’alcool. Par ailleurs, il faut également faire attention à ce que semblent dire les statistiques puisque le lien établi entre le nombre d’infractions reliées à la consommation d’alcool ou de tout autre type de délits commis le jour de l’Halloween peut également s’expliquer par une présence policière accrue [1]. 


      Par ailleurs, la tendance semble également différer d’un endroit à l’autre et d’une année à l’autre. Par exemple, le jour de l’Halloween semble être la journée la plus violente de l’année, à Boston, selon une étude sur les tendances criminelles : « Le nombre de crimes violents en soirée le 31 octobre est environ 50% plus élevé qu'à toute autre date de l'année, et le double de la moyenne quotidienne ». Plus spécifiquement pour la ville de Vancouver, en 2021, la police a déclaré avoir eu un weekend d'Halloween chargé. En effet, celle-ci a dû répondre à plus d’un millier d’appels, comprenant des dizaines de crimes graves.


      « […] plus de 215 agents supplémentaires avaient été déployés au cours de ce qui s'est avéré être l'une des périodes les plus occupées qu'ils aient connues depuis le début de la pandémie ». [3]

Mais est-ce réellement une tendance ? En ce qui concerne le Canada, en 2013, on constatait une augmentation du nombre d’affaires criminelles signalées à la police le 31 octobre par rapport à une semaine plus tôt, le 24 octobre. 


-  « 10,8 % — La hausse en pourcentage du nombre d’infractions signalées à la police à l’Halloween (31 octobre 2013) par rapport à celles signalées la semaine précédente (24 octobre 2013).

  • 54,1 % — La proportion de toutes les affaires criminelles déclarées à l’Halloween en 2013 qui constituaient des infractions contre les biens.
  • 15,9 % — La proportion de toutes les affaires criminelles déclarées à l’Halloween en 2013 qui constituaient des infractions contre la personne.
  • 16,9 % — La proportion de toutes les affaires criminelles déclarées à l’Halloween en 2013 qui constituaient d'autres infractions au Code criminel.
  • 5,9 % — La proportion de toutes les affaires criminelles déclarées à l’Halloween en 2013 qui constituaient des délits de la route prévus au Code criminel.
  • 6,4 % — La proportion de toutes les affaires criminelles déclarées à l’Halloween en 2013 qui constituaient des infractions relatives aux drogues » [4]


      Au contraire, en 2017, on a plutôt observé une réduction générale du nombre d’affaires criminelles signalées à la police le 31 octobre, par rapport au 24 octobre, soit une diminution de 4 % [5].


      Ainsi, il ne semble pas avoir de tendance exacte en ce qui concerne le nombre de crimes commis le jour de l’Halloween. On peut affirmer que cela dépend de l’année, du pays, de la ville, voir même du quartier et de la tendance générale de la criminalité à ces endroits. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que même si parfois des situations hors de l’ordinaire peuvent survenir, on peut facilement penser à l’attaque au sabre du 31 octobre 2020 à Québec, cela ne veut pas dire qu’elles deviennent habituelles. 


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 ◉  R É F É R E N C E S   ◉ 


[1] https://www.csclarklaw.com/blog/crime-rates-really-increase-halloween/?fbclid=IwAR1ZeYODgTbNMQEAlUEn0v5_jeh4KJzWBb4xbcmWVYvsX5a0J138YEsqIEY

[2] https://nypost.com/2019/09/28/halloween-crime-reports-show-the-holiday-lives-up-to-its-scary-reputation/?fbclid=IwAR3C82PyZ6_yCLUfsLXHX3HI72xLI-r2z7PRJb1C47Aqy6UAEXRQRNMXdcE

[3] https://globalnews.ca/news/8341464/vancouver-halloween-weekend-crime/

[4]Programme de déclaration uniforme de la criminalité fondé sur l’affaire (DUC 2), Centre canadien de la statistique juridique, données extraites en septembre 2014.

[5] https://www.statcan.gc.ca/fr/quo/smr08/2018/smr08_227_2018

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― Les types de crimes commis à l'Halloween ―


      Le soir de l’Halloween, par ses allusions à la peur, n’est pas sans rappeler les crimes qui se retrouvent dans le quotidien. Au fil des ans, la médiatisation de divers crimes sordides ayant eu lieu le soir de l’Halloween nous amène parfois à croire que les films d’horreur deviennent réalité. Cela peut amener un questionnement quant aux crimes prenant place le soir de l’Halloween. Les crimes sordides sont-ils la norme lors de cette soirée célébrant la peur ? Existe-t-il un lien entre la glorification de la peur et les types de crimes commis lors de cette fête ? 


      Plusieurs sources, comme les réclamations d’assurance, montrent que les crimes contre les biens sont en hausse le 31 octobre. Parmi les crimes contre les biens répertoriés lors de cette soirée, ceux de dommages à la propriété sont grandement répertoriés [1]. Bien que des personnes puissent se sentir toutes puissantes lors de cette soirée sortant de l’ordinaire, il ne faut pas oublier que se laisser emporter peut mener à des crimes : lancer des œufs sur des maisons, rayer des voitures et faire des graffitis sur les propriétés privées constituent tous des délits répertoriés particulièrement lors de cette soirée. Quant à ces crimes, la hausse des réclamations d’assurance est de 19 % [2]. En ce qui concerne les vols dans les propriétés, la hausse est d’autant plus fulgurante, soit une hausse de 60 % [2]. D’autres crimes contre les biens sont également plus répertoriés lors de cette soirée et c’est le cas des vols de voiture [1]. Ainsi, lorsque certains profitent des diverses festivités, d’autres profitent du manque de surveillance pour s’attaquer à leurs biens. En ce qui concerne les crimes violents, ils seraient, selon un professeur de la Northeastern University, en hausse de 50 % lors de la soirée d’Halloween [3]. Cela peut s’expliquer, en partie, par le fait que les crimes violents atteignent leur apogée entre 19 h et 1 h du matin [4]. Ainsi, lors du soir de l’Halloween, il s’agit du moment privilégié pour faire la tournée des bonbons. 


      L’Halloween est également une soirée festive. Ainsi, il y a une hausse des crimes en lien avec la conduite avec les facultés affaiblies. En effet, selon une enquête de la National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA), la soirée du 31 octobre, 40 % des accidents de voiture mortels sont causés par les facultés affaiblies [3]. Toujours en lien avec la consommation d’alcool et d’autres substances, il y a aussi plus de crimes impliquant le fait de troubler l’ordre public [1]. 


      Qu’en est-il des crimes contre les enfants ? S’il y a bien une raison d’être des festivités de cette soirée pour les enfants, c’est la tournée des bonbons. Ainsi, bien que les adultes y trouvent aussi leur comble, les enfants sont davantage à l’extérieur lors de cette soirée et parfois à des heures plus tardives qu’à leur habitude. Les principaux crimes dont les enfants sont victimes sont : les conduites avec les facultés affaiblies, donc les accidents de la route [5]. En effet, le nombre accru de piétons, ainsi que les chauffeurs ayant participé à des soirées festives augmentent les chances des enfants d’être victimes de ceux-ci. Au fil des ans, une attention fut portée aux crimes sexuels commis à l’égard des enfants lors de cette soirée. Une étude fut d’ailleurs réalisée à ce sujet, de façon à éclairer la problématique. Les résultats de cette étude montrent que le jour de l’Halloween n’en est pas un où plus de crimes sexuels envers les enfants sont commis [6]. De plus, il est important de noter que diverses municipalités américaines imposent plus de règles aux délinquants sexuels lors de cette soirée [7].



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[1] https://www.defendyourbrowardcase.com/blog/2020/october/the-most-common-crimes-committed-on-halloween/

[2] https://www.usatoday.com/story/money/personalfinance/2016/10/28/halloween-no-1-day-free-candy-and-property-crime/92797830/

[3] https://www.attorneyshartman.com/blog/surprising-facts-about-halloween-crime-spikes/

[4] https://www.attorneyshartman.com/blog/surprising-facts-about-halloween-crime-spikes/

[5] https://www.sciencesetavenir.fr/high-tech/transports/les-dangers-d-halloween-pour-les-enfants_129126

[6] Chaffin, M., Levenson, J., Letourneau, E., & Stern, P. (2009). How safe are trick-or-treaters? an analysis of child sex crime rates on halloween. Sexual Abuse : A Journal of Research and Treatment, 21(3), 363–74. https://doi.org/10.1177/1079063209340143

[7] https://www.themarshallproject.org/2015/10/28/is-halloween-really-more-dangerous-for-kids

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― Conseils pour une fête d’Halloween en toute sécurité  ―


      Voici quelques conseils de sécurité souvent proposés par les différents corps policiers et les municipalités afin que la fête automnale se déroule en toute quiétude. Non seulement cela peut constituer des moyens de prévention contre la criminalité, mais permet également d'éviter certains accidents. 


À la maison


      Une liste exhaustive de mesures et de recommandations est présentée ici afin de maximiser la sécurité de votre domicile: 


  • Ouvrir la porte sans précaution pourrait vous exposer à un risque d'invasion de domicile. Regardez toujours par le judas ou la fenêtre de votre porte pour évaluer la sécurité de la situation avant d'ouvrir la porte.
  • Même si vous restez à la maison le soir de l'Halloween, gardez les fenêtres et les portes bien verrouillées. Idéalement, vous devriez également avoir votre système d'alarme domestique armé pour avertir les autorités au cas où quelqu'un forcerait l'entrée. Veillez à ce que les accès à vos espaces extérieurs soient également verrouillés. 
  • Les cambrioleurs sont plus efficaces dans l'obscurité, ce qui rend les lumières à détection de mouvement efficaces pour la sécurité de la maison.
  • Les automobiles sont des cibles de choix à Halloween pour le vandalisme et le vol. Si c'est possible, rangez votre voiture dans le garage pour la nuit même si cela signifie de déplacer temporairement certaines choses pour faire de la place.
  • Signalez immédiatement toute activité suspecte ou criminelle aux autorités. 


À l’extérieur 


  • Assurez-vous de garder le chemin d'accès, menant à votre porte d’entrée, dégagé de tout obstacle.
  • Gardez vos animaux à l'intérieur afin de les protéger des dangers possibles et de prévenir tout comportement agressif de leur part envers les visiteurs.
  • Plutôt que d'allumer des bougies dans vos citrouilles, envisagez l'utilisation de bâtonnets lumineux bon marché.
  • Les caméras de sécurité offrent souvent une meilleure vue et peuvent être contrôlées depuis le confort de votre canapé (ou pratiquement n'importe où ailleurs dans le monde) via votre téléphone intelligent. Cela réduit donc la probabilité de blessures en cas d'invasion de domicile, vous laissant plus de temps pour vous mettre en sécurité.


Avec les enfants


      Si vous avez des enfants qui font la collecte de bonbons, il est primordial de discuter avec eux des comportements à adopter pour passer une bonne soirée. Les services de police recommandent généralement aux familles de : 


  • Privilégiez un déguisement de couleur pâle ou vive ou encore, de faire porter un brassard ou un ruban réflecteur à l'enfant pour le rendre plus visible. Il peut également apporter une lampe de poche avec lui.
  • Vérifiez que le costume de l'enfant ne présente pas de risque de chute et qu’il n’obstrue pas sa vision. Optez pour du maquillage plutôt qu'un masque. Si l'enfant souhaite malgré tout porter un masque, vous pouvez agrandir les trous pour les yeux afin qu'il puisse avoir une bonne vision périphérique.
  • Il est important que vous soyez informés du parcours qu'il compte emprunter. Si vous ne pouvez pas l'accompagner, envisager de demander à un autre adulte ou à une personne responsable de le faire. 
  • Convenir d'une heure de retour à la maison, puis munissez le d’une montre. 
  • Mentionnez à votre enfant de marcher (et non de courir) et de rester sur les trottoirs le plus souvent possible. Sensibiliser les enfants à traverser la rue qu'aux endroits prévus à cet effet.
  • Convenez avec l’enfant de ne pas passer sur les terrains privés et de ne pas emprunter de raccourcis. Dites lui aussi de visiter uniquement les maisons qui sont illuminées et décorées.
  • Invitez le à retirer son masque lorsqu’il se déplace d'une maison à une autre.
  • Aviser les enfants de ne pas entrer dans les maisons et de ne pas monter dans les voitures (à l’exception de personnes de confiance préétablies, le cas échéant). Mentionner également de rester à l'écart des animaux qu'ils ne connaissent pas. 
  • Rappelez aux enfants de ne pas manger de bonbons avant qu’une personne responsable ne les ait tous examinés.
  • Sensibiliser votre enfant à reconnaître les endroits sur son trajet où il peut demander de l'aide (p. ex., le poste de police, la caserne de pompiers, etc.) 


Pour les entreprises 


      Chaque année, les spécialistes de la sécurité peuvent constater une augmentation de 40 à 50 % des activités indésirables sur les sites commerciaux pendant la période d'Halloween, et ce, par rapport aux autres mois de l'année.


      Il est possible de constater qu'entre 18h00 et minuit, c'est le moment où les intrus aiment généralement se rendre sur ces lieux, tout particulièrement le week-end. Les conseils de sécurité suivants sont suggérés aux entreprises afin de prévenir le crime et de garder les locaux en sécurité pendant la période d'Halloween :


  • Gardez le périmètre bien éclairé: les chutes sont une cause importante de blessures à l'Halloween. Garder les lumières allumées pendant la nuit préviendra les accidents et dissuadera les vandales. L'installation de lumière à détecteur de mouvement permet d’économiser de l'énergie tout en étant dissuasive.
  • Limitez l'accès à la propriété : gardez toutes les entrées verrouillées et assurez-vous de sécuriser les fenêtres. Contrôlez qui détient les clés.
  • Passez en revue votre plan de sécurité actuel : testez les alarmes et passez en revue l'ensemble de votre système de sécurité.
  • Former les employés à surveiller les comportements inhabituels : les criminels ont tendance à se cacher ou à faire du repérage dans un lieu avant d’y commettre un crime. Apprenez à vos employés à faire attention aux comportements suspects et ayez un plan proactif pour traiter ce type de situation.
  • Célébrez en toute sécurité : si votre entreprise organise une fête d'Halloween, assurez-vous que votre système de protection contre les incendies est efficace et fonctionne correctement. Assurez-vous que les issues de secours sont clairement indiquées, que les extincteurs sont aux bons endroits et qu'aucune décoration n'est accrochée aux détecteurs de fumée ou aux gicleurs situés au plafond.

  

      Bon nombre des conseils mentionnés précédemment peuvent être utilisés tout au long de l’année, comme verrouiller vos portes, garder les lumières allumées et rester à l’affût des personnes suspectes. Également, dans plusieurs municipalités, des patrouilles supplémentaires travaillent durant cette soirée de l’année afin d’assurer la sécurité de tous. Ainsi, avec l’aide de chacun, vous pouvez aider à rendre les célébrations d’Halloween sécuritaires pour tout le monde. 

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BobbyMcAfee. 7 Tips to Secure Your Home for Halloween. (October 2016). https://www.cpss.net/about/blog/2016/10/7-tips-to-secure-your-home-for-halloween/ 

Netwatch system. Crime Prevention Tips for Halloween:Business urged to review security and protect business sites. (2022).https://netwatchsystem.com/blog/security-for-businesses-at-halloween 

Osceola County Sheriff’s Office. Crime prevention month and halloween (octobre 2021). https://celebration.fl.us/crime-prevention-month-and-halloween/ 

Service de police d’Ottawa. Sûreté à l'occasion de l'Halloween. (2022)https://www.ottawapolice.ca/fr/safety-and-crime-prevention/halloween-safety.aspx?hss_channel=fbp-151676194896749

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― Des exemples de prévention de la criminalité à l’Halloween ―


      Comme il fut mentionné précédemment, nous avons parfois l’impression d’observer une augmentation de la criminalité tous les 31 octobre, soit à l’Halloween. Toutefois, dans les faits, il ne semble pas y avoir de tendances précises concernant le taux de criminalité, car celui-ci peut varier en fonction de plusieurs autres facteurs, tels que le jour de la semaine ou même la ville. 

En réalisant des recherches sur le sujet, il est possible de constater que d'autres aspects peuvent également avoir un impact sur le taux de criminalité lors des célébrations d’Halloween, à savoir :  


  1. La ville dispose-t-elle d'un programme de prévention du crime ? 
  2. Y a-t-il un campus universitaire à proximité ? 
  3. Existe-t-il des programmes conçus spécifiquement pour les adolescents et les jeunes adultes ? 


      D’ailleurs, il se trouve que plusieurs villes américaines se sont également penchées sur la question, et ce, après avoir observé une augmentation de certains types de criminalité sur leur territoire, durant l’Halloween. Ces villes présentent toutes un point en commun : elles cherchaient à prévenir, ainsi qu’à décourager les actes criminels à ce moment précis de l’année. 

Bien que cet article aborde uniquement la réalité de 7 villes américaines, rien ne vous empêche d’effectuer vos propres recherches pour connaître les mesures de prévention utilisées dans les autres villes et même dans les autres pays.


Orlando ― Be aware of the person behind the mask


      Chaque année, aux alentours de l’Halloween, les policiers d'Orlando signalent une augmentation de la criminalité. Toutefois, cette hausse des passages à l’acte est concentrée à un seul et unique groupe d’individus, soit les criminels arborant des masques d'Halloween. En Floride, par exemple, deux hommes avec des masques de gorille auraient attaqué un homme qui était en train de déposer de l'argent dans un guichet bancaire automatisé. Deux autres voleurs portant des masques d'Halloween auraient, quant à eux, poignardé un homme derrière un restaurant. 


      Il va sans dire que la décision de porter un masque effrayant le jour de l’Halloween n’est pas une décision surprenante ni rarissime dans ce contexte bien précis. Toutefois, la ville d’Orlando s’est munie de lois et de réglementations visant à dissuader les passages à l’acte, tout particulièrement ceux impliquant des masques. En utilisant un déguisement ou un masque, les délinquants tentent généralement de cacher leur identité en vue d’éviter de se faire identifier par les victimes et ultimement, par les autorités. Ainsi, cette ville floridienne a décidé de resserrer certaines lois, intentionnellement ciblées, afin de prévenir ce type de criminalité en particulier. En guise d’exemple, en Floride, toute personne qui commet un crime en portant un masque peut faire face à des accusations plus graves (facteur aggravant). De plus, une seconde loi implantée en Floride interdit à toute personne âgée de plus de 16 ans de porter un masque ou encore, une capuche, dans un lieu public ou lors d'une réunion. Les célébrations d’Halloween seraient l’une des seules exceptions à cette loi avec les bals costumés ou encore les carnavals. Un fait intéressant à soulever à l’égard de cette loi concerne un groupe haineux (et organisation terroriste) tristement célèbre pour ses habits blancs emblématiques, soit le Ku Klux Klan. Malheureusement, cette loi remonte à l'époque où les membres du Ku Klux Klan sévissaient et celle-ci a été promulguée afin d’empêcher ces derniers de porter leurs capuches pendant leurs marches cérémonielles.


Orange County ― Watching out for children


      La ville d'Orange, quant à elle, avait certainement la sécurité des enfants en tête lorsqu'elle a adopté une ordonnance obligeant les délinquants sexuels à afficher des pancartes ou insignes sur leurs portes lors de la journée d’Halloween, et ce, pour empêcher les trick-or-treaters d’aller quêter des bonbons sur leur propriété. Selon certaines informations, l'ordonnance de la ville exigeait que cette affiche/pancarte soit d’une taille d'au moins 12 par 24 pouces et qu’elle arbore la note qui suit : « Pas de bonbons ou de friandises dans cette résidence ». Ceux qui ne se conformaient pas à cette ordonnance avaient de fortes chances d’obtenir une amende de 1 000 $ ou encore, de se faire octroyer une sentence d’un an de prison. 


      Toutefois, cette réglementation n’a pas pu survivre aux multiples plaintes et poursuites provenant de divers groupes militant pour la protection des droits civiques. D’ailleurs, l’un d’entre eux se nomme Reform Sex Offenders Laws et ces membres ont déclaré que l'ordonnance municipale violait directement les droits des délinquants sexuels du premier amendement, tout en les mettant en danger, ainsi que leurs familles. En réponse aux critiques, la ville a révoqué son ordonnance, précisant que son objectif premier n’était pas d’apporter un préjudice aux individuels visés par celle-ci, mais bien de protéger adéquatement les enfants de la région.


Lompoc Valley ― Flamingo flockings on Halloween


      La ville de Lompoc Valley, dans le sud de la Californie, a choisi d’adopter une approche bien différente pour décourager les délinquants de passer à l’acte durant le mois d'octobre. Cette approche implique ― préparez-vous bien ― des ornements pour pelouse en forme de flamants roses à thématique d’Halloween. Ce concept est inspiré d’une tradition entre voisins qui semble plus couramment utilisée aux États-Unis, qu’au Canada, soit le < You've Been Flocked >. En résumé, le concept est d’acheter plusieurs ornements à pelouse en forme de flamants roses et d’aller surprendre l’un de ses voisins en les installant tous sur son terrain (cour avant, à la vue des passants). Selon les informations recueillies sur le sujet, il s’agirait d’un mouvement social en chaîne où chaque < victime > doit redonner au suivant en effectuant, à son tour, la même blague.


      La ville de Lompoc Valley s’est donc inspirée de cette tradition de voisinage pour financer la Lompoc Valley Police Activities League, une organisation qui offre des programmes pour les jeunes de la région, dans l’espoir de mieux les encadrer et aussi de les aider à éviter les ennuis (p. ex., la délinquance juvénile). Ainsi, les citoyens peuvent commander un < flocage anonyme > moyennant des frais de 25 $ ou encore, demander que l’on vienne enlever la colonie de flamants roses qui est apparue soudainement sur leur terrain, moyennant des frais assez minimes. Les résidents peuvent également se souscrire à une < assurance anti-flocage > afin d’éviter d’en être victime. Tout l'argent collecté va directement à cet organisme qui organise diverses activités sportives, éducatives et récréatives dans la communauté en vue d’établir et de consolider les relations entre les adolescents et les policiers. 

  

Blacksburg, Virginia ― Cold weather may help to deter Halloween crime


      Les autorités policières de Blacksburg, en Virginie, observent quant à elles diverses variations au niveau du taux de criminalité durant la période d’Halloween. Ces variations semblent être attribuables à la présence de certains facteurs, tels que la tenue d’événements sur les campus universitaires et les conditions météorologiques. En guise d’exemple, en 2009, bien que la fête d’Halloween fût célébrée un samedi (durant le week-end), un faible taux de criminalité a été reporté contrairement à ce qui était attendu. Ce phénomène est probablement attribuable à la faible température/au temps froid ressenti durant cette journée. En effet, < de nombreuses études ont montré les effets physiologiques de l’exposition à la chaleur, caractérisés par une augmentation de l’agressivité et des comportements violents, notamment. > (Beaudoin, M. et Canuel, M., 2019). Ainsi, le contraire est aussi vrai et c’est ce qui semble s’être produit à Blacksburg en 2009. De plus, lorsque le temps est froid et pluvieux, les citoyens sont moins susceptibles de se retrouver à l’extérieur et de faire des rencontres, engendrant ainsi moins d’opportunités criminelles.


      Par conséquent, la majorité des appels reçus (52) par les autorités cette année-là, durant l’Halloween, étaient principalement des plaintes pour bruit dans le voisinage (pollution sonore). 6 des 12 arrestations rapportées sont survenues sur le campus de Virginia Tech et celles-ci concernaient des infractions liées à la consommation d’alcool et de drogues, ce qui n’est pas étonnant considérant le contexte festif de cette période de l’année. 


      En connaissant bien les tendances et l’impact de certains facteurs sur la criminalité, les autorités policières de Blacksburg sont mieux outillées et peuvent se préparer convenablement aux prochaines célébrations d’Halloween pour les années à venir. 


Tempe, Arizona ― Theft, vandalism, and simple assault top Halloween crimes


      À Tempe, bien que le taux de criminalité en général ait chuté de quelques pour cent, de 2010 à 2011, certains crimes, tels que le vol, le vandalisme et les voies de fait, sont restés les crimes les plus fréquemment commis à l’Halloween. Plus précisément, les vols représentaient 20,7 % de la criminalité commise sur le territoire de Tempe en 2011. En 2010, les voies de fait étaient quant à elles en tête de liste, représentant 19,1 % de l’ensemble des crimes commis dans la ville. Il ne faut surtout pas passer sous silence les incidents liés à l'alcool qui sont également fréquents, et ce, tout particulièrement dans la région de Mill Street et aussi tout près du campus de l'Université d'État de l'Arizona. Ces crimes liés à la consommation d’alcool peuvent se traduire par des bagarres pouvant entraîner des accusations, soit des voies de fait simples, graves ou avec lésions corporelles. Cette affirmation est loin d’être étonnante considérant que l’alcool produit des effets désinhibiteurs bien connus, notamment celui de désamorcer les tendances à l’autocensure. Pour répondre à ce phénomène qui est significativement plus important lors des périodes de festivités, comme celle de la fête d’Halloween, les autorités choisissent d’agir en amont en prévoyant davantage d’agents de police sur le terrain durant les quarts de nuit, et ce, tout particulièrement dans les zones chaudes (hotspots).


San Luis Obispo ― Increasing law enforcement staff on Halloween


      Suivant la même logique que la ville de Tempe, en Arizona, la police de la San Luis Obispo’s Cal-Poly State University a choisi d’augmenter son nombre de policiers en service pendant la période des festivités de l’Halloween, et ce, chaque année. Comme mentionné en début d’article, le nombre de crimes commis durant l’Halloween à San Luis Obispo semble varier en fonction du jour de la semaine où cette fête folklorique est prévue, soit le 31 octobre. En guise d’illustration, en 2011, lorsque l’Halloween était fêtée un lundi, le nombre de < partys > sur le campus et d'activités connexes semblait être en baisse par rapport à ce qui est observé habituellement. Cette année-là, la police de l’université n'aurait effectué que 5 arrestations, dont 4 pour des crimes liés à l'alcool et 1 pour possession de marijuana. À la lumière de ce qui précède, les autorités peuvent donc généralement prévoir le nombre d’effectifs policiers à déployer sur le terrain en fonction de certains facteurs, dont celui du jour de la semaine, afin d'assurer une présence dissuasive adaptée. D'ailleurs, cet effet de dissuasion peut être généré par un contrôle informel (p. ex., les citoyens avertis, de la surveillance de voisinage, de potentiels témoins, etc.) ou encore, par un contrôle plus formel (p. ex., les agents de sécurité, les policiers, etc.). D'ailleurs, les résultats de plusieurs études en criminologie soutiennent qu'il existe 4 principaux mécanismes par lesquels les contrôles sociaux pèsent/influencent sur les choix des délinquants : 


  1. < Ils augmentent les difficultés de réalisation des délits;
  2. Ils augmentent les risques auxquels s'exposent les délinquants. 
  3. Ils font baisser leurs espérances de gain. 
  4. Ils jettent un discrédit moral sur les actes délictueux et y associent des sentiments de culpabilité et de honte. > (Cusson, 1993).


Queens, New York ― Registered sex offenders must stay home on Halloween


      La police et les agents de libération conditionnelle du Queens, dans l'État de New York, participent activement à la sécurité des enfants, et ce, dans le cadre du programme < Opération Halloween : Tolérance zéro > mis en place par l’état de N.Y. durant la période de l’Halloween. L’objectif premier de ce programme est d’effectuer une surveillance des délinquants sexuels qui sont en liberté conditionnelle entre le 30 octobre et le 1er novembre. Ainsi, les résidences des délinquants ayant été condamnés pour un crime de nature sexuelle peuvent faire l’objet de surveillance et même de visites de vérification afin de s'assurer qu’aucun matériel classé 18+ ou pornographique ne s’y trouve. Ici, il est important de préciser que la découverte de tels objets/matériels viendrait contrevenir directement aux conditions de leur libération conditionnelle.


      En addition, les délinquants sexuels ne sont pas autorisés à porter des masques ni des déguisements et ils ne peuvent pas participer à des activités connexes ayant comme thématique l’Halloween. Il leur est également interdit d'ouvrir leurs portes aux trick-or-treaters le 31 octobre en soirée. Enfin, tous les délinquants sexuels doivent être chez eux à partir de 15 heures le 31 octobre et y demeurer jusqu’à 6 heures du matin le 1er novembre. Ces règlements sont directement liés à l’ordonnance de libération conditionnelle des délinquants sexuels qui sont suivis dans la communauté. Ainsi, ceux qui ne respectent pas ces conditions pourraient se faire révoquer leur libération conditionnelle et donc, être renvoyés en établissement correctionnel.

    

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 ◉  R É F É R E N C E S   ◉ 

  

[1] www.forensicscolleges.com/blog/resources/halloween-crime-in-10-cities?fbclid=IwAR2xxWlvjQ5UeHiY4D585AmL73KpwSRWBEFmLkcG_IsE5IDwZ5H_mC__fw4

[2] www.orlandosentinel.com/news/os-xpm-2010-10-29-os-halloween-mask-crimes-20101027-story.html 

[3] www.georgetownmetropolitan.com/2010/11/03/halloween-crime-and-georgetown/

[4] www.eastvalleytribune.com/local/cop_shop/article_2a134d82-1fcc-11e2-86b4-0019bb2963f4.html 

[5] www.presspublications.com/content/it%E2%80%99s-not-too-soon-think-about-halloween-crime-prevention?fbclid=IwAR15FvREqYy_AzXlxUQgcVVT-mK-wHscDNNefkgHU8epngTmzzkAxZcyhpM 

[6] Ouranos [Carte]. Portraits climatiques. Montréal : Ouranos; 2018. Disponible: https://www.ouranos.ca/portraitsclimatiques/#/regions/24

[7] Heilmann K, Kahn ME. The urban crime and heat gradient in high and low poverty areas. NBER Working Paper. 2019;25961.

[8] www.inspq.qc.ca/bise/changements-climatiques-et-criminalite-y-t-il-injustice-environnementale

[9] www.erudit.org/fr/revues/crimino/1993-v26-n2-crimino936/017338ar.pdf 

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      En espérant que ce type de contenu, davantage informatif et éducatif, vous sera utile et qu'il contribuera à ce que vos célébrations soient autant mémorables que sécuritaires à l'Halloween.



Joyeuse Halloween à tous !


RÉDACTRICES

Rédaction par Molly Bussière, Audrey-Maude Légaré, Ariane Pelchat et H3Y JUD  

 

Correction : par les pairs.

TRAITEMENT DES VIOLENCES EN CONTEXTE CONJUGAL

  

      Depuis les dernières années, le fléau des violences conjugales est de plus en plus mis en lumière au Québec. Nous avons ainsi décidé de présenter certaines dispositions provinciales, sur les plans réglementaires et législatifs, qui encadrent les victimes de telles infractions. Une courte définition de la violence conjugale s’impose d’abord, afin de contextualiser le phénomène : 


« la violence conjugale comprend des agressions psychologiques, verbales, physiques et sexuelles, ainsi que des actes de domination sur le plan économique ou une conduite contrôlante ou coercitive envers un partenaire intime ou contre les prochains, les biens ou les animaux de compagnie de ce partenaire. Elle vise aussi les cas où le partenaire intime est la cible d’une infraction criminelle de la part du contrevenant même s’il n’en est pas la victime directe. Elle peut être vécue à tout âge, y compris avant la majorité. Les gestes posés envers la personne victime de violence conjugale constituent un moyen choisi délibérément pour dominer l’autre et affirmer son pouvoir sur elle. Par ailleurs, lorsque nous parlons de partenaire intime, on entend notamment l’époux, le conjoint de fait ou le partenaire amoureux, actuel ou antérieur, d’une personne ». [1]


      Au Québec, les pratiques policières sont encadrées par un guide de référence. Il précise les cadres généraux de l’action policière à l’échelle provinciale et vise essentiellement à baliser et à uniformiser les pratiques. Nous entendons de plus en plus parler de violences intrafamiliales et conjugales au Québec. Devant cet enjeu, les milieux policiers ont mis en place certaines pratiques différentielles, afin de traiter les cas de violences conjugales, notamment dans le but d’assurer une meilleure protection des victimes. À cet effet, les agents de la paix ont désormais l’obligation de soumettre tous les dossiers de violences conjugales au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), et ce, même s’il y a retrait de plainte du plaignant/victime ou qu’il y a un manque de collaboration du plaignant/victime. En d’autres mots, le corps policier est assujetti à l’obligation de procéder à une enquête complète et à celle de soumettre une demande d’intenter des procédures, indépendamment de la volonté de la victime de porter plainte ou non et peu importe la crédibilité du plaignant. Ainsi, les normes exigent qu’aucun dossier de violence de nature conjugale ne puisse être fermé au niveau du corps policier. La décision de porter ou non des accusations envers le suspect reviendra ainsi au DPCP, après analyse complète du dossier et de la preuve soumise. C’est à lui de déterminer s’il est possible de convaincre un juge que le suspect est coupable hors de tout doute raisonnable, en fonction de cette preuve. Généralement, le DPCP ne tentera pas de convaincre une victime de violences conjugales à témoigner dans les cas de retrait de plainte, étant sensible au souhait de celle-ci. Dans tous les cas, il importe de souligner que le témoignage d’une victime (considérée ici comme témoin) n’est requis que dans les cas où il y a procès, c’est-à-dire lorsque l’accusé plaide la non-culpabilité. En cas de plaidoyer de culpabilité, le procès est évité.


      Une seconde pratique policière venant encadrer les victimes de violences conjugales (et sexuelles) consiste en l’obligation d’informer celles-ci (ainsi que la personne suspecte) des ressources disponibles, dès l'amorce du processus, et de les inciter à s’en prévaloir. D'ailleurs, toutes leurs interventions en la matière se doivent d’être systématiquement consignées par écrit, afin d’assurer un suivi des démarches effectuées pour orienter les victimes.


      Dans l'actuel contexte social et politique, qui met en lumière le fléau qu’est la violence conjugale, le gouvernement du Québec a actualisé un projet pilote de tribunal spécialisé en matière de violences sexuelles et conjugales, mis en place dans certaines régions. Un tel projet implique plusieurs éléments, et ce, dès le moment de la plainte policière. Notamment, il vise à mettre à la disposition des victimes de violences sexuelles ou conjugales des services adaptés à leurs besoins spécifiques. Cela peut vouloir dire qu’elles seront accompagnées par des individus formés quant aux réalités spécifiques de telles formes de violence. De la formation continue est aussi offerte à tous les professionnels impliqués au sein du processus (agents de probation, policiers, avocats, procureurs, juges, intervenants du Centre d’aide aux victimes d’actes criminels – CAVAC – et du Centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel – CALACS). Notons que le CAVAC est, de façon générale, systématiquement impliqué dans les dossiers de victimes de violences conjugales.


      Une autre pratique spécifique à ce type d’infraction est le recours dont disposent les victimes de mettre fin à leur bail, dans la mesure où elles vivent avec leur agresseur, et ce, sans aucune contrainte. Les dispositions prévues par ce règlement sont même plus larges encore. En effet, il est possible, en tout temps, de demander de mettre fin à son bail résidentiel (résiliation de bail) si la sécurité de la victime ou celle d’un enfant habitant avec elle est compromise, notamment en raison de violence conjugale de la part du partenaire ou d'un ex-partenaire intime, de violence sexuelle subie, peu importe par qui, et de violence envers un enfant qui habite la résidence visée par le bail. La plainte policière n’est d’ailleurs pas une étape nécessaire pour procéder à la demande de résiliation. Dans les cas de baux de sous-location, cela s’applique également. Afin de demander une telle résiliation, trois étapes sont nécessaires :


· Première étape : 

Il s'agit d'obtenir une attestation d’un officier public. Par cette attestation, un fonctionnaire ou un officier public, désigné par le ministère de la Justice, reconnaît que mettre fin à un bail est nécessaire pour la sécurité de la victime ou pour celle d’un enfant habitant avec elle. Pour obtenir cette attestation, trois documents sont essentiels :


Le formulaire de Demande d'attestation en vue de la résiliation d'un bail pour motifs de violence sexuelle, de violence conjugale ou de violence envers un enfant qui habite le logement visé par le bail que vous devez remplir;


Une copie du bail;


Un des deux documents suivants : une copie de la déclaration à la police/le nom du service de police qui est intervenu, dans le cas où une plainte a été portée, ou un document, par exemple une lettre, venant appuyer la demande et provenant d’une personne en relation avec la victime ou avec l’enfant qui demeure avec celle-ci.


· Seconde étape : 

Remplir un avis de résiliation de bail. Au besoin, il est possible de s'informer auprès du Tribunal administratif du logement pour en savoir plus sur cet avis.


· Troisième étape : 

Transmettre l’attestation ainsi que l’avis à son propriétaire.


      Après la réalisation de ces étapes, le bail prendra fin dans un délai de deux mois. Si le bail est d’une durée indéterminée ou d’une durée de moins de 12 mois, il prendra fin après un mois. Les demandeurs peuvent également obtenir jusqu’à deux mois de loyer et des frais de déménagement de la Direction de l’indemnisation des victimes d’actes criminels (IVAC) en cas de violences sexuelles ou conjugales. Il importe également de souligner que les victimes de tels types de violences sont admissibles à une aide financière d’urgence.


      Dans un même ordre d’idées, la loi indique que le policier doit assurer la sécurité de la victime si elle désire retourner chercher ses effets personnels de première nécessité là où ils se trouvent.


      Lors de l’absence d’infraction criminelle, mais en présence de danger appréhendé, le policier qui a des motifs raisonnables de croire qu’une personne est sur le point de commettre un acte criminel en matière conjugale peut procéder à son arrestation sans mandat en vertu de l’article 495(1) du Code criminel. Il libère par la suite la personne concernée sans condition en vertu de l’article 503(4) du même code, dès que cela est possible, à partir du moment où il est convaincu que son maintien en détention n’est plus nécessaire pour empêcher la commission d’un acte criminel. Il importe également de rappeler qu’en toutes circonstances, la personne victime ou présumée victime de violence conjugale doit être informée par le corps policier dès que la personne détenue est libérée du poste de police. Dans le cas où le policier constate que la personne victime craint, pour des motifs jugés raisonnables, que la personne suspecte ne lui cause ou cause à son enfant ou à son partenaire intime des lésions ou n’endommage sa propriété, il se doit de procéder à une enquête et soumettre le dossier, afin d’obtenir un 810 au DPCP. À cet effet, il en va de même si la crainte de la victime ou présumée victime concerne une infraction visée à l’article 162.1 du Code criminel, soit la publication, distribution, transmission, vente ou rendre accessible une image intime. [1]


_______________________________________


Références 


[1] https://cdn-contenu.quebec.ca/cdn-contenu/adm/min/securite-publique/publications-adm/publications-secteurs/police/approches-pratiques/guide_pratiques_policieres/GUI_pratiques_policieres_surveillance_territoire_V3.pdf?1654713709

[2] https://educaloi.qc.ca/actualites-juridiques/tribunal-specialise-pour-situations-violence-sexuelle-conjugale-voit-jour/ 

[3] https://educaloi.qc.ca/capsules/plainte-violence-conjugale/ 

[4] https://www.quebec.ca/habitation-et-logement/location/bail/fin-bail-violence-conjugale-agression-sexuelle 

[5] https://laws-lois.justice.gc.ca/fra/lois/c-46/ 


Rédaction par Sofia Erchiqui-Martel

Correction par Audrey-Maude Légaré

12 JOURS D’ACTION CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES

C’est quoi ? Et Pourquoi?

  

      Au Québec, cette campagne de sensibilisation débute le 25 novembre, date de commémoration internationale de l’assassinat politique en République dominicaine des trois sœurs militantes Mirabal en 1960 sur ordre du dictateur Rafael Leonidas Trujillo. Ils se terminent le 6 décembre, Journée nationale commémorant le meurtre de 14 jeunes femmes en 1989 à l’École Polytechnique de Montréal. À l’international, il s’agit de 16 jours d’activisme contre la violence faite aux femmes qui se terminent le 10 décembre à la journée internationale des droits de la personne. 


       Durant cette période plusieurs activités de sensibilisation et de prévention sont misent de l’avant afin de conscientiser la population et les différents acteurs politiques à la problématique de la violence faîte à l’égard des femmes. 

 

      Au cours des dernières années, nous avons assisté à diverses campagnes tel que #MeToo, #TimesUp, #Niunamenos, #NotOneMore, #BalanceTonPorc, #violencesystémique. Plusieurs voix se sont élevées afin de briser le silence sur la violence. Bien que les noms et les contextes varient selon les endroits, les femmes et les filles du monde entier subissent de nombreux abus. En tant que société et comme individu, Il demeure important de se questionner sur la façon dont on aborde la question des relations saines auprès des hommes et des femmes afin de parvenir à des relations plus égalitaires et moins violentes.  


      Voici 12 actions que vous pouvez mettre en place pour soutenir une femme et vous positionner contre la violence faîte leur égard:  

  1. Écouter et croire: Une femme victime de violence conjugale ou sexuelle a souvent honte de ce qui lui arrive. Lorsqu’elle se confie à vous, prenez le temps d’écouter ce qu’elle a à dire.  Elle vous fait confiance, il serait délicat de remettre en doute sa parole et son expérience.     
  2. Ne pas Juger : Éviter d’amplifier ou minimiser la situation ou les émotions de la victime. Personne ne vit cela de la même façon. En réagissant de manière exagérée, la victime pourrait s’abstenir de se confier et sentir qu’il est anormal de ne pas réagir de la même façon que vous.     
  3. Déculpabiliser : Ce n’est jamais la faute de la victime. Remettre la responsabilité sur l’agresseur.     
  4.  Respecter le rythme : La violence est une dynamique très complexe. Il est parfois difficile pour la victime de mettre un terme ce genre de relation pour diverses raisons; parce qu’il y a les enfants, parce qu’elle a peur, etc. Elle aura besoin de temps pour prendre une décision.     
  5.  Maintenir le lien : Offrir du soutien et une présence. Par exemple, une victime de violence conjugale sera souvent isolée de son entourage par son conjoint. Restez disponible dans le respect de vos limites. Une femme avec un réseau soutenant saura vers qui se tourner lorsqu’elle sera prête à partir.     
  6.  Parler d’émotions et de besoins : Éviter de critiquer le conjoint ou l’agresseur, aborder plutôt comment elle se sent et ce dont elle aurait besoin. Dans le cas contraire, la femme pourrait vouloir chercher à protéger la relation. C’est comme si on critiquait ouvertement son couple et/ou sa capacité de choisir un bon partenaire. Si vous êtes directement témoin d’un évènement vous pouvez partager ce que vous avez ressenti sur le moment et faire part de vos inquiétudes. Par exemple ‘’ J’ai eu peur’’.  Rester à l’affut du potentiel danger.    
  7. Assurer une discrétion : Évitez de publier l’histoire de la victime sur vos réseaux sociaux. Si l’histoire doit être racontée c’est par la personne concernée ou avec son autorisation. Assurez-lui que vous n’en parlerez pas sans son consentement. Vous pouvez également lui proposez d’intervenir seulement si vous craignez pour sa sécurité ou son intégrité.     
  8. Favoriser la reprise de pouvoir : En misant sur les forces et les habiletés des victimes vous pouvez l’aider à regagner son autonomie et sa confiance. Ce sont des femmes courageuses, pleines de ressources et de stratégies de survie; Parfois il suffit seulement d’un petit coup de pouce pour faire la différence.     
  9. Référer aux ressources appropriées : Accompagnez et dirigez les victimes vers les ressources spécialisées qui peuvent venir en aide à celles-ci tel que les maisons d’hébergement, les lignes d’écoute, les policiers, les CALACS et les CAVAC.  
  10. Briser les mythes : L’alcool, le stress, les troubles de santé mentale ou un passé empreint de violence ne sont pas ni des causes ni des motifs justifiant la violence. 
  11.  Partager : Parlez-en et transmettez l’information. Dans une ère où les médias sociaux sont omniprésents, se positionner contre la violence contribue à briser les tabous, à prévenir et sensibiliser.     
  12. Dénoncer : Que vous soyez victime ou témoin, dénoncez! La violence est inacceptable peu importe la forme qu’elle prend.  

      


_______________________________________


Références 


[1]  https://sosviolenceconjugale.ca/fr/outils/sos-infos/14-messages-a-transmettre-a-une-victime-de-violence-conjugale 

[2] https://cavas-info.org/prochevictime.wfs  

[3] https://www.12joursdaction.com/ 

[4]   https://sosviolenceconjugale.ca/fr/outils/sos-infos/8-facons-de-soutenir-une-victime-de-violence-conjugale  


Rédaction par H3YJUD

En savoir plus

LE PROCESSUS DE DÉTERMINATION DE LA PEINE

      Avant les années 2000, le Code criminel canadien donnait peu d’indications aux juges quant à la détermination de la peine. Aujourd’hui, toutefois, il existe plusieurs balises venant encadrer les décisions répressives au sein du système pénal. Ce qu’il importe de savoir, c’est que dans tous les cas, au Canada, la peine doit être proportionnelle au crime commis, au regard de l’ensemble des éléments qui caractérise celui-ci (notamment en prenant en compte les différents facteurs aggravants ou atténuants), ainsi que du degré de responsabilité de la personne contrevenante. La notion de proportionnalité est particulièrement importante. En ce sens, plus un crime est jugé objectivement grave, plus le châtiment sera sévère et vice-versa. Toutefois, au-delà de ce postulat de base, le processus de détermination de la peine comporte plusieurs nuances qu’il importe de distinguer. 


      Il existe plusieurs façons de concevoir la peine, en appuyant notamment celle-ci sur différentes théories ou sur différents objectifs qui permettent d’orienter l’autorité responsable quant à sa prise de décision. La peine (punition) peut servir à rétribuer, à neutraliser, à réparer, à dissuader, à réparer, à dénoncer, à punir, ou encore à réhabiliter, selon chaque situation. La sentence rendue peut alors répondre à une ou à plusieurs de ces différentes finalités. Nous prendrons ici le temps de décortiquer certaines de ces théories liées au processus de détermination de la peine. 


      En droit criminel, la théorie rétributive implique une obligation morale de punir l’individu délinquant. Cette école de pensée exige ainsi une punition afin de compenser le mal qui a été fait. Fondamentalement, l’idée de rétribution consiste à « réparer un mal par un autre mal ». On châtie alors au nom de la moralité et d’un principe de justice. Pour les adeptes de la théorie de la rétribution, le châtiment vise à « effacer » le passé, plutôt qu’à produire un effet sur l’avenir (contrairement, par exemple, à l’objectif de réhabilitation). 


      La théorie de la dissuasion en est une autre sur laquelle on peut s’appuyer en droit criminel. Ici, on cherche à donner un sens rationnel à la peine choisie. La principale préoccupation derrière cette théorie consiste à prévenir des formes ultérieures de criminalité et à améliorer la protection de la société au long cours. L’objectif dissuasif en est un davantage modéré. Selon cette vision, les autorités se doivent de mettre en place les filets nécessaires, afin d’empêcher la personne coupable d’un crime de causer de nouveaux dommages à la société, tout en dissuadant l’ensemble de ses concitoyens à en commettre des semblables. De façon plus concrète, la théorie de la dissuasion se base sur un calcul rationnel entre les coûts (risques) et bénéfices potentiellement associés à un passage à l’acte criminel. Elle suppose que l’Homme, en tant qu’individu rationnel, effectue une balance des coûts/risques et bénéfices potentiels avant toute prise de décision. C’est ainsi que l’objectif dissuasif prend son sens : le message de dissuasion vise toute une société, en se basant sur l’idée selon laquelle chacun a le potentiel de devenir un futur criminel. Les postulats de notre Code criminel canadien, de même que son application, représentent le symbole dissuasif qui rappelle que tout acte criminel est à risque d’engendrer un châtiment plus ou moins significatif, en fonction du comportement reproché. Selon la théorie dissuasive, tous les crimes doivent être punis, même les plus modérés ou les moins « graves », si on veut éviter leur reproduction. 


      En ce qui a trait à la théorie de la dénonciation, son principal objectif, tel que son nom l’indique, est de dénoncer le crime. Il s’agit d’une obligation de l’autorité envers la population. Au sein de cette théorie, le peuple devient un nouveau critère à considérer à travers la prise de décision. Cette dernière répond, en quelque sorte, à une demande du public. L’objectif derrière cette théorie se veut davantage symbolique, communiquant à l’échelle sociale l’atteinte morale que représente le crime commis. Il y a alors obligation de punir, afin de faire passer un message dénonciateur à l’ensemble d’une société. Dans le droit criminel moderne, au Canada, l’objectif de la dénonciation est codifié à l’article 718 du Code criminel comme principe de détermination de la peine. Il s’agit d’un critère prépondérant dans les processus décisionnels. En somme, le crime est considéré comme une transgression des valeurs morales et fondamentales d’une société donnée, faisant ainsi souvent naitre des sentiments d’indignation, d’injustice ou encore de colère. C’est pourquoi l’autorité judiciaire a un devoir envers le public, afin d’apaiser ces sentiments et d’améliorer le niveau de confiance en ses dirigeants. La théorie de la dénonciation permet ici de légitimer les émotions induites par le crime au sein du peuple. Elle répond ainsi à un but essentiellement utilitaire, en proposant généralement la peine la plus sévère. 


      Dans un ordre d’idées quelque peu différent, nous pouvons distinguer la théorie de la réhabilitation. Cette dernière a beaucoup évolué au fil du temps, mais elle s’appuie sur un principe de réinsertion sociale et de régénération morale. En ce sens, on parlera davantage de réhabilitation carcérale, puisque sa forme moderne est souvent rattachée à la notion d’incarcération. Elle suppose qu’il est possible de modifier la façon de penser ou de se comporter d’un individu délinquant par le biais d’une intervention thérapeutique offerte en milieu institutionnel. La modification du comportement est l’ultime finalité attendue, afin d’éviter la récidive. La peine n’est ainsi pas exclusivement vue comme une punition, mais davantage comme un programme. Cette finalité prend forme dans la prévention de la récidive par la réhabilitation de l’humain derrière les gestes imputés.  


      En somme, il n’y a pas une théorie de la peine qui se veut supérieure aux autres. Cependant, l’ensemble de ces théories permet d’encadrer les autorités responsables, et ce, afin qu’elles rendent la sentence la plus juste et la plus appropriée à chaque situation. Rappelons-nous cependant que la modération et l’équilibre sont des concepts essentiels, alors que les peines doivent, certes, répondre à un objectif coercitif, mais le tout dans le respect des idéaux de liberté et d’humanité [4]. 


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Références 


[1] www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/jr/avp-vea/p2.html

[2] www.erudit.org/fr/revues/cd1/2016-v57-n4-cd02863/1038262ar/ 

[3] www.cairn.info/revue-archives-de-philosophie-2003-2-page-237.htm#:~:text=La%20th%C3%A9orie%20r%C3%A9tributive%20suppose%20qu,la%20justice%20accomplit%20sa%20t%C3%A2che. 

[4] www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/jr/avp-vea/p2.html


Rédaction par Sofia Erchiqui-Martel

Correction par Audrey-Maude Légaré


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